Photo d'archives À Mayotte, les gendarmes pris pour cibles Les gendarmes font face à des jets de pierres dès la tombée de la nu...
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À Mayotte, les gendarmes pris pour cibles
Les gendarmes font face à des jets de pierres dès la tombée de la nuit à Mayotte. Leur responsable s'inquiète
Caillassages de gendarmes : +338%. Blessés avec des projectiles : +750%. Véhicules dégradés : +786%. À Mayotte, île frappée par un chômage massif et une misère endémique, les statistiques de la gendarmerie pour 2019 donnent le tournis. Mayotte est secouée par la violence : des bandes de jeunes y affrontent presque chaque jour les forces de l'ordre, à tel point que le préfet, Jean-François Colombet, vient d'appeler à la "mobilisation générale" et à un sursaut des parents : "Un enfant de 10 ans n'a rien à faire avec un parpaing dans les mains."
En fin d'année, les incidents se sont concentrés à Koungou, la deuxième ville de l'île. Un vieux moteur de machine à laver et deux branches de bananier couchées sur la Nationale 1 et c'est l'unique axe routier du territoire qui est bloqué dès la nuit tombée. Des véhicules blindés ont même dû être employés pour forcer les barrages et manœuvrer à l'abri des jets de projectiles. Le général Philippe Leclercq, qui dirige les 500 gendarmes de Mayotte, confie que son adjoint a été défiguré lors d'une embuscade. Récemment, un gendarme mobile de 23 ans a subi plusieurs fractures au visage. "Un des enjeux pour nous est aussi de canaliser notre réaction, ajoute le haut gradé. Ce sont des gamins qui sont en face de nous."
Des jeunes souvent déscolarisés ou au chômage
Il ne s'agit pas de petits dealers de drogue faisant régner leur loi sur tout un quartier, comme en France métropolitaine, mais de jeunes souvent déscolarisés ou au chômage, en tout cas désœuvrés et frustrés, qui recherchent, selon lui, "l'affrontement avec une des dernières formes d'autorité encore présentes". Les pompiers et les bus scolaires, désormais escortés par des patrouilles, sont également visés par ces caillassages mais dans une moindre mesure.
"On se sent un peu seuls, dit-il. Il faudrait d'autres acteurs que les gendarmes pour endiguer ce phénomène et le prévenir." Le général dénonce le peu d'empressement des communes et des autorités religieuses à s'associer à l'effort, la maigreur du tissu associatif, une réponse pénale pas forcément à la hauteur, même si deux peines de prison ont été prononcées à la suite de la dizaine d'interpellations réalisées le mois dernier, et un manque criant d'infrastructures judiciaires. Inauguré en juillet, l'unique centre éducatif renforcé de Mayotte peut accueillir seulement une dizaine d'adolescents.
Par Stéphane Joahny ©Journal du dimanche
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