A Mayotte, « comme au temps des colonies »

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Dernier-né des départements français, Mayotte se trouve dans une situation paradoxale. Propulsée dans un processus accéléré d’intégration...


Dernier-né des départements français, Mayotte se trouve dans une situation paradoxale. Propulsée dans un processus accéléré d’intégration à la République, l’île reste soumise à des pratiques dérogatoires encore dignes du système colonial. Exemples aux frontières, à l’école, dans l’administration…


Mayotte, envoyée spéciale.- Située dans le canal du Mozambique et dans l’océan Indien, entre la côte swahilie d’Afrique orientale et Madagascar, Mayotte partage avec les autres îles de l’archipel des Comores culture, langue, religion et passé colonial. Mais, devenue le dernier département français par référendum en 2011, elle se retrouve confrontée à un destin singulier. Face à de lourds défis économiques et à de nouvelles normes culturelles et fiscales, elle ne bénéficie pas pour autant des droits sociaux accordés sur le reste du territoire français. Nichée dans le “plus beau lagon du monde”, cette petite île de 374 km2 pour 212 000 habitants est en état de survie, ravagée par la pauvreté, et socialement, médicalement et touristiquement désertée.

Tandis que l’ONU et l’Union africaine persistent à dénoncer la présence française à Mayotte, dont elles exigent le retour dans le giron comorien, la France assure se prévaloir du lien historique et démocratique qui la rattache à son ancienne colonie. Mais pour de nombreux experts, la stratégie française tend avant tout à protéger les intérêts géopolitiques et militaires qu’offre un positionnement avantageux dans le canal du Mozambique. Des intérêts détaillés notamment par Pierre Caminade dans Comores-Mayotte : une histoire néocoloniale (Éd. Agone, 2003) parmi lesquels, en particulier, l’accroissement de l’espace maritime français. La présence à Mayotte et sur les îlots alentour (les îles Éparses) garantit en effet d’imposantes zones économiques exclusives (ZEE). Ces dernières pouvant s’étendre jusqu’à 200 milles des côtes, elles assurent à la France la deuxième façade maritime mondiale.

« À Mayotte, il vaut mieux parler d’un combat pour l’égalité sociale avec la métropole qu’un combat pour la décolonisation. Si vous employez ce terme, vous vous faites flinguer. La crainte est encore tellement forte d’être éjecté de la République française et replacé sous l’autorité des Comores, qu’il est souvent considéré préférable de ne pas parler trop fort et de courber l’échine. Mais le sentiment de soumission à l’État français est très fort », explique Rivomalala Rakotondravelo, enseignant et secrétaire départemental du syndicat national unitaire des instituteurs professeurs des écoles (SNUipp). Une soumission qui ne se réalise pas sans souffrance dans l’unique département musulman de France, où traditions et droit coutumier doivent peu à peu laisser place au droit commun.
François Hollande en visite à Mayotte, le 3 mars 2012.François Hollande en visite à Mayotte, le 3 mars 2012. © Reuters
« Nous n’avons pas été capables, avant la départementalisation, de dire à l’État : attention, voilà notre modèle de société », rappelle Mohamed Moindjié, directeur du Conservatoire national des arts et métiers (CNAM) local et adjoint au maire de Mamoudzou, le chef-lieu de l’île. Depuis, scissions culturelles et creusement des inégalités rongent la société. En public, malgré tout, les Mahorais continuent de faire part de leur « fierté d’être français ». En privé, c’est une autre affaire. Les langues se délient et personne n’hésite à dénoncer un climat asphyxiant sous une chape de plomb aux relents colonialistes et ségrégationnistes.
Des relents sensibles, dès les premières heures passées sur l’île. Outre l’augmentation des violences, outre la tristesse des regards à peine masquée par les sourires d’une population épuisée, c’est d’abord la fracture sociale qui interpelle. La plupart des métropolitains et la classe moyenne mahoraise sont parqués dans des zones protégées, des quartiers d’expatriés renommés mzungus land (« le pays des Blancs ») par les plus jeunes. Ailleurs, des milliers de Comoriens et de Mahorais survivent, parfois sans eau et sans électricité dans des bangas, des petits baraquements en tôle chauffés par un soleil brûlant, entassés dans les plus grands bidonvilles de France. Sur des pans entiers de l’île, on ne croise pas un seul expatrié. Dès 19 heures, un couvre-feu officieux est instauré : à l’homme blanc, il est déconseillé de sortir seul. Et chaque jour, on s’étonne du respect montré par les enfants mahorais aux métropolitains, les « Monsieur, Madame » de l’île.
Hormis le conseil général, les « Monsieur, Madame » dirigent toujours la quasi-totalité des administrations sur le territoire. « Certaines pratiques administratives vécues par la population peuvent faire penser au système colonial », reconnaît le sénateur (PS) Thani Mohamed Soilihi, qui préfère cependant « dénoncer le traitement auquel est soumis notre territoire. Parler de colonialisme, ce serait s’avouer vaincu ». Mais quelques jours passés sur l’île suffisent à y constater la singularité de certaines pratiques administratives.

