Djamel Bakar : « Il faut profiter de ce que le football peut nous offrir » !

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En quoi était-ce important pour toi d’aider ton pays d’origine ? Djamel Bakar : « Il faut profiter de ce que le football peut nous offrir » !

Djamel Bakar : « Il faut profiter de ce que le football peut nous offrir » !

EXCLU - DJAMEL BAKAR : « IL FAUT PROFITER DE CE QUE LE FOOTBALL PEUT NOUS OFFRIR » !


Djamel Bakar n'a pas eu le parcours que certains lui prédisaient. Le natif de Marseille, qui a pris sa retraite en 2019 à seulement trente ans, a parfois joué de malchance. Pour Onze Mondial, il est revenu en exclusivité sur sa carrière. Entretien.

Tu es né le 6 avril 1989 à Marseille. Qu’est-ce que tu peux nous dire sur ton enfance ?


C’était top ! Je passais mon temps au quartier, avec mes collègues. On jouait au foot toute la journée ! Mes frères ont tous fait du foot, et l’un d’eux a même été au centre de formation de Toulouse. Le football, c’est une histoire de famille.

Tu es d’origine comorienne. Qu’est-ce que ça représente pour toi ?


C’est mon pays ! J’y suis allé tout jeune mais je ne me souviens de rien. Ensuite, j’y suis retourné quand j’avais vingt-cinq ans, peu de temps avant de rejoindre la sélection. Je voulais voir comment c’était. J’ai pu rendre visite à ma famille aussi. Finalement, j’y suis allé assez tard. Après, les valeurs propres aux Comores m’ont été inculquées dès mon plus jeune âge par mes parents. Surtout qu’à Marseille, il y a une forte communauté de Comoriens.

Quel est le joueur qui a marqué ta jeunesse ?


C’est une bonne question (rires) ! Quand j’étais petit, j’étais fan de Ronaldo, R9 ! Pour moi, c’est le meilleur joueur de tous les temps.

Tu fais tes classes dans plusieurs clubs amateurs marseillais, avant d’intégrer le centre de formation de l’AS Monaco en 2004. Comment t’es-tu adapté à ton nouvel environnement ?


Au départ, ce n’était pas simple. Quitter sa famille, ses proches et même son quartier, c’est toujours un déchirement. Surtout à treize ans ! Aujourd’hui, c’est d’ailleurs interdit, il faut avoir au moins quinze ans. J’ai dû apprendre à me faire de nouveaux amis et à vivre avec eux au quotidien.

Monaco possède un centre de formation très réputé. Quel est ton point de vue à ce sujet ?


C’est ce qui se fait de mieux ! La formation est de très haute qualité. Ce qui est important, c’est que le club ne se contente pas de développer des footballeurs. Il développe aussi des hommes. C’est essentiel. Mes anciens coéquipiers au centre de formation ne sont pas tous devenus footballeurs : il y a des entrepreneurs, des écrivains, des gestionnaires du patrimoine… Monaco, c’est une école de la vie.

« Pour tout Marseillais, c'est incroyable de jouer au Vélodrome »


Tu gravis tous les échelons et tu intègres le groupe professionnel. Le 14 avril 2007, tu fais tes grands débuts en Ligue 1 à Lorient. Comment as-tu vécu ce moment si particulier ?


C’était très fort émotionnellement. En plus, je n’avais pas encore signé pro et j’avais été lancé par Laurent Banide, l’un de mes formateurs. Fouler une pelouse de Ligue 1, c’est une immense fierté. Surtout pour un Marseillais issu des quartiers populaires. Se retrouver dans un vestiaire de stars du jour au lendemain, c’est impressionnant.

Tu exploses lors de l’année qui suit. Tu inscris un triplé à Brest en Coupe de France en janvier 2008 à seulement dix-huit ans. Monaco hérite ensuite de Marseille à l’extérieur lors du tour suivant. De quelle manière as-tu abordé cette rencontre ?


Sincèrement, sans me prendre la tête. J’étais insouciant et très innocent à cette époque. Je ne connaissais pas vraiment les rouages du monde professionnel. Par exemple, la tradition veut qu’après un triplé, l’attaquant doit récupérer le ballon du match. Je crois que le ballon du match à Brest est resté dans l’avion (rires) ! J’ai pris ce déplacement au Vélodrome comme n’importe quel autre match de foot. Même si forcément, je savais que ça allait être particulier.

