Depuis plusieurs jours, l'actualité se focalise sur la 9ème édition des Jeux des Îles de l’Océan Indien. Cette édition 2015 fut l'o...
Depuis plusieurs jours, l'actualité se focalise sur la 9ème édition des Jeux des Îles de l’Océan Indien. Cette édition 2015 fut l'objet de plusieurs controverses, altercations, critiques, convoitises, humiliations, mépris et incidents regrettés par des politiques et des mouvements associatifs de toute la région.
Le gouvernent comorien, Mme la Maire de la Possession à la Réunion, le Parti Communiste Réunionnais, le Secrétaire Général de la COI, les Départements des Affaires Étrangères de Maurice et Madagascar et le Quai d'Orsay ont fait des déclarations de recadrage liées à ces jeux. Aux Comores presque tout le monde a soutenu le gouvernement qui a protesté contre le non-respect de la Charte des Jeux.
De quoi s’agit-il en fait ? Il est indiqué dans cette charte, sur proposition des Comores, que Mayotte peut défiler dans les jeux mais sans les symboles de la France. Et que s’est-il passé ? La France, soutenue par certains pays de la région, a mis tout son poids dans la balance pour enfreindre les règles du jeu. Balle perdue ! La diplomatie comorienne et les mouvements sportifs des Comores n'ont pas fléchi : les sportifs comoriens se sont retirés des jeux, le gouvernement comorien s’est fendu d’un communiqué dénonçant l’attitude des sportifs mahorais et l’ambassadeur de France a été convoqué par le chef de la diplomatie comorienne. Et ce fut un succès (un coup ?) diplomatique qui permet aujourd'hui aux Comores de s'enorgueillir et de sortir la tête haute. Voilà la France sur la défensive car, l'humiliant se sent humilié par un petit pays insignifiant qui s’appelle les Comores. Eh oui : une mouche peut atteindre un taureau.
Aujourd'hui, un journaliste mauricien essayé de faire comprendre à l'opinion mauricienne que l'initiative du Gouvernement comorien ne présentait aucune dimension juridique et qu’elle n’était en fait qu’un calcul politicien voué à des fins électorales. Le même auteur a émis aussi des doutes quant à la capacité des Comores à pouvoir organiser les jeux des Îles en 2019. Des paroles honteuses émanant d'un cousin de la région !
Pire encore. Aux Comores, Ali Moindjié, doyen des journalistes comoriens, qui revit la nostalgie de la guerre froide, au lieu de féliciter le gouvernement pour cette audace diplomatique, cherche un faux bouc-émissaire (Assoumani Azali, ancien président des Comores, qui n’est plu aux affaires depuis 2006, serait le responsable de cette situation). Le journaliste avance en fait qu’il aurait fallu refuser la participation mahoraise aux jeux de la région arguant que ce fut la position de l’ancien président Ahmed Abdallah (1978-1989) !
Ce cher et charmant monsieur avait juste oublié que la mort d’Abdallah était intervenue presque au même moment que celle du système bipolaire… Ah oui : certainement que les Carter, Bush, Clinton et les autres présidents américains ne savaient pas qu'en marge des funérailles de Mandela, Barack Obama serrerait la main de Raoul Castro, un geste qui finit par renouer les relations diplomatiques entre la Havane et Washington après près de cinq décennies d’embargo et de brouille diplomatique. De 1947 à 1990, la bataille était longue et rude dans la région du Moyen-Orient, mais Arafat et les Palestiniens ont fini par opter pour un rapprochement avec leurs voisins.
C'est justement dans cette perspective que les autorités comoriennes avaient institué, aux débuts des années 2000, la Coupe de la concorde qui regroupait les quatre îles de l'Archipel des Comores.
Assoumani Azali ne pouvait pas savoir que la France œuvrerait en 2015 au viol de la Charte des Jeux ! Non : il n’imaginait pas qu’une puissance économique et militaire de cette taille userait de toute sa force pour humilier les Comores !
Et puis, cher Ali Moindjié, il est si facile de faire une lecture rétrospective de l’Histoire en se posant en vieux sage ayant tout compris de la vie…
Alors non et mille fois non : un contentieux juridico-diplomatique entre deux Etats souverains ne doit pas affecter les populations et faire des victimes de part et d'autre. Aujourd'hui, on veut priver les athlètes mahorais de s’épanouir ; demain ce sont les 30000 Comoriens qui jouissent de la nationalité française qu'on voudrait mettre à genoux, selon le raisonnement de ce charmant monsieur.
La Chine, puissance économique et militaire mondiale et membre permanent du Conseil de Sécurité n'a jamais réussi à empêcher Taiwan et Hong Kong d'avoir leurs propres instances olympiques et de participer aux jeux Olympiques de ce monde. Cela est vrai aussi pour Israël par rapport à la Palestine.
Et si l'on se félicitait temps en temps des rares réussites de ce gouvernement au lieu de nous ridiculiser en permanence nous-mêmes ? Mais pardon cher monsieur : il est vrai que le ridicule ne tue pas !
Nassurdine Ali Mhoumadi, docteur ès Lettres, enseignant et essayiste, est chroniqueur à Albilad.
Djamal Ali Msa est sociologue et directeur des éditions de la Lune
Photo ©habarizacomores