Enfants expulsés du territoire français

Chaque jour, des dizaines de Comoriens fuient leur pays, classé 26e pays le plus pauvre au monde (selon le revenu national brut), pour tenter de rejoindre Mayotte, située à quelques dizaines de kilomètres. Mais depuis l’instauration, en 1995, du « visa Balladur » restreignant la libre circulation dans l’archipel, ils n’ont d’autre choix qu’un voyage clandestin, coûteux et périlleux, pour rejoindre Mayotte. Parmi eux, des centaines d’enfants, parfois tout juste âgés de 5 ans, font la traversée, seuls, à bord de kwassa-kwassas, des embarcations de fortune toujours davantage soumises aux contrôles de la police aux frontières (PAF).
D’ordinaire, en métropole, les mineurs isolés sont protégés contre l’expulsion. « En droit français, aucun enfant ne peut être enfermé ni éloigné sans être accompagné d’un représentant légal », précise Marie Duflo, secrétaire générale du Groupe d’information et de soutien des immigrés (Gisti). Pourtant, à Mayotte, parmi les 19 991 personnes expulsées en 2014 (contre 15 908 en 2013), un quart étaient des enfants, estime-t-on au Gisti. Ainsi, chaque mois, la PAF réussit à déjouer la règle par un procédé singulier d’« affiliation fictive ». « Il faut le voir pour le croire », dit Marie Duflo, qui détaille, effarée, cette pratique administrative : dès lors que l’enfant voyage clandestinement et sans représentant légal, la préfecture décide, dès son arrivée, de le rattacher d’office à un adulte présent à bord du même navire. Peu importe si c’est un inconnu, et peu importe l’absence de lien de parenté. Sitôt affilié, l’enfant « accompagné » est prêt à être placé en rétention avant d’être rembarqué illégalement, parfois en quelques heures, vers les Comores. La Cimade et le Gisti ont aussi constaté que suivant la « politique conduite silencieusement » par les autorités françaises, la méthode s’applique également aux enfants dont l’un des deux parents avéré réside en situation régulière à Mayotte.
À l'intérieur du centre de rétention administrative de Pamandzi  À l'intérieur du centre de rétention administrative de Pamandzi  © © Délégation sénatoriale, 2012.
« Les exceptions, de fait ou de droit, ne manquent pas à Mayotte (…) et font apparaître de nombreuses atteintes aux droits fondamentaux des enfants », concluait déjà la Défenseure des enfants dans un rapport rendu en 2008. Le Conseil d’État quant à lui, saisi par les associations de défense des droits des étrangers, a déjà condamné à plusieurs reprises « l’illégalité manifeste » de la pratique en cours (ordonnances du 25 octobre 2014 et du 9 janvier 2015). Néanmoins, souligne Marie Duflo, la haute juridiction se contente d’enjoindre les autorités de vérifier, « dans toute la mesure du possible », l’identité du mineur. Une prescription à portée très restreinte, dans un territoire où « l’éloignement se déploie de façon industrielle », conclut-elle. En février, selon le quotidien Le Journal de Mayotte, en l'espace de 3 jours, 183 mineurs ont déjà été reconduits aux Comores.

