A quelques heures du premier tour des élections des présidents et des gouverneurs, il est nécessaire de se dire quelques vérités : le pays ...
A quelques heures du premier tour des élections des présidents et des gouverneurs, il est nécessaire de se dire quelques vérités : le pays va mal, très mal. Et l’électeur comorien est sollicité pour donner sa confiance : il doit se responsabiliser en faisant le bon choix pour éviter de passer son temps à se plaindre et à faire porter la responsabilité sur les politiques car c’est toujours lui qui les choisit. Mais quels sont bons les candidats ?
Ce sont ceux qui proposeront à ce pauvre pays un projet réaliste, sérieux et ambitieux capable de le sortir de la misère. Ceux qui peuvent dire à la population comorienne comment ils reconstruiront les routes très abîmées et régleront la question énergétique (deux problèmes qui pénalisent toute l’économie comorienne et empoisonnent la vie de tous les Comoriens). Car toute réflexion sur le développement des Comores devrait commencer par là.
Ce sont ceux qui pourront ensuite expliquer aux comoriens comment ils garantiront la paix et la stabilité politique du pays nécessaire au développement économique, financeront les infrastructures (routes, ports et aéroports) dont l’économie comorienne a besoin, formeront une main d’œuvre qualifiée et attractive, introduiront dans les mentalités comoriennes l’éthique du travail, bâtiront un environnement juridique pro-entreprise (afin d’attirer les investisseurs étrangers), aideront à faire émerger une classe entrepreneuriale comorienne. Car il faut le dire, haut et fort, une bonne fois pour toutes, à la population comorienne : l’Etat comorien peut (doit !) mettre en place un environnement favorable aux entreprises mais il ne pourra jamais résorber tout le chômage du pays. Autrement dit, l’Etat peut permettre à ceux qui le souhaitent (et pas seulement à ses amis !) de s’enrichir et en contrepartie d’embaucher et de payer des impôts.
Qui donc parmi les prétendants à Beit Salam pourrait endosser un projet si ambitieux ?
Les électeurs comoriens auront le choix entre confier le pays à un novice ou à un quelqu’un d’expérimenté. Les deux choix sont très risqués. Les nouveaux, s’ils sont souvent bien intentionnés et parés de vertu, ils ne sont pas toujours les plus efficaces : le temps pour eux de réunir les équipes adéquates, de s’adapter à la fonction et d’esquisser les premières solutions, et le mandat est fini. Elback, Abdoulwahab et Sambi n’ont pas été particulièrement efficaces et tous étaient pourtant nouveaux à leurs fonctions ! La nouveauté, si elle est tentante, n’est absolument pas une garantie d’efficacité ! Et puis, dit-on, on ne fait jamais de la politique avec seulement de bons sentiments. Le deuxième choix serait de confier le pays à une personne expérimentée. Mais celle-ci aura nécessairement à son compte un actif et un passif. On pourra toujours lui rappeler tel ou tel acte commis quand elle était aux responsabilités.
Mais la politique, c’est l’art de choisir entre deux maux (Raymond Aron) : les Comoriens devraient choisir non pas le meilleur mais le moins mauvais de ces hommes en évitant absolument de vendre leur conscience et leur liberté, faute de quoi ils le paieront très cher au moins cinq ans durant.
Nassurdine Ali Mhoumadi, docteur ès Lettres, essayiste, est professeur de Lettres dans la région lyonnaise.