Soi et autre L’on entend souvent par « culture », ce qui est propre à une communauté, à un pays – ce qui est soi, pour ainsi dire. Le...
Soi et autre
L’on entend souvent par « culture », ce qui est propre à une communauté, à un pays – ce qui est soi, pour ainsi dire. Le « patriotisme » ne serait alors que la conséquence logique de cette acception, étant « amour de ce qui est soi ». La frontière entre patriotisme et nationalisme semble, de ce point de vue, très mince. Comment, en effet, s’aimer et en même temps s’ouvrir aux autres ? C’est tout l’intérêt de la journée culturelle organisée par l’Association des jeunes Comoriens pour le développement socioculturel – LAMHA, à l’occasion de l’inauguration de sa Cellule-Tana. Il en ressort que le patriotisme, loin d’être un enferment sur soi, est avant tout « amour de l’autre ».
On est assez éloigné de l’usage classique du terme. En effet, depuis sa création en juin 2009 à Moroni, LAMHA n’a cessé de s’agrandir, ouvrant notamment des Cellules à Anjouan, en France et, tout récemment, aux États-Unis – élargissant ainsi ses actions au-delà des frontières de l’Union. Cette politique de l’ouverture à l’autre – la seule d’ailleurs qu’admet l’Association – prend tout son sens à Antananarivo où les objectifs à court terme sont, entres autres, les aides aux maternités et pédiatries ainsi qu’aux orphelinats. Ce dimanche 24 juillet, LAMHA est donc resté fidèle à sa politique, en portant sur la culture et le patriotisme un regard pluriel. L’amour de soi commence par l’amour de l’autre. Aimer, c’est s’aimer : aimer Madagascar, c’est aimer les Comores.
Ici et ailleurs
Madagascar, ici, est un ailleurs que l’on aime : « ry tanindrazanay malalako ô », ô notre patrie bien-aimée ; les Comores, ici, un ailleurs que l’on s’approprie : « wudzima wa massiwa », unité des îles. Ici et ailleurs, on danse, en lambahoany et en sahare. Ici est un ailleurs lointain, et proche, ferveur de la Chine communiant avec la nature – voie et vertu taoïstes : voie de l’ouverture et vertu du partage. Ici est un ailleurs que l’on met en scène, un patriotisme que l’on loue : Philibert Tsiranana et Ahmed Abdallah, pères de l’Indépendance ; une quête, surtout, quête d’une identité volée : Où sont passées les îles Éparses ? Où est passée Mayotte ? Ici et ailleurs sont une histoire que l’on raconte, douloureux héritage que l’on transmet de bouche à oreille – 1947, Rano Rano, plume de Jean-Luc Raharimanana, éloge de l’héroïsme des sagaies et du pouvoir de l’eau – 1975, coups d’État, indépendance noyée dans le sang. LAMHA, ici et ailleurs ; à Madagascar et aux Comores.
Dayar Salim Darkaoui, Étudiant en Philosophie à l’Université de Tananarive
(Aperçu de la Journée Culturelle de la Cellule LAMHA-Tana)