Français seconde langue

À Mayotte, au quotidien, on ne parle pas français. Des taxis aux supermarchés, en passant par les terrasses de café ou les radios et télévisions mahoraises, partout résonnent le shimaore et le kibushi, les langues régionales pratiquées par l’ensemble de la population. Restent l’école et les administrations, où le français est de rigueur.
Paradoxalement, à l’école, les classes se tiennent en français mais la langue n’y est pas enseignée. Si bien que parmi les enfants scolarisés, un sur trois se trouve en situation d’illettrisme. « Beaucoup d’entre eux déroulent encore leur scolarité entière sans maîtriser les compétences de base à l’écrit en français »souligne l’Insee dans un rapport de février 2014. Sur toute l’île, les témoignages se multiplient pour dénoncer le malaise. « Les élèves doivent renoncer à leur langue et à leur culture, rapidement. Sans leur offrir aucun repère en échange, sans leur permettre d’être en situation d’apprentissage efficace, on leur impose une forme de négation de soi. Les enfants sont complètement explosés », explique Isabelle, ancienne enseignante aujourd’hui libraire à Passamainty, un village au centre-est de Mayotte.
Pour Louis*, professeur de philosophie au lycée de Sada, village dans le centre-ouest de l'île, l’absence de dispositif linguistique transitoire conduit nécessairement les élèves à leur perte, assortie d’un sentiment d’asservissement et de domination. À preuve, le désarroi et les interrogations qui transparaissent chaque semaine dans les copies : « C’est la raison de l’échec de beaucoup d’entre nous : l’identité et la langue. Ce n’est pas une bonne idée d’imposer une langue aux autres. Il vaut mieux échanger. Nous serions tous égaux, riches en savoirs, bilingues et même trilingues. Notre identité est précieuse comme l’or noir d’Arabie saoudite. Notre langue se fait guillotiner par la langue des colons. Il nous faut remettre à l’heure les horloges de notre vie… », écrivait encore il y a quelques jours Amani*, une élève de terminale.
Outre la souffrance des jeunes, Rivomalala Rakotondravelo pointe les humiliations et les difficultés rencontrées par les membres du corps enseignant mahorais : « On nous interdit de recourir à notre langue avec les élèves, même quand ils se trouvent dans une situation de blocage et d’incompréhension. Quoi qu’il arrive, il faut parler français. Mais c’est impossible. Alors les collègues se cachent quand ils veulent expliciter certains points. S’ils se font surprendre par la hiérarchie, il arrive qu’ils soient insultés, accusés de ne pas savoir enseigner en français. » Consterné, il ajoute : « Les langues régionales ont une vraie place dans l’ensemble des autres départements français mais à Mayotte, on décide de les nier, entièrement. » Un constat partagé par Fatima Ousseni, avocate, pour qui le rejet institutionnel des langues mahoraises est nécessairement un frein pour l’ensemble de la société : « Aux Antilles, quand on a cessé de traiter le créole comme une langue paria, les gens ont commencé à avancer. »
© Mayotte Observer
Comme chaque département, Mayotte est soumise à l’article 2 de la Constitution qui impose le monolinguisme et exige que les langues régionales ne soient que des langues secondaires. Or, souligne le linguiste Michel Launey, professeur honoraire à l’Université Paris 7 et chercheur à l’Institut de recherche pour le développement (IRD) de Guyane, la situation à Mayotte est unique, puisque la langue régionale, qui est précisément la langue maternelle, se trouve rejetée par l’Éducation nationale. « La majorité des enfants sont monolingues en langue locale à leur entrée à l’école. Ce cas de figure a disparu en métropole. Et dans les autres territoires français en outre-mer, des aménagements sont prévus. En Guyane, en Nouvelle-Calédonie ou en Polynésie, des dispositifs favorisant un meilleur apprentissage du français ont été instaurés. À Mayotte, on applique des méthodes d’exclusion de la langue maternelle. Elle est niée et pourchassée. »
En réaction, le chercheur a décidé d’alerter la délégation générale à la langue française et aux langues de France (DGLFLF) et le ministère de l’éducation nationale, en leur faisant parvenir un mémorandum soulignant spécificités du territoire et dangers de la méthode employée. Un document qui est resté, pour l’heure, sans réponse. En attendant, l’ensemble des acteurs de terrain demande, de toute urgence, une reconnaissance officielle des langues régionales et l’instauration, dans tous les établissements scolaires, de cours de français langue étrangère. Et les Mahorais, dans les taxis et les supermarchés, en passant par les terrasses de café, continuent de s’excuser platement de ne pouvoir s’exprimer en français.

