Le droit de l’OHADA s’affirme aux Comores
La deuxième chambre de la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage (CCJA) de l’OHADA (Organisation pour l’Harmonisation en Afrique de Droit des Affaires) a rendu le 29 décembre 2016, un arrêt cassant un arrêt de la Cour d’ Appel de Moroni. C’est la première fois qu’un arrêt de la CCJA casse un arrêt rendu par une juridiction nationale. Une décision qui obligera dorénavant aux magistrats de notre pays de tenir compte de la législation OHADA dans la rédaction de leurs jugements et arrêts. 23 ans après sa création, le droit de l’OHADA a du mal à s’appliquer dans notre pays. Certes, la justice comorienne a commencé à se référer timidement aux actes uniformes de l’OHADA qui sont d’application directes dans les états membres, mais plusieurs secteurs publics et privés continuent d’ignorer cette législation qui s’applique directement dans notre pays. Ainsi, les sociétés commerciales, y compris les sociétés d’État, ne tiennent pas compte des Actes Uniformes de l’OHADA dans leur fonctionnement.
Les lois qui se réfèrent aux actes uniformes de l’OHADA ne sont pas toujours respectées. Ainsi la loi portant sur les sociétés à capitaux publics de janvier 2006 qui se réfère aux actes uniformes de l’OHADA notamment l’acte uniforme de l’OHADA du 24 Mars 2000 portant organisation et harmonisation des comptabilités des entreprises n’est toujours pas appliquée. Les décrets d’application de cette loi contiennent, malheureusement plusieurs dispositions contraires à l’Acte Uniforme portant sur les sociétés commerciales.
En effet, en ce qui concerne, les sociétés d’Etat, conformément à son article 1er, l’Acte Uniforme sur le Droit des Sociétés Commerciales s’applique à toute société commerciale dans laquelle un Etat ou une personne morale de droit public est associé. La lecture de cet article invite désormais à avoir une compréhension stricte des entreprises publiques. La présence de l’Etat ou d’une personne morale de droit public dans l’une des formes de sociétés commerciales définies par la loi, n’affecte en rien la nature commerciale de la Société qui, pour cela, est régie par l’Acte Uniforme. Peu importe que l’Etat soit associé unique ou associé avec d’autres.
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C’est dire que les sociétés d’Etat ou nationales, les sociétés à capital public, les sociétés d’Economie mixte, quel que soit le niveau de participation de l’Etat, sont régies par l’Acte Uniforme. Des lois de l’assemblée de l’Union comportent parfois des dispositions contraires aux actes uniformes de l’OHADA. Ainsi, la loi du 28 juin 2012 adoptée par l’Assemblée de l’Union qui a mis fin aux activités de la Pharmacie Nationale et Autonome des Comores comportait des dispositions qui sont contraires à l’acte uniforme de l’OHADA portant organisation des procédures collectives d’apurement du passif du 10 avril 1998.
Des textes nationaux spécifiques ne sauraient être ni contraires aux acte Uniforme ni entraver l’application de ces derniers. Malheureusement, dans notre pays, les textes spécifiques pris par les autorités, sont parfois contraires aux actes Uniforme de l’OHADA. Et pourtant, ces actes uniformes qui sont d’applications directes doivent être respectés par les pouvoirs exécutifs, législatifs et judiciaires ainsi que les opérateurs économiques.
Le Traité de Port-Louis (Ile Maurice) instituant l’OHADA, a été signé le 17 octobre 1993 par les Chefs de l’Etat et de Gouvernement des Etats membres de la zone Franc dont le Président de la République des Comores de l’époque, le regretté Saïd Mohamed Djohar. Ce traité est entré en vigueur le 18 septembre 1996.
L’Assemblée Fédérale des Comores a ratifié ce traité par la loi N° 94-028/AF du 3 décembre 1994. Ce traité révisé le 17 octobre 2008 à Québec (Canada) crée une organisation internationale de plein exercice, dotée d’une personnalité juridique internationale qui a pour un objectif d’intégration juridique entre les pays qui en sont membres. Le système juridique et judiciaire de l’Organisation pour l’harmonisation en Afrique du droit des Affaires (OHADA) est considéré par certains comme l’une des expériences d’intégration juridique les plus réussies de la fin du 20ème siècle. L’institution se veut un outil d’intégration par excellence et est ouverte à tous les états membres de l’Union africaine et à tout Etat non membre de l’organisation panafricaine. Elle œuvre à faciliter les échanges et des investissements et à garantir la sécurité juridique et judiciaire des activités des entreprises.
A ce jour neuf (9) Actes Uniformes ont été adoptés portant notamment sur le Droit commercial Général, le droit des sociétés commerciales et du Groupement d’intérêts Economique, l’arbitrage, les suretés…. Ces Actes Uniformes modifient notre législation commerciale et plus généralement le cadre juridique des affaires de notre pays. A cet effet, en juin 2001, une ordonnance a été signée par le Chef de l’Etat, le Colonel Azali Assoumani pour harmoniser notre législation aux Actes Uniformes de l’OHADA. Une harmonisation qui tarde à prendre forme. Par ComoresDroit