Les affrontements qui ont opposé des villageois et des voleurs de zébus à Madagascar ont fait une centaine de victimes ces de...
Les affrontements qui ont opposé des villageois et des voleurs de zébus à Madagascar ont fait une centaine de victimes ces derniers jours.
Un fermier malgache travaille avec un zébu dans une rizière.
Exaspérée par la faillite de l’État, la population s’organise pour se faire justice elle-même.
Excédés par le vol de zébus, des villageois de Fort-Dauphin (à un millier de kilomètres au sud-est d’Antananarivo, la capitale de Madagascar) ont massacré, dans plusieurs opérations punitives, ce week-end, 90 voleurs (les dahalos ). Selon la gendarmerie, les villageois, prévenus de l’arrivée prochaine de ces voleurs, leur ont tendu des embuscades, armés de pierres, de sagaies et de fusils de chasse.« Si la possession d’un zébu est traditionnellement synonyme de puissance, les vols de zébus par des bandes organisées parrainées par des politiques sont motivés par l’intérêt pécuniaire qui découle de la revente et de l’exportation des bovidés », explique Mathieu Pellerin, chercheur rattaché à l’Institut français des relations internationales (Ifri). Derrière ces vols, il y aurait aujourd’hui de véritables réseaux mafieux constitués avec le soutien d’hommes politiques locaux et nationaux.
Personne n’ose arrêter le principal responsable
Ainsi, le principal responsable de ce trafic de zébus, Remenabila, un homme de plus de 70 ans, est officiellement recherché par la police depuis le mois de juin. Sa tête est même mise à prix à 35 000 € pour qui le livrera « mort ou vif » . Mais personne n’a encore osé le dénoncer ou l’arrêter. « Derrière lui se cachent de hauts responsables politiques d’Antananarivo qui ont le bras long. Il est bien protégé », confie, sous le couvert de l’anonymat, un observateur européen de la société malgache.L’inefficacité des pouvoirs publics exaspère de plus en plus la population. Depuis le début du mois d’août, la presse malgache a fait état de plusieurs histoires de justice populaire semblables à celles qui s’est déroulée ces derniers jours dans cette région reculée du sud-est de Madagascar.
« Les gens se font désormais justice eux-mêmes, constate Mathieu Pellerin. N’ayant plus confiance dans l’appareil d’État qui a failli, constatant la connivence entre les voleurs, des politiques et des représentants de l’ordre, la population est en train de basculer dans l’autodéfense. Les lynchages de ce week-end montrent combien la société malgache est devenue violente après la crise politique de 2009. »
LAURENT LARCHER
la-croix.com
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