Message de l'ancien secrétaire général de la COI, Hamada Madi Boléro APPEL AU SURSAUT NATIONAL PAR LE DIALOGUE Chers compatriotes, Il y ...
APPEL AU SURSAUT NATIONAL PAR LE DIALOGUE
Chers compatriotes,
Il y a quarante-six ans tout juste, notre pays accédait à l’indépendance. Que de chemin parcouru depuis lors, mais aussi que d’espérances trahies et d’occasions manquées ! Notre histoire nationale, jeune si nous la considérons à l’aune du formalisme des Nations unies, mais aussi millénaire si nous regardons le temps long du peuplement de notre archipel, mérite mieux que des discours et des pratiques qui nous enferment dans un tiers-mondisme économique, social, politique et surtout culturel d’où rien de bon ne peut sortir.
En écrivant cela, je ne pointe aucune responsabilité en particulier. Au contraire, c’est notre façon collective d’affronter les défis qu’il convient de changer. Cette transformation que j’appelle de mes vœux n’a de chance de s’opérer que si nous ouvrons réellement le dialogue national.
Comme aux heures difficiles où l’unité nationale était au point de se rompre, qui fut sauvée par l’Accord Cadre pour la Réconciliation aux Comores du 17 février 2001, il est temps une fois encore de nous retrouver tous ensemble autour de la table de famille. Le gouvernement a une grande tâche à accomplir, celle de faire tourner le pays et de le représenter dans le concert des nations, mais la crise nationale est si forte et si profonde aujourd’hui, qu’il ne peut, à lui seul, dégager les solutions à une crise qui devient, au fil des jours, une crise existentielle plus que politique.
C’est pour cela que le dialogue national doit se renouer avec l’ensemble des forces vives de la nation comorienne, le gouvernement bien sûr mais aussi les représentants de l’opposition, nos autorités religieuses et spirituelles, la société civile, les milieux économiques, toutes celles et ceux qui, au plan national comme dans chacune de nos îles, font des Comores cet ensemble humain auquel nous sommes tant attachés comme l’est l’enfant à sa mère.
Avec l’expérience tirée de mes fonctions comme chef de l’État par intérim et Chef du Gouvernement d’Union Nationale de Transition, principal négociateur de l’accord de Fomboni et Secrétaire général de la Commission de l’océan Indien, je lance cet appel solennel au sursaut national par le dialogue. J’ai bien conscience que le dialogue n’est pas chose aisée.
Il y a dans la société comorienne des murs d’amertume et de rancœur. Mais ceux-ci doivent tomber pour permettre enfin l’expression d’une volonté commune, d’un consensus sur ce que nous sommes et sur ce que nous voulons être demain. C’est pour cela aussi que je demande à ce que les exilés politiques soient autorisés à rentrer pour participer à la construction de la solution nationale.
A tous ceux qui appellent de bonne foi à l’intervention de la communauté internationale, je dis aussi que celle-ci n’est pas la solution car il n’y a que les comoriens eux-mêmes qui peuvent aujourd’hui se saisir de leur avenir.
La communauté internationale pourra appuyer les efforts internes que nous aurons menés, elle rassurera et aidera sans aucun doute à la mise en œuvre de mesures consensuelles basées sur l’équité et le bon sens. Elle entérinera nos décisions communes dès lors qu’elles seront conformes au respect de l’unité nationale, à la sauvegarde de l’intégrité territoriale et au respect des principes démocratiques qui fondent l’Etat de droit que nous voulons encore renforcer. C’est un rôle important, mais qui ne saurait reléguer en aucune façon l’effort national qui doit être mené d’abord par les comoriens eux-mêmes.
Enfin, accepter de dialoguer n’est pas, loin s’en faut, un signe de faiblesse. C’est pourquoi, je dis respectueusement au gouvernement et au chef de l’Etat que la prise en compte de l’intérêt supérieur du pays dans le cadre d’un dialogue national ne peut que renforcer celles et ceux qui s’y essaient de bonne foi.
A tous les comoriens de bonne volonté, parmi lesquels, je n’en doute pas, le président de l’Union auquel me lient tant de souvenirs, j’adresse donc, en ce jour de commémoration de notre indépendance nationale, cet appel solennel au dialogue pour retrouver ensemble le chemin de la concorde, condition indispensable de l’émergence pour l’Union des Comores et son peuple.
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