Cocufiée, la CÉNI, le bouc émissaire et le parfait cache-sexe électoral du gouvernement Il se cache de ses amis ces derniers temps, r...
Cocufiée, la CÉNI, le bouc émissaire et le parfait cache-sexe électoral du gouvernement
Il se cache de ses amis ces derniers temps, refuse de parler aux plus «compromettants» et aux plus bavards d’entre eux, mais tient tout de même une forme olympique et continue à faire l’actualité. Cela s’explique. En effet, Saïd Mzé Dafiné (Photo), l’enfant chéri et Duc de Salimani-Hambou, membre de la Commission électorale nationale «indépendante» (CÉNI), dont il est le Chargé de la Communication et des Relations avec les Partenaires, est un communicateur-né. Perfectionniste jusqu’à une certaine maniaquerie qui confirme son statut de Grand Seigneur, on le découvre désormais habillé en Maharajah du Rajasthan. Mais, il ne faut pas s’y fier car, sous ses airs d’aristocrate qui n’a rien à prouver, il est un dialecticien très habile, doté d’un sens extraordinaire de la répartie et de la rhétorique. Il ne parle que quand il est sûr d’avoir des choses sérieuses à dire et, au cours des discussions, il ne prend la parole que quand il est sûr de pouvoir convaincre, donc d’avoir raison. Il aime avoir raison, fait tout pour avoir raison, et quand il a tort, il ne le concède pas de manière explicite car il faut savoir sauver la face et les apparences. Que vaut un homme qui perd la face? Pour communiquer, la CÉNI ne pouvait trouver mieux que Saïd Mzé Dafiné, dont le talent oratoire et la force de conviction ne sont pas sans rappeler ceux d’un Lambert Mende Omalanga, ministre de l’Information, porte-parole du gouvernement du Congo-Zaïre. Saïd Mzé Dafiné a la tâche très difficile ces derniers temps parce qu’il doit tout faire pour que le monde entier puisse croire que la symbiose est totale entre Houssen Hassan Ibrahim, imprévisible, hallucinogène et pétaradant ministre de l’Intérieur, de l’Information, de la Décentralisation, chargé des Relations avec les Institutions (ouf! Ouf! De grâce!), la Cour constitutionnelle et la CÉNI. Tout Chargé de Communication autre que Saïd Mzé Dafiné aurait commis erreur sur erreur car le jeu des institutions travaillant de fait ou de Droit sur les élections «de 2015» est très compliqué: le joyeux ministre Houssen Hassan Ibrahim fait un enfant sur le dos de la Cour constitutionnelle, en signant son fameux «Mémorandum d’Entente» avec 49 partis politiques, mettant illégalement hors-jeu la Cour constitutionnelle, laquelle se venge en rendant caduc le «Mémorandum d’Entente» puisqu’elle rappela aux candidats indépendants et aux partis politiques qu’au-delà du 9 décembre 2014, les recours n’étaient plus possibles, alors que du fait du «Mémorandum d’Entente», les délais de recours étaient assortis d’un moratoire de 72 heures, à compter du 9 décembre 2014, date butoir fixée par la Cour. Quelle confusion!
Que constate-t-on donc si ce n’est un ensemble de dysfonctionnements? Et là, on sort le plus hallucinant des scénarii: il faut tout mettre sur le dos de la CÉNI, en l’accusant de tous les maux constatés au cours du processus électoral en cours. Une certaine presse, qui n’a pas compris la subtilité du jeu, déclare avec une ignorance mâtinée de mauvaise foi que même le gouvernement daube sur la CÉNI, et la désavoue. Grossière erreur.
