Les événements qui ont lieu en ce moment à Mayotte nous interrogent en même temps qu’ils nous font mal. L’on se retient de …parler pour ne ...
Les événements qui ont lieu en ce moment à Mayotte nous interrogent en même temps qu’ils nous font mal. L’on se retient de …parler pour ne pas vociférer, d’écrire pour ne pas livrer la missive pamphlétaire de plus que personne ne lit tant elle ne fait que reproduire des mots entendus mille fois.
L’on se retient parce qu’il s’agit d’un drame et d’hommes dont la dignité est mise à mal . Et qu’en la matière il convient de ne pas se mettre en scène , d’avoir le mot juste, de ne pas mettre de l’huile sur le feu et d’être constructif afin d’impacter sur le réel. Parce que dans ces forums nous sommes lus par les nôtres et des amis étrangers. Il convient brièvement de rappeler ce qu’est Mayotte.
Mayotte est la quatrième île de l’archipel des Comores. Lors de l’indépendance de Komor, en 1975, cette île décide de rester française. S’ensuit, depuis 40 ans sur ce sujet, un imbroglio sans fin opposant l’Etat comorien indépendant et l’ancienne puissance colonisatrice : la France. L’Etat Comorien oppose le Droit international public qui voudrait que l’on décolonise dans les frontières utilisées pendant la colonisation et donc qu’on accorde l’indépendance aux 4 îles parce qu’on les a administré ensemble. Dans son plaidoyer l’Etat Comorien ajoute en plus de l’argument purement juridique l’unicité culturelle (langue, cuisine, religion, vêtements, bâti etc…).
La majorité des mahorais quant à eux ont dit à plusieurs reprises leur volonté de rester dans le giron français à chaque fois que leur avis a été demandé formellement . (Il existe une longue littérature opposant deux points de vue concernant les conditions dans lesquelles ont été organisées ces consultations). C’est ainsi que de consultation en consultation elle a acquis récemment la qualié de département français d’outre mer et celle de Région ultra périphérique européenne.
Depuis 1975 cette question est là comme un point d’interrogation formant la cinquième île de cet archipel.
Depuis, de l’eau a coulé sous les ponts, bon nombre de Wa Ngazidja , Wa Dzuani, Wa Mwali ( habitants des trois autres îles , Ngazidja, Ndzuani, Mwali) se sont établis à Mayotte (Maoré en langue locale), s’y sont mariés avec ou pas des mahorais et y ont fait des enfants. Ce, avant et après le visa Balladur instauré en 1975.
Depuis, certains des habitants des trois autres îles n’ayant pas obtenu de visa depuis l instauration de celui-ci par Balladur sont allés, via des embarcations de fortune, s’installer à Mayotte en y entrant donc par voie « illégale » selon le Droit Français. Ils y ont construit une vie et fait des enfants. Ce sont ces habitants là nommés « clandestins » à Mayotte qui font l’objet aujourd’hui de délogement par la population en dehors de toute procédure judiciaire ou administrative.
Au-delà de l’imbroglio politique, juridique et social. Il s’agit d’hommes, de femmes et d’enfants qui voient leur dignité mise à rude épreuve. Des textes internationaux existent pour empêcher pareille mise à mal de la dignité humaine quelque soient les circonstances.
Cette question des éruptions de haine entre habitants de Mayotte ne peut plus être tue. Cependant, doit-on substituer insultes et invectives réciproques au silence qui entoure d’ordinaire ces événements recurrents?
Je pense que non. Pour une fois nous, habitants de cet archipel, devrions saisir cette crise pour pousser nos politiques à se pencher sur cet imbroglio et nous proposer des solutions respectueuses de la dignité humaine dans un premier temps, puis des solutions politiques réalistes et pérennes dans un second temps.
Messieurs Hollande et Ikililou ne peuvent se taire devant pareille situation. M. Azali , président nouvellement élu en Union des Comores, non plus.
Lors du dernier sommet des chefs de l’Etat de la Commission de l’Océan Indien à Moroni, cette question mahoraise et singulièrement la question de « l’immigration clandestine » a soigneusement été évitée par tous les membres de cette organisation. Seul, le Président Ikililou l’a rappelée dans son allocution, sans trop insister lors des échanges qui ont suivi.
Messieurs Hollande (Président français) et Ikililou (Président de l’Union des Comores en exercice). Monsieur Azali (président récemment élu en Union des Comores), Monsieur Ban Ki Moon (Secrétaire Général de l’Organisation des Nations Unies), Monsieur l’ambassadeur des Comores aux Nations Unies, votre silence face à la justice expéditive que des hommes exercent sur d’autres hommes sur un territoire comme Mayotte (français pour les uns, comorien pour d’autres) ne peut durer ! Il ne peut durer car lorsque de pareils événements interviennent dans d’autres endroits du globe , vous vous fendez en général d’un communiqué pour les condamner, vous proposez des solutions pour juguler le phénomène, vous convoquez l’émotion au moyen de déclarations faites la main sur le cœur.
A problème similaire, nous voulons une réactions similaire et sérieuse. Nous souhaitons des discussions sérieuses afin de trouver des solutions globales et pérennes qui conviennent à toutes les parties en présence (l’Union des Comores, la France et les Mahorais ).
Nous vous supplions les uns et les autres d’arrêter les postures faites sur le dos de la réalité devenue infiniment plus complexe qu’il y a 40 ans
Source : olurenfekre.wordpress.com
Par ComoresDroit