Le sélectionneur de l’équipe nationale de Madagascar Nicolas Dupuis lors du retour d’Egypte après la CAN 2019, à Antananarivo, le 13 juill...
Le sélectionneur de l’équipe nationale de Madagascar Nicolas Dupuis lors du retour d’Egypte après la CAN 2019, à Antananarivo, le 13 juillet. RIJASOLO / AFP |
Après avoir mené les Barea jusqu’en quarts de finale lors de la CAN, le sélectionneur vient de signer un contrat de quatre ans avec la fédération malgache.
Le football malgache a trouvé son homme. Sur la Grande Ile où ce sport est quasiment une religion, le nom de Nicolas Dupuis est sur toutes les lèvres. Le coach, qui vient de signer un contrat pour quatre ans avec la Fédération malgache de football, va s’occuper non seulement de l’équipe nationale, mais aussi développer ce sport dans tout le pays. Un espoir immense sur ces terres parmi les plus pauvres du monde, déjà enthousiasmées par la dynamique qui s’enclenche. « Mada » vient en effet d’être nominé dans trois catégories pour les CAF Awards 2019 – notamment celle de meilleur entraîneur de l’année pour Nicolas Dupuis – et son équipe nationale va participer pour la première fois aux qualifications de la Coupe du monde 2022.
Ce vent d’espoir, c’est bien le sélectionneur qui l’a fait se lever depuis qu’en mars 2017 il a débarqué sur l’île. Si le coach aime à rappeler que la réussite de l’équipe nationale des Barea est une prouesse collective, les Malgaches ne s’y trompent guère. Les banderoles « Merci Dupuis » émaillent désormais les gradins au moins autant que les fameux « Alefa Barea » au rythme desquels le pays entier a vibré l’été dernier durant la Coupe d’Afrique des nations (CAN).
Dans sa carrière, le 9 septembre 2018 est à marquer d’une pierre blanche. Ce soir-là, à Antananarivo, c’est la fin du match Sénégal-Madagascar. Devant des gradins surchauffés, sur le terrain du stade Mahamasina, Aliou Cissé gesticule. Le sélectionneur de l’équipe du Sénégal n’en peut plus. Son équipe vient de concéder une égalisation (2-2) aux éliminatoires de la CAN face aux Barea, la toute petite équipe nationale de Madagascar… Qui l’aurait cru ?
« Une main de fer dans un gant de velours »
De l’autre côté du terrain, le sélectionneur Nicolas Dupuis reste, lui, impassible. Visage fermé et bras croisés. Que pense-t-il vraiment à cet instant ? « Est bon coach celui qui sait surfer sur les énergies positives. Il faut en toutes circonstances savoir montrer à ses joueurs que l’on est serein », explique t-il un an plus tard, devant un expresso. A ce moment du match, pourtant, Nicolas Dupuis sait qu’il assiste au début de l’envolée des Barea. La récompense d’un travail acharné de deux ans et demi que cette égalisation vient couronner, car c’est elle qui a donné à son équipe un élan suffisant pour se catapulter jusqu’en huitièmes de finale. Immense prouesse pour une première participation à la CAN.
« Je me qualifie moi-même de main de fer dans un gant de velours », admet-il. Ce que confirment ses joueurs, son capitaine en tête. « Son point fort, c’est la tactique, analyse Anicet Abel. Et ce que j’aime avec lui, c’est que je me sens libre sur le terrain, libre de jouer avec ma technique. Mais il faut que ce soit carré. » L’épopée à la CAN a été faite de hauts et de bas, mais l’homme est parvenu à maintenir la cohésion du groupe. « C’est quelqu’un qui a énormément de sang-froid et de maîtrise, abonde encore Anicet Abel, fraîchement nommé capitaine de l’équipe des zébus, après la retraite de Faneva Andriatsima. Crier trop tôt victoire ne lui ressemble pas. »
Lorsqu’il raconte le match contre le Niger le 19 novembre, dans le cadre des éliminatoires de la CAN 2021, où Madagascar a mené 4 à 1 dès la première période, le capitaine se souvient de ces mots du coach. « Le résultat final peut changer, mais ce n’est pas ça qui compte, nous a-t-il dit. Dans les vestiaires, à la mi-temps, il nous a poussés à redoubler d’efforts. Pas question de se relâcher ! » Mais qu’on ne s’y trompe pas, sous cette glace de surface, l’homme est animé du feu sacré et cette incandescence peut arriver en surface comme ce jour-là… « La dernière mi-temps au Niger, j’ai vraiment été obligé de monter dans les tours pour remettre les gars à flot », confirme le coach.
« Un vivier exceptionnel »
N° 1 du football sur l’île, l’homme cumule le poste d’entraîneur avec celui de directeur technique national et donne aussi des conférences sur le coaching. Difficile donc de coupler de telles responsabilités avec son poste d’entraîneur du Fleury FC, qu’il vient logiquement de quitter. « J’ai promis au président de la République [Andry Rajoelina] d’être présent sur l’île. On partage beaucoup, lui et moi. On a le même amour du ballon. Et il y a beaucoup de potentiel à développer ici : des championnats pour jeunes, pour les filles… Madagascar est un vivier exceptionnel », enchaîne celui qui vient d’élire domicile à Antananarivo avec son épouse. Désormais, « je fais trois semaines à Madagascar et une semaine en France car j’ai des obligations comme consultant à Canal+ », précise-t-il.
En retour, sa popularité est déjà très haute car, comme le souligne Dax, un joueur des Barea, « les gens l’adorent parce qu’il est le premier à avoir redoré le blason de l’équipe nationale et qu’il est attaché visiblement à Madagascar. » Rien ne prédestinait pourtant ce natif de l’Allier, doctorant en sciences et techniques des activités physiques et sportives (Staps) et professeur dans une autre vie, à tomber amoureux de ce pays. « Je viens d’une famille modeste, loin du milieu sportif », raconte Nicolas Dupuis. Pourtant, celui qui a été judoka en plus d’être footballeur reconnaît que le sport a toujours été « un pilier » de sa vie jusqu’à en devenir progressivement « le centre ».
Laure Verneau (Antananarivo, correspondance) ©Journal LeMonde.fr
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