Quand, dans une interview accordée à Karibu Magazine, Saïd Mzé Dafiné explique ce qui se passe, il n’use pas que de la langue de bois, notamment quand il déclare: «Les erreurs sont partagées. D’une part, les partis politiques et les candidats, qui attendaient toujours un renvoi des élections ou au moins un report de la date de dépôt des candidatures. Ce qui a engendré un surbooking le 24 novembre, dernier jour du dépôt des candidatures. D’autre part, la CÉNI, par ses démembrements, a réceptionné des dossiers de candidatures incomplets, en voulant donner de la chance aux candidats qui se sont présentés vers 23 heures passées, avec des dossiers à qui il manquait certaines pièces, bien que ces candidats aient tout de même signé une décharge acceptant que leurs dossiers fussent incomplets. Pour l’histoire, sur les 416 candidatures et listes de candidatures de Ngazidja, 390 dont plus de 2.000 personnes émanant des listes de candidature, sont déposées entre 17 heures et minuit le 24 novembre. Imaginons toute la précipitation et la légèreté dont certains candidats et partis politiques ont fait montre, mais aussi toute la contrainte qui a incombé aux membres de la CÉNI pour le traitement de 828 lots de dossiers dont plus de 3000 candidats sur les listes municipales, en un temps amoindri». C’est du grand Saïd Mzé Dafiné. Son entrée en matière est flamboyante, merveilleuse: «Les erreurs sont partagées». Malheureusement, en homme qui en sait trop sur la manière d’arrondir les angles, l’enfant de Salimani-Hambou n’est pas allé au bout de la logique, et il le sait, car il aurait fallu qu’il parle de «l’invasion électorale» du ministre Houssen Hassan Ibrahim et de l’inexistence de la Cour constitutionnelle. En plus, on est obligé de rire quand Saïd Mzé Dafiné, connu pour la sincérité de son engagement en faveur de l’État de Droit et de la démocratie aux Comores, pérore et ergote dans les termes suivants: «La CÉNI ne peut pas accepter de la corruption et du favoritisme en son sein». Belle phrase. Mais, elle fait trop langue de bois. Pourtant, son auteur est sincère quand il la prononce avec cette volonté de convaincre qui lui sied si bien.
Il a fallu reprendre les éléments d’information les plus importants communiqués par l’homme de la CÉNI parce que, pour la première fois de sa vie de personnalité publique, il prouve qu’il ne crache pas sur une occasion de recourir à un jugement à la Salomon. Ceci est d’autant plus vrai que quand Saïd Mzé Dafiné ne veut ni désobliger, ni froisser les gens, il donne raison à celui qui en a, mais sans dire à celui qui n’en a pas qu’il est un mauvais garçon pour avoir tort. Voulez-vous une preuve? La voici, et elle est tirée de son discours très rodé d’homme rompu dans l’art de la litote et des angles arrondis: «Ce ne serait pas une faiblesse si ces acteurs arrivent ensemble ou en partie à un compromis, tout en observant la Loi et les dates imparties, afin de garantir la sérénité du processus électoral engagé». Aux Comores, sur toute l’étendue du territoire comorien, seul Saïd Mzé Dafiné peut tenir un discours aussi machiavélique et cynique (ce qui revient au même), en donnant raison à Houssen Hassan Ibrahim, quand il parle de «compromis», mais tout en disant que la Cour constitutionnelle a également raison, puisque l’ancien ministre de la Présidence de l’île autonome de la Grande-Comore parle de «la Loi et des dates imparties». La CÉNI sera récompensée par la nécessité de «de garantir la sérénité du processus électoral engagé». En un mot, à un moment où la CÉNI est cocufiée, accusée de tous les maux de la terre, traînée dans la boue et prise en traître par un gouvernement qui se couvre, Saïd Mzé Dafiné fait tout pour réhabiliter cette «épouse morganatique de la République», la «vieille maîtresse défraîchie du gouvernement».
Il ne fait pas de doute que la CÉNI est devenue le paillasson du gouvernement, mais aussi la bonniche des partis et acteurs politiques incompétents. Le gouvernement agit à son égard comme une hyène qui veut dévorer ses petits, et qui les accuse de sentir la chèvre. Une fois de plus, Saïd Mzé Dafiné prouve qu’il connaît tout du jugement de Salomon quand il donne raison à la fois aux partis politiques qui ont signé le «Mémorandum d’Entente» et ceux qui ont refusé de signer le document: «L’une des démarches ne s’oppose pas à l’autre; elles se complètent». Du Saïd Mzé Dafiné tout craché.
Au moment où Saïd Mzé Dafiné fait tout pour sauver l’honneur d’une CÉNI cocufiée par le gouvernement, qui s’en sert comme fusible et paratonnerre, les Comoriens apprennent avec émoi et émotion que le Docteur Ahmed Mohamed Djaza, Président de l’institution, est parti «se cacher» à l’étranger. C’est faux. Il ne se cache pas. Il est parti se faire de l’argent en «Tahlil» (somme versée à ceux qui psalmodient le Coran pour le repos d’un mort), le mot créé à Mohéli pour parler d’indemnités de déplacement. En fait, ça paie bien ces déplacements à l’étranger, et ça donne une impression d’utilité et de notoriété à l’international. Qu’on parle de remaniement du Bureau de la CÉNI ou pas ne change rien à la donne. Il se pourrait même qu’en cas de remaniement du Bureau de la CÉNI, Ahmed Mohamed Djaza reste à sa place.
Par ARM