Des pneus en feu en guise de barricade. Khartoum, le 4 juin 2019. © REUTERS/Stringer Khartoum a été suspendu jeudi de l’Union africaine...
Des pneus en feu en guise de barricade. Khartoum, le 4 juin 2019. © REUTERS/Stringer |
Khartoum a été suspendu jeudi de l’Union africaine. L’organisation a annoncé que cette suspension serait valable jusqu’à "l'établissement effectif d'une autorité civile de transition".
L’Union africaine (UA) a suspendu le Soudan jeudi 6 juin, avec effet immédiat. L’organisation réclame "l'établissement effectif d'une autorité civile de transition". "Ceci étant le seul moyen de permettre au Soudan de sortir de la crise actuelle", a annoncé le Conseil de paix et de sécurité de l'UA (PSC).
"Le Conseil imposera automatiquement des mesures punitives sur les individus et les entités qui ont empêché l'établissement d'une autorité civile", a précisé en conférence de presse le Sierra-Léonais Patrick Kapuwa, président en exercice du PSC.
Depuis le début de la crise au Soudan, l'UA plaide pour un transfert rapide du pouvoir des militaires aux civils et avait plusieurs fois menacé de suspendre ce pays de l'organisation.
Le 15 avril, après le renversement quatre jours plus tôt du président soudanais Omar el-Béchir par les militaires sous la pression d'un mouvement de contestation déclenché le 19 décembre, l'UA avait donné 15 jours pour que le pouvoir soit transféré aux civils.
Mais cette solution semble s’être définitivement éloignée après que le sit-in de civils organisé devant le quartier général de l'armée a été très violemment dispersé lundi.
Au moins 108 morts et 500 blessés
Selon un comité de médecins proches de la contestation, au moins 108 personnes ont été tuées et plus de 500 blessées depuis lundi.
Cette opération, un "massacre" perpétré par des "milices" du Conseil militaire selon ce groupe de professionnels, a été vivement dénoncé par l'ONU, les États-Unis et la Grande-Bretagne, entre autres.
Parmi les morts, 40 ont été retrouvés dans les eaux du Nil, a assuré le comité, s'appuyant sur des témoignages de médecins sur place. Il n'a toutefois pas donné d'autres détails.
Yousra Elbagir, une journaliste soudanaise, a pu entrer en contact avec un officier des services de renseignements soudanais (NISS) ayant fait défection. Interrogé sur la possibilité que la dispersion du sit-in ait fait une quarantaine de morts, l’officier répond qu’"il ne s’agit même pas du quart des personnes mortes".
L’ONU a indiqué mercredi avoir fait sortir du Soudan des employés non-essentiels "bien que toutes les opérations de l'Organisation se poursuivent au Soudan", a indiqué une porte-parole.
Les autorités, elles, tentent de minimiser l’ampleur de la répression. Dans un premier bilan officiel, le ministère de la Santé a affirmé jeudi, via l'agence officielle Suna, que le bilan des victimes de la répression depuis lundi n'avait "pas dépassé 46".
Les "milices" du Conseil militaire pointées du doigt
Pour les manifestants, l'identité des auteurs de la répression ne fait pas l'ombre d'un doute : les "milices" du Conseil militaire, en particulier les Forces de soutien rapide (RSF), des paramilitaires rattachés aux services de sécurité.
Si un calme relatif est revenu à Khartoum, dans les rues, des habitants affichent un air tétanisé au passage de ces hommes, souvent jeunes, juchés en grand nombre sur des pick-up, en uniforme beige impeccable et lourdement armés.
Issues des anciennes milices arabes Janjawid du Darfour, théâtre d'une longue guerre civile, les RSF ont été déployées en masse dans le pays, en particulier dans les rues de Khartoum, devenu au fil des mois l'épicentre de la contestation.
Le chef des RSF, vice-président du Conseil militaire et ancien responsable des Janjawid, le redouté Mohamad Hamdan Daglo, surnommé "Hemeidti", a assuré qu'il se tenait aux côtés des "révolutionnaires". Mais il a aussi juré de ne pas "permettre le chaos", en référence notamment aux barricades.
Dans un communiqué, le Conseil militaire a pris la défense des RSF contre "la campagne organisée sur les réseaux sociaux destinée à répandre des mensonges et fabriquer des accusations".
Facebook et Twitter ont été et restent des outils essentiels dans la contestation. Ces derniers jours, les internautes ont partagé de nombreuses vidéos montrant des hommes en uniforme des RSF passant à tabac des civils non armés. L'internet mobile a toutefois été coupé depuis lundi.
Les RSF "ont refusé d'exécuter les ordres de l'ancien régime d'expulser les manifestants du sit-in par la force", a lui assuré le Conseil militaire dans un communiqué, louant leur "grande sagesse".
Avec AFP et Reuters
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