Près d’une semaine après la tenue en terre comorienne du IVème Sommet des Chefs d’Etat et de Gouvernement de la COI, le Président de l’U...
Près d’une semaine après la tenue en terre comorienne
du IVème Sommet des Chefs d’Etat et de Gouvernement de la COI, le
Président de l’Union des Comores, Son Excellence Dr IKILILOU Dhoinine, a
accordé à la presse nationale, une longue interview au cours de
laquelle, il a abordé toutes les questions : politiques, économiques,
régionales et internationales sans laisser de côté la fièvre Ebola, qui a
déjà fait plus de 2 000 morts en Afrique de l’Ouest.
A la question de savoir ce que peut apporter la diplomatie comorienne
devant la situation difficile au Moyen Orient en particulier et dans le
monde arabe en général, le Président de la République a déclaré que le
diplomatie comorienne se range du côté de celle de la Ligue des Etats
Arabe. Il a toutefois regretté que les décisions qui en sont issues, ne
soient pas suivies d’effets, faute de sécurité, aggravant ainsi la
situation, en particulier pour les civils. « Il y a un semblant de paix
mais elle est encore fragile. C’est pourquoi, notre diplomatie soutient
la trêve entre Gaza et Israël et elle s’active à la renforcer pour
qu’elle devienne permanente ».
Le Président de la République reconnait que le printemps
arabe, à l’origine de cette vague de changements inattendus, a donné
des résultats différents selon les pays mais, selon lui, la situation
reste extrêmement compliquée aussi bien en Tunisie, en Lybie, en Egypte,
qu’en Syrie ou ailleurs. « Nous aspirons tous à la démocratie certes,
mais il faut aussi savoir qu’elle ne peut être viable que s’il y a une
paix, une stabilité, des institutions fortes et acceptées de tous ; ce
qui n’est malheureusement pas le cas dans beaucoup de ces pays où des
factions s’affrontent au nom de la religion ».
Concernant la position des Comores sur ce qui se passe
en Ukraine, Dr IKILILOU Dhoinine a estimé qu’en tant que petit pays, les
Comores ne peuvent que demander le respect des résolutions des Nations
Unies, notamment celles du Conseil de Sécurité. « Nous ne pouvons pas
revendiquer Mayotte et rester indifférent à ce qui est fait à
l’Ukraine »
Interrogé sur les mesures préconisées pour éviter ce qui
se passe dans certains pays membres de l’Union Africaine comme le
Soudan, la RCA, le Mali et le Niger, le Chef de l’Etat a déclaré que
sans la présence des troupes françaises au Mali, peut être que le Mali
ne serait pas ce qu’il est aujourd’hui ; C’est la raison pour laquelle
il estime qu’il va falloir renforcer la sécurité. En tant que pays
francophone, l’Union des Comores doit appuyer la pacification de la RCA
où la situation qui a connu des dérapages dans le passé, commence à se
rétablir avec la réconciliation des Chefs des factions. Il a déploré que
qu’au Soudan du Sud, les populations continuent de s’entretuer quelques
années seulement après l’indépendance. « L’Union Africaine a mis au
point des Forces comme l’EASF qui sollicite la participation des
comoriens dans les missions de maintien de pays. Aucun pays n’est
épargné par le terrorisme, l’histoire récente nous rappelle encore ce
qui s’est passé en Tanzanie, au Kenya et nous devons nous préparer en
conséquence pour épargner à notre pays de tels agissements ».
Concernant les mesures prises par le pays pour faire
face à la recrudescence de la fièvre hémorragique Ebola, en Afrique de
l’Ouest le Président de la République a déclaré qu’Ebola ignore les
frontières surtout dans un monde devenu un village planétaire. Aussi
a-t-il demandé aux autorités concernées, de prendre des mesures de
prévention, en effectuant des contrôles sur les passagers qui arrivent.
Il a annoncé l’instauration d’un comité de surveillance et fait savoir
que le Vice-présidence en charge du Ministère de la Santé a pris toutes
dispositions.
