Depuis que le Président Azali s’est rallié à l’idée des assises, des suspicions nourris pourrissent le débat. Je voudrais traiter de la que...
Depuis que le Président Azali s’est rallié à l’idée des assises, des suspicions nourris pourrissent le débat. Je voudrais traiter de la question de la tournante qui focalise l’intérêt pour clarifier autant que cela me sera possible la situation.
La question de la Tournante ne peut pas ne pas être examinée durant les assises. Il en résultera une ou plusieurs orientations. Certains pourront considérer les aspects positifs de la tournante (la paix et la relative stabilité) et soutenir qu’il ne faut pas y toucher. D’autres pourront mettre en avant les aspects négatifs (un Président roi sans contre-pouvoir qui fait de l’Etat, le pouvoir d’une île, « nde yatru ») et demander qu’on y mette fin. D’autres encore, et je crois que c’est la majorité considéreront qu’il faut consolider les acquis et corriger les erreurs. Maintenir la tournante et trouver les voies de renforcer l’unité et la cohésion sociale. L’orientation des assises pourra conduire le pouvoir, s’il le souhaite à faire une proposition de modification de la Constitution. S’ouvrira alors et alors seulement le débat sur la modification de la Constitution.
Même si les assises auront joué le rôle d’aiguillon, ce qui n’est pas peu, les changements éventuels devront suivre la voie légale. Les assises n’ont aucune légitimité à modifier les lois et les pratiques en cours dans le pays. Par contre elles ont le droit voire même le devoir d’exprimer des opinions sur la situation du pays, tirer le bilan des 42 ans d’indépendance et proposer des voies d’édification de nouvelles bases d’une gouvernance tournée vers les intérêts du pays et du peuple. Chaque citoyen, chaque mouvement social ou politique a le droit et le devoir de réfléchir sur son pays et de proposer les voies de son choix. C’est d’y arriver qui est difficile et c’est la force et le succès du M11.
On reproche aussi au M11 d’être acheté par le pouvoir. Voilà deux ans et quelques que nous travaillons à la tenue de ces assises. Ikililou n’a même pas daigné nous recevoir pour en discuter. Azali a mis un an avant d’accepter l’idée et de s’engager. Cela a mis les assises sur les devants de la scène, alors que quelques jours avant, certains se demandaient si le M11existait encore. Le fameux décret qui fait couler tant d’encre souligne l’indépendance des assises et leur neutralité face au pouvoir et aux partis politiques. C’est cela l’essentiel.
Nous sommes actuellement en phase préliminaire. La structure qui engagera la préparation des assises n’est pas encore en place. Elle seule pourra parler au nom des assises. Malheureusement les médias sont envahis par des membres du gouvernement et pas des moindres. Ils font des déclarations parfois incendiaires sur les assises et la population les prend pour argent comptant. Ce n’est qu’une propagande de personnes étrangères à la structure qui gère cette phase préliminaire, une propagande qui traduit leurs visions particulières, pas celle des assises. On avait même vu circuler un texte prétendument note d’orientation qui aurait fuité et qui faisait croire que les assises allaient se tenir en octobre avec plusieurs centaines de représentants de l’Etat. Il ne faut pas se laisser tromper par ce bruit destiné à brouiller les cartes. Personne n’a le droit d’engager en quoi que ce soit les assises. Seul le Comité de Pilotage des Assises Nationales (CPAN) pourra le faire. En attendant les gens expriment leurs opinions. Le problème c’est que les médias d’Etat sont ouverts uniquement ou principalement aux dirigeants. Le M11 y a rarement accès malgré ses demandes. Même si cela pèse, cela ne change pas la donne.
Autre complication, les réseaux sociaux sont largement inondés par les opposants aux assises. Et comme c’est l’habitude, les insultes grossières fusent. Le M11 n’a pas les moyens d’y répondre ni même de tout lire.
Reste la question de la représentativité des membres du CPAN. Il suffit de poser la question de la représentation de toutes les forces vives du pays pour mesurer la complexité de la tâche. Au niveau des Etats on utilise les élections. Beaucoup savent que ce n’est qu’un pis-aller faute d’un autre dispositif. Toutes les tendances n’ont pas d’élus ! Nous avons fait un choix l’Etat, les partis politiques, le M11, la société civile et Maore. Cela n’est pas complètement satisfaisant, il y a des frustrations légitimes mais il faut reconnaître que l’équation n’a pas de solution parfaite.
A une période où le pays se trouve dans une situation économique et sociale catastrophique, sans partis politiques qui proposent des programmes de relèvement du pays, les assises apparaissent comme une chance ultime de dessiner des perspectives derrière lesquelles le peuple peut s’unir pour imposer des changements salutaires.
Idriss (09/10/2017)