La direction nationale de l’information laisse le choix à Labaraka FM, à partir de 00h00 (30 juillet), de diffuser tout genre de musique. C...
La direction nationale de l’information laisse le choix à Labaraka FM, à partir de 00h00 (30 juillet), de diffuser tout genre de musique. Cela va des chants religieux (kaswida) à « Voulez-vous coucher avec moi ce soir ?». La latitude démocratique permise à Labaraka FM est strictement limitée à la musique. La station n’a pas le droit de parler de sport, d’accident de la route, des résultats du bac, des mariages, de la météo, ni du prix du poisson. A bien comprendre la note signée de M. le Directeur de l’information, un journaliste chevronné, bien respecté par ses pairs, Labaraka FM peut diffuser le son de flûte qui annonce les décès, mais pas dire le nom du défunt.
J’ai bien dit une note. Une note du directeur, note tout court sans adjectif, ni complément, ni référence légale ou réglementaire (les fameux visas) qui condamne les journalistes de Labaraka FM à une cure musicale pour cause d’atteinte à l’honneur du pays et des autorités.
J’ai appelé M. le Directeur pour m’informer. Il m’a dit que les propos tenus par M. Abdallah Agwa sont très choquants. Ce n’est pas rien de la part, je le répète, d’un journaliste expérimenté et respecté. Les citoyens n’ont jamais entendu d’accusation de complaisance ni de compromission contre lui. Sauf que dans ce pays le jugement des atteintes aux honneurs et aux images appartient à la justice. Est-ce que la loi prévoit qu’une instance collégiale comme le Centre National de la Presse et de l’Audiovisuel, peut sanctionner un média, pour atteinte à l’honneur d’autrui ? Je n’ai pas eu le temps de vérifier. La note ne mentionne aucune instance judiciaire, professionnelle ou autre impliquée dans la sanction.
La condamnation de Labaraka FM et ses lecteurs à s’enivrer ou à s’étouffer de musique est, donc, au moins un abus de pouvoir. Même si c’était une décision de justice, je m’interrogerais sur une décision qui ferme la gueule à tout un média, parce qu’un journaliste, fut-il le directeur, a « déshonoré » une autorité, alors qu’il n’y a ni condamnation, ni avertissement antérieur.
Labaraka connait des queues des plus hauts responsables politiques de ce pays, du pouvoir comme de l’opposition, devant ses micros. HaYba connaît à peine les visages des ministres, et doit s’y prendre à plusieurs fois pour avoir des réponses des cadres dans les ministères, les entreprises et les associations du pays. Labaraka est une grande radio politique. HaYba est une petite radio à ambition sociale.
Mais une injustice faite à Labaraka est une injustice contre Hayba et les autres médias. Un paysage médiatique divers et contrasté est un bon lit pour la démocratie et l’information.
Le gouvernement ne doit pas perdre son sang-froid. Il doit rechercher l’avis et les conseils du Centre National de la Presse et de l’Audiovisuel. Il y a la justice. Le gouvernement n’aurait pas tort de penser que nous avons besoin de formation dans les médias. Qu’il débloque alors les moyens.
Messieurs et Mesdames les autorités, évitez que les professionnels et amateurs de musique ne commencent à protester contre une décision qui assimile leur passion à une inutile douceur. Et si la musique dit du mal d’une autorité, c’est toujours de la zizique ? – Le ridicule ne tue peut être pas l’homme mais très certainement les hautes autorités imbues de leur honneur et sans discernement.
En attendant le CNPA, les dire des hommes de droit et la justice, que Labaraka FM revienne à la danse, à la parole et à l’information.
Said Mchangama
Directeur- fondateur de HaYba FM 91,7