Un rappel des faits. Tous les candidats du pouvoir ont été qualifiés le 21 février dernier. A Ngazidja, le crime fut parfait : Aby ( préte...
Un rappel des faits. Tous les candidats du pouvoir ont été qualifiés le 21 février dernier. A Ngazidja, le crime fut parfait : Aby (prétendant au gouvernorat) et Mamadou (aspirant à la présidence) ont devancé tous les autres candidats. Deux raisons expliquent ces performances : l’utilisation de l’appareil d’Etat pour faire campagne et la fraude massive. Un exemple entre milles : le ministre de l’intérieur, vice-président de Mamadou, a retrouvé son poste de ministre des élections dès la fermeture de la campagne du premier tour. Situation pour le moins étrange !
Plusieurs jours de contestation ont suivi la proclamation des résultats du premier tour : la CEII de Ngazidja (qui a publié des résultats à 104°/°), la CENI, la Cour Constitutionnelle et l’Union européenne ont fait la sourde oreille. Comment des fonctionnaires européens, grands donneurs de leçons devant l’Eternel, n’ont-ils pas condamné de tels agissements ? Anguille sous roche !
Mais le président de la République, choqué par l’ampleur de la mascarade et visiblement décidé à léguer à son successeur un pays en paix, a patronné un protocole d’accord destiné à sécuriser le scrutin du 10 avril. Conséquence : tous les candidats du pouvoir ont été cette fois-ci tous battus à plate couture.
Après la défaite de Mamadou, l’Union européenne a introduit l’idée d’un troisième tour pour sauver le soldat Mamadou. Deux semaines plus tard, la Cour constitutionnelle lui a donné raison. Pour préserver la paix dans le pays, Azali, déclaré vainqueur par la CENI, a accepté cette décision motivée juridique absurde.
Conscients qu’ils ne pourront en aucun cas gagner des élections dans des 13 bureaux situés dans des localités acquises à la coalition CRC-Juwa, Msaidié et la direction de campagne de Mamadou demandent l’abandon de ce « méchant » protocole. Autrement dit, ils réclament tout simplement l’autorisation de frauder ! Disons les choses clairement : ces personnes sont vraiment sans ni gêne, ni scrupule ni honte… Mais, bien entendu, presque tout le monde leur a opposé une fin de non-recevoir : Azali, Ikililou Dhoinine, l’ONU et l’Union africaine (qui ont dépêché d’ailleurs des observateurs pour superviser ces élections).
Les déclarations de l’ONU et de l’Union africaine sont sans équivoque et ne souffrent d’aucune ambigüité : le protocole d’accord signé le 15 mars dernier sera appliqué à la lettre, car on ne peut changer les règles du jeu cinq minutes avant la fin du match.
A la surprise générale, l’Union européenne, pourtant grand bailleur de fonds de ces élections, s’enferme dans un mutisme suspect. Soutient-elle le « droit de frauder » revendiqué par son poulain?
Nul n’ignore la situation explosive qui prévaut actuellement aux Comores. C’est pourquoi tous les diplomates accrédités à Moroni devraient adopter une position claire permettant de préserver la paix et la stabilité de ce pays.
Nous disons clairement à nos partenaires ceci : ceux qui sont à Moroni pour aider ce pays à organiser des élections libres et transparentes sont les bienvenus et les Comoriens leur sont reconnaissants. En revanche, ceux qui veulent jouer aux « pompiers-pyromanes », en voulant leur imposer un homme qu’ils n’ont pas choisi, doivent comprendre qu’on ne les laissera pas faire… Qu’ils plient rapidement bagage car les Comores sont pauvres mais veulent rester dignes et debout : leur seule richesse étant la paix qu’ils ne veulent pour rien au monde brader. Et puis, ils en ont vraiment assez d’être infantilisés et méprisés. La jeune démocratie comorienne a besoin de paix et certainement pas d’ingérence malveillante et déstabilisatrice.
Nassurdine Ali Mhoumadi, docteur ès Lettres et enseignant