Dhoim, 18 ans : « À Mayotte, je n’allais pas à l’école, mais à la guerre »
Dhoim a 18 ans. Elle est étudiante, à Brest. Son récit a été élaboré avec les journalistes de la Zone d’expression prioritaire, lors d’ateliers avec des jeunes.
La Zone d’expression prioritaire (Zep) élabore ces récits avec des jeunes de 14 à 28 ans lors d’ateliers d’écriture encadrés par des journalistes. Ces témoignages sont ensuite publiés par des médias. Ouest-France a choisi d’être l’un d’eux. Tous les mois, le premier mardi, dans le journal et sur ouest-france.fr, on peut lire ces récits de vie, comme celui de Dhoim, 18 ans.
« Je n’allais pas à l’école, mais à la guerre. Au lieu de stresser pour mes devoirs, je stressais par rapport à la violence. Nous, les élèves, on se faisait caillasser au moins une fois par semaine. Des jeunes venaient devant le lycée et nous lançaient des gros cailloux. Dès qu’on arrivait, on avait peur, on rentrait le plus vite possible à l’intérieur pour être en sécurité. Mon année de terminale, au lycée polyvalent Gustave-Eiffel de Kahani, à Mayotte, a été très difficile.
Les agresseurs, c’étaient des bandes de jeunes hommes, ils avaient 18-20 ans. Ils étaient encagoulés, on ne voyait que leurs yeux. Ils étaient encore plus présents avant les vacances. Les élèves criaient d’angoisse et de peur, certains pleuraient. Un jour, la CPE a été touchée à la tête. Elle s’est évanouie sur le coup. Elle a été traumatisée. Le lendemain, le lycée était fermé. Mon prof de français aussi a été touché à la tête. Il a été absent plus d’une semaine. »
« Les élèves ont décidé de faire une grève »
« Dans ma classe, on avait créé un groupe Messenger au nom de la classe et on textait. Est-ce que les agresseurs allaient être là ? De bouche-à-oreille, les élèves ont décidé de faire une grève. L’appel est parti des réseaux sociaux, avec comme mot d’ordre « être en sécurité ». Le jour de la grève, les élèves se sont réunis dans la cour avec des pancartes. Le proviseur est intervenu et les a fait sortir à l’extérieur. C’était risqué car les grévistes pouvaient être caillassés. Moi, je n’ai pas osé la faire, j’avais peur d’être sanctionnée et même blessée. Le soir, à 19 h, sur Mayotte La Première, il y a eu un reportage sur le mouvement des lycéens. Ça a fait le buzz !
Quelques jours plus tard, les gendarmes étaient là, devant le lycée. À la porte, dès le matin et pour toute la journée, tous les jours. Quand les agresseurs venaient, les gendarmes lançaient des gaz lacrymogènes, histoire de les faire fuir, mais ils étaient plus résistants que nous car ils avaient des cagoules. Nous, on n’arrivait pas à respirer, et finalement les agresseurs étaient toujours là. »
« Malgré tout, j’ai obtenu mon bac pro avec mention assez bien »
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