Dans le face à face de plus en plus tendu qui oppose depuis 48 heures, les forces comoriennes aux insurgés de la Médina de Mutsamudu, la ...
Dans le face à face de plus en plus tendu qui oppose depuis 48 heures, les forces comoriennes aux insurgés de la Médina de Mutsamudu, la victoire militaire semble exclue, sinon au prix d’un lourd bilan humain. Mais d’où viendra le dénouement? Alors que le conflit entre ce mercredi dans sa troisième journée, les politiques ont abandonné le terrain aux armes.
Les nerfs craquent. D’abord du côté des belligérants de cette guérilla urbaine épuisante et de plus en plus risquée. De celui ensuite, des habitants de Mutsamudu qui se préparent à vivre la deuxième nuit de tension dans une ville fantôme. Aucun magasin ouvert. Pas d’administration, pas de banque pour retirer de l’argent. Pas de pain, pas de marché d’eau. Les riverains de la Médina assiégée, épuisent peu à peu leur stock de provisions et commencent à abandonner leur lieu de vie de peur de devenir les boucliers humains d’une bataille qui s’aggrave au fur et à mesure que se déploient les renforts venus consolider les troupes de l’armée présentes sur le terrain. Jusqu’à quand cette population tiendra-t-elle?
En attendant, les habitants sont les témoins incrédules d’un conflit armé qui a fait ce mardi, un mort et deux blessés collatéraux parmi les civils non impliqués dans le conflit. Autre escalade, pour la première fois, une opération militaire a été conduite hors du périmètre concerné par les affrontements, dans le quartier Lazari, où l’on a dénombré le deuxième civil blessé. Quant à la ville, elle semble coupée en trois zones. La Médina, le siège des insurgés, encerclée par les militaires. De part et d’autre de ce périmètre du conflit, les résidents des quartiers font des apparitions furtives dans les rues désertes pour observer les mouvements des troupes, s’exposant aux balles perdues comme ce jeune garçon touché au bras en essayant d’échapper à un tir nourri.
Alors que les accrochages entre les militaires et les insurgés se sont accentués cette deuxième journée, une victoire militaire semble pourtant s’éloigner en dépit de l’arrivée de renforts de l’armée et de l’usage d’armes lourdes comme cet obus lancé depuis la Médina et qui a fini sa course près du quartier de Goungwamwe, à une centaine de mètres de la Maire de Mutsamudu. Malgré la dangereuse escalade que prend la situation, l’option militaire est la seule présente sur le terrain anjouanais déserté par la classe politique. Hormis la déclaration du ministre de l’Intérieur sur les ondes de la Télévision nationale et un communiqué de l’Union de l’opposition attribuant au régime Azali, la responsabilité de dégradation de la situation, l’Etat est absent de l’île.
Les institutions insulaires et le gouvernement de l’Union se sont évanouis. Aucune initiative secrète ou officielle n’est évoquée pour ramener l’accalmie. Du côté de l’armée, la seule stratégie affichée est celle d’une confrontation frontale pour déloger des insurgés qui pour l’instant, semblent maîtriser leur terrain. Une stratégie risquée voire suicidaire pour quiconque connaît la configuration de la Médina mutsamudienne, jusque-là imprenable. Dans ce véritable labyrinthe de rues et d’habitations entremêlées, tout accrochage direct expose dangereusement les habitants et se solderait par de nombreuses victimes dans les deux camps.
N’est-il pas temps que les politiques sortent de leur trou pour gouverner la cité et assurer la sécurité des citoyens, missions pour lesquels ils sont élus? En 1997, une telle démission avait abandonné l’île aux mains d’aventuriers. Curieusement, le scénario se répète. A peu de choses près, les mêmes acteurs étatiques rééditent les mêmes erreurs stratégiques de recours à la force comme unique option, en lieu et place d’une solution politique.
Par Eddine Mlivoindro ©Masiwa komor
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