Malgré la défaite (1-3), tu marques pour Monaco. Qu’est-ce que ça fait de marquer un but chez soi ?


Je crois que ce soir-là, j’ai réalisé le rêve de beaucoup d’enfants. Pour tout Marseillais, jouer au Vélodrome c’est indescriptible, incroyable ! C’est un stade mythique. À Marseille, tout le monde a grandi dans l’espoir de fouler cette pelouse. Récemment, j’ai regardé un reportage sur le match entre l’UNICEF et les légendes de l’OM. Plusieurs artistes ont pu jouer au Vélodrome ce soir-là. Même si ce n’était qu’un match de charité, je pense que cela restera longtemps gravé en eux. Ils étaient émerveillés, et je me suis reconnu en eux.

Dans la lignée de tes bonnes performances, tu intègres les U19 puis les U20 de l’équipe de France. Quelle est la recette pour ne pas s’enflammer ?


Il faut avoir un bon entourage ! Ma famille et mes amis veillaient à ce que je garde les pieds sur Terre. C’est bien d’être ambitieux et de vouloir aller plus haut, mais il ne faut pas s’éparpiller. Mes formateurs s’efforçaient de me le répéter à Monaco. Au club, l’encadrement était top, à tous les étages. Je pense que cela m’a servi au quotidien. Après, encore une fois, j’étais très innocent. Donc je ne calculais pas vraiment l’aspect extra-sportif. Tout ce que je voulais, c’était jouer au foot.

Tu connais ensuite quelques blessures qui freinent ta progression. En quoi cela a été compliqué ?


Évidemment, ce n’était pas simple sur le moment. Passer de l’adrénaline des matchs de Ligue 1 à des journées passées chez le kiné, c’est difficile à accepter. En plus, j’étais très jeune. Je n’avais pas le permis. Il fallait que je trouve quelqu’un pour m’emmener à chaque fois. Au centre de formation, j’étais un peu assisté. Là, c’était différent, j’étais dans le monde des adultes. J’ai dû m’adapter. Aujourd’hui, c’est derrière moi.

En août 2009, tu commences la saison en tant que titulaire. Mais en toute fin de mercato, tu rejoins finalement Nancy. Dans quelles circonstances ?


En fait, Eiður Guðjohnsen (ancien attaquant de Chelsea et du FC Barcelone, ndlr) devait arriver. Sur le moment, je me dis qu’une star arrive et je m’interroge forcément sur mon temps de jeu. Dans le même temps, le club me fait comprendre que je dois partir. Nous étions en négociations mais je n’ai plus eu de nouvelles après quelques semaines. J’ai compris. J’ai donc fait le choix de rejoindre Nancy pour pouvoir m’exprimer à nouveau après la saison compliquée que j’avais connu.

Quel bilan fais-tu de ton parcours à l’AS Monaco ?


Je n’en garde que de très bons souvenirs, que ce soit au centre de formation ou chez les professionnels. J’en ai appris un peu plus sur la vie aux côtés de François Modesto, qui m’emmenait souvent aux entraînements, ou de Lucas Bernardi, qui était un peu le « papa » de tous les jeunes. J’ai pu côtoyer de grands joueurs, ce qui n’est pas donné à tout le monde. Monaco m’a fait grandir en tant qu’homme.

« Le football africain est en constante évolution »


Tu arrives donc à Nancy, où tu as l’ambition de te relancer. Comment s’est déroulée ton adaptation loin du sud de la France ?


J’étais encore innocent. Cela peut paraître fou, mais je ne jouais au football que pour m’amuser. J’étais tout de même conscient qu’il me restait d’autres étapes à accomplir. Mon arrivée à Nancy a été un peu mouvementée. Le lendemain de ma signature, je suis parti en équipe nationale. Dès mon retour, j’ai dû chercher un appartement. Je suis resté pendant trois mois à l’hôtel ! Changer d’environnement à vingt ans, ce n’est pas simple. Quand j’étais à Monaco, des gens se chargeaient de tout cela pour moi. J’ai dû devenir indépendant.