Des expatriés en mission civilisatrice

« Quand on voit le salaire que les mzungus [les hommes blancs] obtiennent pour venir ici, il ne faut pas s’étonner que l’île soit divisée entre Noirs et Blancs. Ils  viennent uniquement à Mayotte pour gagner de l’argent. Puis, dès qu’ils en ont assez vu, ils s’en vont… », lance, écœuré, Raldgy, lycéen de Kawéni.
Dans son village, chaque soir, des enfants aux yeux cernés, short et tee-shirt élimés, réussissent au mieux à acheter une boîte de sardines quotidienne à l’épicerie locale. Au pire, ils se regroupent régulièrement pour éventrer d’énormes sacs d’ordures extraits des poubelles communales. À quelques centaines de mètres d’eux, dans les supermarchés, les expatriés remplissent leur panier de produits importés.
À Mayotte, la plupart des fonctionnaires de catégorie A ou B sont encore des expatriés venus de métropole. Tous, de l’Éducation nationale à la fonction hospitalière, bénéficient d’un système de sur-rémunération traditionnellement accordé pour combler le défaut d’attractivité du territoire en compensant l’éloignement et le différentiel du coût de la vie. Affectés sur l’île, les fonctionnaires bénéficient ainsi d’une prise en charge partielle de leur loyer et d’une indemnité d’éloignement, jusqu’à présent défiscalisée, équivalente à 23 mois de salaire supplémentaire sur deux ans. Des avantages scandaleux pour bon nombre de Mahorais, qui n’hésitent pas à souligner les conséquences pernicieuses d’un tel système, alors que, pour la plupart, ils n’ont pas même accès aux formations nécessaires pour devenir fonctionnaire.
En cause d’abord, les tensions inflationnistes. Accusées de s’indexer sur les salaires des expatriés, les principales enseignes commerciales (Sodifram, Somaco et Jumbo) sont pointées du doigt. Le coût de la vie, aggravé par une politique d’importation massive, serait bien moindre si les fonctionnaires ne bénéficiaient pas de tels avantages salariaux, souligne-t-on sur l’ensemble de l’île.
Une grande surface saccagée, à l'automne 2011.Une grande surface saccagée, à l'automne 2011. © photo postée sur Facebook
Un constat déjà dressé, dès 2003, par le député UMP Marc Laffineur, qui dénonçait, outre l’atteinte au principe d’égalité, « l’importance des sur-rémunérations dans la sphère publique [qui] pèse sur les prix ». Au cabinet de George Pau-Langevin, ministre des outre-mer, les limites du mécanisme déployé sont bien connues…, mais on assure que la nécessité de remédier au manque d’attractivité du territoire justifie l’absence de réforme : « C’est compliqué,nous n’arrivons pas à pourvoir certains postes. Même si nous avons bien conscience que le système en vigueur est très imparfait et qu’il génère localement des inégalités, personne n’a trouvé de meilleure solution pour l’instant. »
En cause également, la condescendance humiliante des fonctionnaires expatriés à l’égard des autochtones. Analysé comme la conséquence directe des disparités salariales et de l’écart de niveau de vie, le comportement de nombreux métropolitains est décrié.
« Ces primes sont indécentes et ont des effets pervers très nets. Certains collègues sont persuadés de devoir accomplir une mission civilisatrice, persuadés de devoir apporter les Lumières au peuple mahorais, persuadés que sans eux l’île s’enfoncerait dans le chaos et que c’est précisément pour cette raison qu’ils sont bien payés », s’indigne Louis*, professeur de philosophie au lycée de Sada. Un sentiment partagé par Mohamed Moindjié, directeur du CNAM local et adjoint au maire de Mamoudzou, qui souligne la survivance de l’héritage colonial : « Certains Blancs règnent ici comme au temps des colonies. Ils agissent comme si nous devions être gouvernés, dirigés et maternés. » Le linguiste Michel Launey complète : « Partout ailleurs en outre-mer, les fonctionnaires métropolitains sont précautionneux et respectueux, au moins en façade, avec les gens à qui ils ont affaire. Il existe à Mayotte une arrogance de type colonial. »
Les avantages maintenus de longue date aux expatriés n’ont pas échappé à la Cour des comptes qui vient d’épingler dans son rapport annuel (février 2015) « l’inextricable maquis » des sur-rémunérations des fonctionnaires de l’État en poste en outre-mer. Tout en exigeant une « réforme d’envergure », elle dresse un constat sans appel : tandis que les dépenses de personnel représentent plus de la moitié des dépenses budgétaires de l’État outre-mer (7,1 millions d’euros en 2012), elle observe que « le différentiel du coût de la vie est sans rapport avec l’ampleur des sur-rémunérations », et appelle à motiver autrement les fonctionnaires, par « des dispositifs d’incitation non financiers ».

