"J'ai quitté les Comores où j'étais prof: En France, je serais peut-être femme de ménage"
L'immigration n'est pas toujours liée, loin de là, à des conditions politiques. Elle peut aussi être économique et sociale. C'est le cas pour Kourachia (nom d'emprunt) et sa famille, qui ont dû quitté les Comores en 2012. Elle raconte sa difficile arrivée en France, et comment les choses se sont passées depuis deux ans jusqu'à un retour au pays.
Aéroport de Hahaya - Grande-comore |
Je m’appelle Kourachia, j’ai 44 ans et je viens de l'Ile de la Grande - comore . Mon fils Abdou (nom d'emprunt) et moi sommes arrivés en France il y a deux ans pour y retrouver mon mari, Abdoulkarim (nom d'emprunt).
J'étais professeure
Aux Comores, j’étais professeure de langue, mon mari était fonctionnaire et mon fils, qui a aujourd’hui 12 ans, étudiait dans une école privée . Nous vivions dans une grande maison avec mes parents, qui s’occupaient de mon fils quand Abdoulkarim et moi partions travailler.
Mais là-bas, la situation économique est très compliquée. Depuis des années, la situation économique ne cesse de s'empirer. Cette situation provoquée par la corruption des gouvernements successifs, fait que la vie devient un enfer. Malheureusement, mon mari n’a pas été épargné : en 2009, il a dû quitter le pays. Il est resté six mois au Qatar puis est arrivé en France.
Mon fils et moi sommes restés au pays, avec mes parents. Mais quelques temps après, la situation s’est encore dégradée et nous a forcé à quitter à notre tour.
Nous sommes arrivés en France en avril 2012, alors que mon mari Abdoulkarim était hébergé par des compatriotes. Deux mois plus tôt, il avait rencontré Sylvie, conseillère en économique sociale et familiale dans une association, et a ainsi pu bénéficier de quelques aides.
Hôtels sociaux et marchand de sommeil
Mais au début, ça a été très difficile. Pendant plusieurs mois, nous avons multiplié les allers-retours en hôtels sociaux et préfecture. Mon fils avait alors 10 ans et vivait très mal la situation, il n’arrêtait pas de pleurer et nous demandait sans cesse de rentrer aux Comores. Comme nous n’avions pas de domiciliation ni de papiers, nous ne pouvions même pas l’inscrire à l’école.
Heureusement, en octobre 2013, nous avons finalement pu être hébergés chez des amis en Banlieue parisienne. Cela nous a permis d’inscrire Abdou à l’École, pendant que nous cherchions, avec l’aide de Sylvie, une solution d’hébergement et de papiers.
Un an plus tard, nous nous sommes donc à nouveau trouvés sans domicile. Je travaillait dans le noir en tant que femme de ménage et mon mari comme baby-sitter. Pour le bien-être de notre fils, nous avons donc été forcés d’accepter la proposition d’un "marchand de sommeil", comme on dit. Pendant un an, nous avons partagé avec une autre famille un tout petit deux pièces à Paris , pour lequel chaque famille devait verser 550 euros de loyer et 100 euros de charges mensuelles.
Il ne nous restait quasiment plus rien pour vivre, et nous dépendions des restaurants sociaux pour nous alimenter. Mais cela a quand même permis à Abdou de rentrer en classe de 6e dans un collège du quartier.
On n’est jamais mieux que chez soi
Malgré les problèmes récurrents d'eau, d’électricité et la cherté de la vie aux Comores, nous avons décidé de retourner au pays. Notre voyage nous a aider à comprendre ce que nos compatriotes vivent en France. Nous avons compris que seul le citoyen comorien peut trouver une solution aux problèmes qui frappent notre archipel.