Tu es régulièrement appelé en équipe de France chez les espoirs. Qu’est-ce que cela t’évoque ?


Chez les Bleuets, j’ai vécu tous les moments à 100 % ! J’étais entouré de grands joueurs, c’était fabuleux. J’ai pris énormément de plaisir sur le terrain, mais aussi en dehors. Je connaissais déjà plusieurs joueurs comme Moussa Sissoko par exemple. Il fallait essayer d’être compétitif car la concurrence était féroce. Certains étaient déjà titulaires dans des clubs de l’élite. Je voulais prouver que je n’étais pas là par hasard.

Tu disputes quatre saisons sous les couleurs de Nancy. Les deux premières avec Pablo Correa, et les deux dernières avec Jean Fernandez. En quoi étaient-ils différents ?


Au niveau de leur mentalité, de leur personnalité aussi. Je me suis davantage épanoui sous les ordres de Jean Fernandez, mais je pense que cela vient du travail que j’ai accompli avec Pablo Correa en amont. J’étais plus mature lors de l’arrivée de Fernandez. Avec lui, même si on ne se parlait pas très souvent, j’avais un rapport père-fils. Il a su me mettre en confiance.

Après ton aventure en Lorraine, tu retrouves Jean Fernandez du côté de Montpellier. Mais très vite, tu vas te blesser gravement au Vélodrome contre l’OM, le 29 novembre 2013. Comment t’es-tu relevé de cette importante blessure ?


Déjà, je suis arrivé blessé à Montpellier. Ma préparation a donc été retardée. J’ai pu revenir quelques semaines plus tard. Et je me suis fait cette blessure au niveau des ligaments croisés du genou droit. Il a fallu gérer cette nouvelle blessure. Je suis croyant, donc je pense que cela m’était prédestiné. J’ai dû l’accepter, ce qui n’a pas été simple. D’autant plus que ma convalescence a été plus longue que prévue…

En mars 2016, peu de temps avant ton départ de Montpellier, tu fêtes ta première sélection avec les Comores. En quoi était-ce important pour toi d’aider ton pays d’origine ?


C’est normal dans le sens où je souhaitais prouver mon attachement à mon pays. Beaucoup pensent que j’ai fait un choix par défaut à ce moment-là, notamment aux Comores. Or, ce n’est pas le cas. Même si cela a été tardif, c’est le cheminement de ma vie, sportive comme personnelle, qui m’a permis de représenter les Comores.

Quelle est ta vision sur le football africain ?


Il est en constante évolution ! Certains des meilleurs joueurs du monde sont Africains. Dans les années à venir, le football africain devrait prendre une place encore plus importante. Certains pays commencent enfin à mieux se structurer et à développer leurs équipes de jeunes. Ce qui n’a jamais été le cas auparavant, sauf pour les grandes nations du continent. Aujourd’hui, battre une équipe très peu renommée devient de plus en plus difficile.

Dans quelle mesure les footballeurs africains sont-ils moins bien considérés que leurs homologues européens ou sud-américains ?


Le fait de jouer pour une sélection nationale africaine réduit la visibilité de certains joueurs. Je pense que la CAN n’est pas aussi valorisée que l’Euro ou la Copa América. Parfois, certains choix sont assez surprenants. Ne pas voir Édouard Mendy dans la liste des trente nominés pour le Ballon d’Or, c’est étonnant. Ces dernières années, Sadio Mané ou Mohamed Salah auraient pu mériter mieux. Il faut davantage mettre en valeur les joueurs qui performent à la CAN, qui reste une compétition relevée.

Que penses-tu du fait que la CAN se dispute en pleine saison ?


L’employeur numéro un du joueur, c’est le club. À partir du moment où tu dois faire un choix entre ton club et ton pays, il y a un problème. La plupart des joueurs privilégient leur pays, car c’est plus fort que tout. Mais rien n’est certain lorsque tu retournes dans ton club au mois de février. Tu peux perdre ta place en club en quelques semaines. Je pense qu’il faudrait revoir ce modèle...LIRE la suite dans Onze Mondial

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