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Président de la Haute autorité de la transition de 2009 à 2014, arrivé au pouvoir hors des urnes à la suite d'une insurrection, Andry Rajoelina dit, depuis, avoir changé. A 44 ans, bien décidé cette fois à se hisser au sommet de l’Etat par les urnes, il revient avec derrière lui une véritable machine de guerre politique. Aujourd’hui, le président du parti Mapar estime qu’il a six chances sur 10 d’être élu directement au premier tour. Entretien réalisé par Sarah Tétaud.
RFI : Pourquoi avez-vous décidé de vous porter candidat ?
Andry Rajoelina : Tout d’abord, avant de me lancer à la course à la présidentielle à Madagascar, je me suis préparé. J’ai fait une tournée dans tout Madagascar. Du nord au sud, de l’est à l’ouest. Et j’ai constaté l’extrême misère de la population malgache. Je suis conscient du retard accumulé par Madagascar depuis plus de cinquante ans. Il est grand temps, donc, de proposer et de mettre en œuvre des solutions concrètes et pérennes pour donner un nouveau départ à Madagascar.
Quels sont vos atouts, d’après vous ?
J’ai appris de mes erreurs. Pendant la durée de la transition, je me suis entouré des experts nationaux et internationaux pour pouvoir apporter le développement à Madagascar. Deuxièmement, je suis jeune. Et 70 % de la population a moins de 25 ans. Ce sont des atouts que je peux dire « conséquents » pour affronter les élections à Madagascar.
La présidence que vous avez exercée entre 2009 et 2014 n’a jamais été vraiment reconnue à l’international. On se souvient de cet affront, lorsque par deux fois, vous vous êtes vu refuser l’accès à la tribune de l’ONU en 2009. Aujourd’hui, y a-t-il de votre côté une volonté de revanche, d’accéder au pouvoir en bonne et due forme par les urnes et surtout de façon démocratique ?
Sous la pression de la communauté internationale, j’ai accepté en 2013 le « ni-ni », c’est-à-dire que ni moi-même ni l’ancien président Ravalomanana ne pouvait se présenter aux élections présidentielles. J’ai mis l’intérêt supérieur de la nation à toute autre considération. Je prône pour l’alternance démocratique. Et cette fois-ci, je pense que c’est au peuple malgache de choisir son dirigeant.
Est-ce une revanche, du coup ?
Je ne dirais pas une revanche, mais pour moi c’est un devoir d’apporter des projets concrets pour le développement de Madagascar.
Quel bilan dressez-vous de vos cinq années passées à la tête du pays ?
Ce que je peux dire, c’est que pendant la période de la transition, la communauté internationale m’a imposé pour gouverner quatre mouvances politiques. Nous n’avons pas les mêmes visions, les mêmes objectifs. Et donc, cela m’a handicapé pour apporter le développement que j’ai tant souhaité à Madagascar. Cette fois-ci, je pense que si je suis élu, et je pense que ce sera le cas, je pourrai être libre de mes actions.
Vous dites que vous avez donc été handicapé. Est-ce une forme de reconnaissance que vous n’avez pas eu le bilan positif que vous vouliez ?
Exactement. Parce que la feuille de route m’a contraint et surtout ne m’autorisait pas à faire de grands chantiers à Madagascar.
Est-ce que ce n’est pas une façon, aussi, de dire que si cela n’a pas marché, ce n’était pas vraiment ma faute ?
Je ne suis pas là pour dire à qui était la faute. [next] C’était la réalité. Il fallait affronter tous les problèmes. Et cela nous a permis, justement, de pouvoir démontrer que sans l’aide budgétaire de la communauté internationale, on a pu avancer, construire des infrastructures, également gérer le pays comme il se doit.
Quelles sont les mesures-phares sur lesquelles vous allez faire votre campagne ?
Je vais proposer des solutions concrètes dans les grands domaines économiques afin de rattraper le retard de développement à Madagascar. Concernant l’énergie, depuis l’indépendance à Madagascar en 1960, nous n’avons pu installer que 400 mégawatts de puissance de production d’électricité pour 25 millions d’habitants. Ce qui est très peu par rapport aux autres pays africains. Ce que j’ai proposé, c’est qu’en cinq ans, je vais doubler la puissance de la production de l’énergie à Madagascar.
Pareil pour l’agriculture. Il est inconcevable que Madagascar, aujourd’hui, importe jusqu’à 300 000 tonnes de riz. Or, on était le grenier de l’océan Indien et de l’Afrique dans les années 1970. Moi, ce que je propose, c’est que, en cinq ans, l’objectif est de mettre en place 100 000 hectares de terre rizicole, afin qu’on puisse produire 500 000 tonnes de riz. C’est-à-dire qu’en cinq ans, Madagascar doit exporter, mais ne plus importer du riz.
Comment comptez-vous vous y prendre, justement, pour ces très grandes réalisations que vous proposez ?
Nous avons besoin de l’aide des bailleurs de fonds traditionnels pour faire les routes, les autoroutes, etc. Pour tout ce qui est partenariat public-privé, nous allons travailler surtout avec des entreprises internationales, reconnues mondialement dans le domaine de l’énergie, par exemple, et dans le domaine de l’industrialisation de Madagascar.
Un chercheur de l’IFRI, spécialiste de Madagascar, Mathieu Pellerin, a expliqué l’an dernier que Madagascar était tombé durant la transition dans une phase de criminalisation de l’Etat. Sans base électorale réelle derrière vous lors de votre arrivée à la tête de l’Etat en 2009, vous vous êtes retrouvé prisonnier des puissants acteurs qui vous avaient fait roi. Vous dites alors qu’aujourd’hui, vous avez changé. Vous dites que vous avez mûri. Comment la population peut-elle être convaincue que vos fréquentations et vos soutiens ont, eux aussi, changé ?
La vie m’a beaucoup appris. Je me suis bien entouré. J’ai changé. Et je vais changer. Et je vais tout mettre en œuvre pour lutter contre la corruption. Je sais que je vais gagner ces élections. J’ai la foi. J’ai la ferme conviction que je dois gagner et je vais tout faire pour convaincre la population de voter pour moi.
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