L’honorable hâbleur Mna madi est attendu au village pour raconter comment il a réussi, encore une fois, à duper les habitants en leur racon...
L’honorable hâbleur Mna madi est attendu au village pour raconter comment il a réussi, encore une fois, à duper les habitants en leur racontant des histoires à faire dormir debout. Connaissant ses talents de magnétiseur, les gens se sont préparés à lui dire en face ce qui lui est reproché. Il n’est pas du genre à fuir ses responsabilités, il faut bien qu’il réponde aux demandes d’explications. En homme averti, il réunit ses fidèles compagnons pour qu’ensemble, ils organisent le message à calmer les esprits. Mna madi est un brave et humble personnage qui se dispose au dialogue et à la courtoisie. Mais, une seule phobie le met à mal. Il n’aime pas du tout qu’on le critique. Il s’énerve vite à la moindre allusion à ses faiblesses ou à ses erreurs. Il est capable de reconnaître des incohérences par lui-même et il ne faut jamais que quelqu’un d’autre le lui dise.
Le plus âgé de ses conseillers lui intime d’être aimable avec les gens en disant la vérité sur les échecs de ses louables projets. Mais Mna Madi avoue être déçu de ce que ses conseillers disaient aux gens pour le décupler. Personne n’est en mesure de dire exactement ce qu’il pense. Il apprend à ses amis qu’il vient de trouver la solution à ce problème.
On lui avait dit qu’il existait un petit oiseau qui savait se montrer beau par son plumage coloré et qui donnait de la splendeur en volant d’un arbre à l’autre. Il a la faculté de transmettre des sons et des paroles. Il a aussi la compétence extraordinaire de dire exactement ce qu’on lui dicte. Il faudrait l’acheter depuis un pays lointain, ce qui donne encore de l’enthousiasme. Par ses connaissances, Mna Madi fit venir le petit oiseau répondant au nom de Perroquet et lui donna le joli sobriquet de Mna Djakwe. Il le place dans une cage dorée et veille personnellement à son alimentation bien choisie. Il le met à l’essai en le faisant répéter des expressions de bon sens, de politesse et d’émerveillement.
Avec fierté, Mna Madi annonce la nouveauté à ses conseillers, une sorte de soulagement pour pouvoir transmettre la parole du mentor avec élégance, loyauté et un brin de fascination.
Quelle joie pour les courtisans lorsque Mna Madi fait répéter à Mna Djakwe les bonnes formules assorties de l’éloquence la plus habile. Tous les débroussaillages choisis ont été mémorisés par le petit oiseau, heureux de se trouver si gâté et si honoré.
Le moment est donc venu pour parler au public impatient d’avoir des explications sur les biens communautaires détournés par Mna Madi. Celui-ci ne va pas se présenter au rassemblement du fait qu’il est convaincu que Mna Djakwe va dire ce qu’il faut. Une dernière séance de radotages est faite, tout le monde est rassuré de la force de conservation de l’oiseau. Dans un excès de rire hilarant, Mna Madi se lâche.
- Ah ! Mna Djakwe va le dire avec politesse mais, si c’était moi, j’aurais dit : Vous êtes lamentables, en bas étage et vous ne méritez que les crachats.
En très bonne humeur, les conseillers de Mna madi se sont présentés à la place publique. Les langues se diluent comme il se doit. On parle de l’impéritie des habitants face aux ruses de Mna Madi. Les uns parlent de trahison, les autres de farce. Les justifications des conseillers ne suffisent pas. On sort la dernière carte. On apprend aux habitants que ce bel oiseau va dire ce que Mna Madi avait à transmettre. On s’impatiente. On dirait que le petit perroquet aime se faire désirer. Il étire les ailes, passe sa petite pate autour du bec, fait de petites grimaces.
La colère du public commence à monter. Encore une fois, Mna madi se moque des gens. Que va dire le bel oiseau ?
Le petit perroquet aux ailes d’albatros fait des efforts pour se maintenir en équilibre. Oui, il s’est doté d'ailes plus grandes que son tout petit corps, il ne peut plus voler. Il ouvre enfin son bec. Mais, son gros cerveau lui joue un sale tour. Il ne se rappelle que des derniers mots lâchés par Mna Madi dans son délire.
« Vous êtes lamentables ! en bas étage ! crachat !
Médusé, le public entonne :
Ye mfa Mna Madi tsiyariwuwa
Hariwuwa sontsi bo wandrwamdji
A ses dépens, Mna Madi a appris que « Ndrume mbi, kewono djuzo »
Par Dini NASSUR