La Cour constitutionnelle a ordonné des élections partielles à Anjouan. Cet arrêt de la seconde chance fait suite aux résultats de la CENI ...
La Cour constitutionnelle a ordonné des élections partielles à Anjouan. Cet arrêt de la seconde chance fait suite aux résultats de la CENI qui ont déclaré le candidat Azali Assoumani vainqueur des élections présidentielles. Cette victoire contestée par le camp adverse qui argue, pour justifier leurs contestations, les circonstances dans lesquelles les résultats ont été proclamés et le saccage de bureaux à Anjouan, est quand même une victoire.
Azali a emporté une bataille qui n’est pas la moindre : la bataille de la communication. Mais une victoire ne fait que des heureux. Celle d’Azali en est le parfait exemple. Mais retournons un peu en arrière. Pour avoir refusé des primaires à l’intérieur de la Convention de Renouveau des Comores (C R C) en vue des présidentielles de 2016, Azali est à l’origine de la scission de son parti. Des poids lourds du parti en l’occurrence Houmed Msaidié et Aboudou Soefo lui ont tourné le dos, et ont créé leur propre formation politique, le RADHI.
A la fin de tout régime, surtout en Afrique, le paysage politique se recompose. Certains politiques font feu de tout bois afin de prendre le navire-pouvoir s’ils sont convaincus qu’il arrivera de nouveau à bon port. Ça ce qui s’est passé en 2014, lors des élections législatives, avec l’alliance locale surréaliste qui a vu le jour à Ngoengwe entre Aboudou Soefo, un ténor de l’opposition d’alors et Abdoulkarim Mohamed, novice en politique et candidat de la mouvance présidentielle. Je rappelle au passage que j’ai publié un article, dans La Gazette, sur cette alliance le premier décembre 2014 dont voici le titre : Ngowengwe : UPDC /RADHI, les vraies raisons d’une alliance.Il faut le dire. Soefo est l’artisan du rapprochement RADHI/UPDC.
Viennent les présidentielles et les élections de gouverneurs. Pour la première fois dans l’histoire de la Tournante, le candidat placé en dernière position est déclaré vainqueur par la CENI et pourrait présider aux destinées de la nation. Mais certains anciens alliés du colonel ne veulent plus entendre parler d’une victoire d’Azali. Ils pensaient qu’il n’y avait pas d’Azali sans eux. Ils croient que ce sont eux qui ont fait l’ancien président. Certains s’interrogent même : « Qui aurait pu faire gagner Azali alors que nous lui avons tourné le dos ? »
Mais ils se sont rendus à l’évidence : Azali a pu s’en passer d’eux. On comprend du coup l’acharnement de ces anciens collaborateurs aujourd’hui soutenant le pouvoir. Si c’était Muigni Baraka, candidat du désespoir, qui l’avait emporté, il y aurait moins de rage. Mais il y a d’autres raisons qui expliquent la volonté d’Aboudou Soefo d’en finir avec les velléités du colonel : la double défaite qu’Azali a infligée à Mamadou dans le fief de son ancien ministre des relations extérieures. Elle constitue pour Soefo une humiliation personnelle.
Car Tsinimoichongo était considéré comme une localité irrémédiablement conquise. Mais derrière ce revers se trouve un message adressé aux leaders du pays : des grandes localités, prises pour des seigneuries de certains hommes politiques, s’émancipent. Des jeunes, désireux de servir le pays, veulent aussi fouler le pas sur la scène politique nationale. Il n’est un secret pour personne : Msaidié fait la pluie et le beau temps dans la région de Mboude. Et cela fait des années. Après cette probable défaite, qui s’annonce, de Mamadou, serait-il en mesure de garder cette mainmise sur cette région qui renferme de hauts cadres et une nouvelle génération ambitieuse ? C’est moins sûr, vu les mutations politiques qui s’opèrent en grande vitesse dans toutes les régions.
Inutile de souligner que l’écrasante victoire du gouverneur Hassani Hamadi contre Aby Moussa a ravivé l’animosité contre Azali et a installé les alliés de Mamadou dans une situation de fragilité, je dirais même, de mort politique. Ils sont conscients que seule une victoire de leur mentor les mettrait en scelle.
L’autre raison en effet qui explique la détermination de certains anciens proches d’Azali à barrer la route à leur ancien chef, son alliance avec Sambi. Ce dernier a osé traduire ces hauts responsables en justice. Fait rare sous nos cieux. Tout le monde sait la célèbre phrase « l’ami de mon ennemi c’est mon ennemi » En outre, les leaders du parti RADHI ne se font pas d’illusions. Si Azali l’emporte définitivement il sera intraitable. Il gouvernera avec ceux qui l’auront porté au pouvoir. Toute manœuvre, de ses anciens alliés, qui viserait à entrer au pouvoir sera infructueuse. Enfin, le goût du pouvoir refuse l’attente. Les anciens alliés du colonel ne peuvent plus encore attendre 2031, année où la Tournante reviendrait à Ngazidja. D’ici là, des eaux couleront sous les ponts.
Abdoulfatah Ali, enseignant et romancier
©habarizacomores.com
Abdoulfatah Ali, enseignant et romancier
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