« La régularisation foncière finira par exproprier les Mahorais »

Quatre ans après la départementalisation, aux quatre coins de Mayotte, on reconnaît être dépassé. Sur une île traditionnellement régulée par le droit coutumier, les Mahorais découvrent chaque jour les nouvelles normes qu’imposent transition fiscale et adaptation au droit commun. Impôt sur le revenu, taxe d’habitation, taxe foncière, redevance audiovisuelle… Confrontés à de tout nouveaux prélèvements, les Mahorais s’inquiètent : « C’est impossible, nous ne pourrons pas… » La phrase tourne en boucle dans les conversations.
Au centre du problème : la régularisation foncière du littoral, traditionnellement régi par un droit coutumier local qui reconnaît la propriété collective à usage familial, sans immatriculation ni enregistrement. Entamée dans les années 1990, la mise en conformité aux standards métropolitains prend un nouveau tournant. Alors que certains Mahorais avaient bénéficié à l’époque d’une autorisation d’occupation temporaire (AOT), « aujourd’hui, l’État estime qu’il n’a pas vocation à être bailleur vis-à-vis des particuliers. On ne renouvelle plus les AOT, on propose aux gens d’acheter », explique l’encadrant local de France Domaine, Philippe Chauliaguet, dans Le Journal de Mayotte. Instruites sous l’autorité du préfet, les demandes sont étudiées au cas par cas afin d’établir un prix en fonction du marché, de l’usage du terrain et des ressources de l’acheteur. 

Tandis que les plus démunis, faute de pouvoir payer, se préparent déjà à être expulsés de leurs terres ancestrales, partout, la colère gronde. Ceux qui ont eu la chance d’accéder à un titre de propriété en bonne et due forme se demandent désormais comment réunir les fonds pour s’acquitter des taxes foncières.
Aujourd’hui, on estime encore à 20 000 le nombre de Mahorais qui ne possèdent pas de titre de propriété pour leur habitation. « La régularisation à long terme finira par exproprier les Mahorais, alors même qu’ici la terre est sacrée. Elle constitue la base de notre identité », s’inquiète Hafidhou Ali, 28 ans, membre du Front démocratique, un des derniers partis indépendantistes de l’île. Avec rage, il conclut : « La départementalisation mènera inéluctablement à des catastrophes, et j’ai bien peur que les gens ne le réalisent trop tard. »

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A Mayotte, « comme au temps des colonies »
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