QUAND L’OPPOSITION DÉCIDE DE NE PAS DÉCIDER Lundi prochain, les Comoriens sont appelés aux urnes pour un référendum constitutionnel. ...
QUAND L’OPPOSITION DÉCIDE DE NE PAS DÉCIDER
Lundi prochain, les Comoriens sont appelés aux urnes pour un référendum constitutionnel. D'emblée, je vous annonce que je voterai "OUI".
Je ne justifie pas mon choix. Or il l’aurait fallu. Mais à quoi cela servirait quand ceux que je devrais convaincre se sont murés dans une opposition systématique, refusant tout dialogue parce qu’ils considèrent que ceux qui ne pensent comme eux doivent être voués aux gémonies. Pas plus tard que ce matin, un mec que je ne connais pas lance : "celui qui ira voter est un 'anduyi' de ce pays". Je lui rétorque que je n'en suis pas un mais j'irai le faire.
En principe, le rôle d’un opposant est de s’opposer. Et quand il se bat pour la démocratie, il le manifeste dans les urnes. Quand un opposant proclame qu’il se dressera contre l’organisation d’une élection, quelle qu’elle soit, et de par tous les moyens, on a du mal à le suivre et à le comprendre car ce ‘‘de par tous les moyens’’ me fait peur. Mais je suis rassuré en même temps car je me sens bien et en sécurité dans mon pays, les Comores, pour lequel j'ai toujours refusé toute idée d'émigration.
Si le "OUI" l’emporte...
Pour les rares opposants qui ont encore la tête sur les épaules et qui acceptent de dialoguer, une question les embarrasse, celle de l’élection présidentielle de 2019. Si le "OUI" l’emporte, le président actuel donnera sa démission et de nouvelles élections présidentielles et des gouverneurs auront lieu. Azali Assoumani qui a déjà dit sa volonté d’être candidat risque de se retrouver seul en lice, ses opposants ne pouvant être candidats pour ne pas ‘’légitimer’’ le référendum du 30 juillet. Et c’est là où je relève l’incongruité de la démarche de l’opposition. Aura-t-elle un ou des candidat(s) à ces élections ou pas ? Je ne saurais répondre à la place des opposants mais je trouve cette position intenable pour une opposition qui a décidé de ne pas décider.
Appeler les citoyens à ne pas se rendre aux urnes est [next] une décision très peu majeure et relève donc de l’enfantillage. Elle est surtout irréfléchie, et les Comoriens, ne comprenant pas du tout le bien-fondé de cette attitude, se rendront aux urnes. Il faut souligner, par ailleurs, que le taux de participation au référendum n’a pas de quota. Les participants feront valider le référendum. Et là, comme dirait l’autre, « yenfule hohwa (le cabri est grillé) » pour dire que les carottes sont cuites.
Abdou Djibaba : la guerre est couchée
Une petite anecdote. Mon ex-collègue et ex-confrère Abdou Djibaba, du temps où nous travaillions à Radio Comores (actuel ORTC) disait : « la guerre est couchée (yenkodo yilala) » pour signifier que la rédaction du JP (journal parlé) est terminée. Et là, personne ne peut ajouter quoi que ce soit car c’est l’heure du passage à l’antenne. Dans la presse écrite, nous disions – le dit-on encore aujourd’hui ? – l’édition est bouclée. Personne ne peut, dès lors, ajouter ou retrancher une ligne ou un mot. Et le journal part à l’imprimerie pour l’édition à paraître le lendemain.
Les anciens journalistes très nombreux dans les rangs ou dans les coulisses de l’opposition le savent bien et sauront prodiguer les bons conseils pour que l’opposition ne reste pas sur le quai, tel un voyageur qui a raté son train, pour attendre l’édition du surlendemain.
Quand l’opposition décide de ne pas décider, l’alternance patientera de longues décennies. D’ici là, nous aurons l’occasion de revenir sur l’affaire du programme de citoyenneté économique, sujet qui fait mal à tous, ce sujet qui fait trembler même les quidams et qui suscite chez certains les expressions les plus abjectes à l'endroit de tous ceux qui prononcent les mots "citoyenneté économique". Mais cette galaxie nauséabonde ne saurait être mise de côté pour la seule crainte d’irriter quelques esprits ignorant le fondement du pillage dont sont victimes l’Etat et le peuple comoriens.
Par Mohamed Hassani
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