Interrogé sur ce que peut attendre le comorien dans son
panier alors que la plupart des dettes comoriennes ont été épongées, il a
estimé d’abord que le point d’achèvement qui n’est pas une fin en soi
et n’est que le retour à la normalité financière. « Nous sommes ainsi
redevenus crédibles pour contracter de nouveaux crédits afin de relancer
notre économie. Seulement, il nous faut de la prudence pour ne pas
revenir à la case départ, c’est-à-dire nous retrouver dans l’incapacité
de rembourser nos dettes. Ce qu’il nous faut, ce sont des prêts à long
terme et à faible intérêt, et des projets viables. Si nous pouvons
prévoir les recettes annuelles, pourquoi ne pas connaitre à l’avance les
dépenses ».
Concernant les prospections pétrolières dans les eaux
comoriennes, il a appelé la presse à être objective et à ne pas
contribuer à semer la zizanie, déclarant qu’aucune confirmation de la
présence de cette manne n’est à ce jour catégorique. « Ces prospections
continuent et nous attendons la confirmation bien que les hydrocarbures
aient été découverts chez nos voisins ». Il a jouté à ce sujet qu’il
restait des textes réglementaires à élaborer avec l’aide des partenaires
du pays.
Concernant les infrastructures notamment routières,
hospitalières, portuaires, aéroportuaires et autres il a rappelant
l’existence d’un plan quinquennal et que tout ce qui a été fait en la
matière sur l’étendue du territoire, l’a été sur fonds propres à
l’exception de la route Wallah-Miringoni. « Les travaux de cartonnage,
de débroussaillage et de dérivation des eaux se poursuivent puisque
l’eau est l’ennemi numéro un des routes ».
A propos des hôpitaux : « nous sommes fiers de fabriquer
notre oxygène sur place et nous avons ainsi résolu un épineux problème.
A notre demande, le centre hospitalier de Sambankouni sera pris en
charge durant trois ans, quant à celui de Bambao Mtsanga, les
équipements sont arrivés et nous procéderons à son inauguration
officielle prochainement. »
Parmi les problèmes auxquels les mohéliens sont
confrontés, notamment le stockage des hydrocarbures et l’aérogare, il a
jugé que la situation trouve progressivement des solutions. « Pour ceux
qui ne le savent pas, je leur dis que l’appel d’offres pour la
construction du dépôt est lancé, mais il faut beaucoup d’argent. Nous
espérons entreprendre les travaux sous peu. Concernant l’aérogare,
l’implantation a été faite et cela est un signe encourageant ».
Pour l’eau et l’électricité le Chef de l’Etat s’est dit
convaincu, que sans eau et sans électricité, c’est le développement du
pays qui est confisqué et que c’est une porte ouverte pour toutes les
maladies. « Tout le monde est concerné mais les agents de la Ma-Mwe le
sont plus que nous tous. Or, personne ne dénonce les abus des uns et des
autres comme les branchements sauvages ».
Pour les solutions, il a rappelé que d’autres sources
d’énergie propres comme la géothermie sont à l’étude mais qu’il faut du
sérieux pour tout le monde afin de gérer au mieux l’aide que la Banque
Africaine de Développement et la Banque Mondiale apportent au pays dans
ce domaine. Concernant l’eau en particulier, il a déclaré être un
Président chanceux puisque un vaste chantier d’extension du réseau
hydraulique a été entamé et que des travaux financés par l’AFD et la BAD
à Domoni, Djandro, Sima, à Mutsamudu, Moroni, Mitsamihouli ou Mbéni ont
été entrepris.
« Je suis cependant peiné de constater que nous
détruisons les routes que nous venons à peine de faire pour faire passer
les tuyaux" Cela signifie selon lui qu’il n y a pas de politique de
prévention. "C’est le cas pour l’adduction qui a été faite pour Moroni
et qui n’a pas pris en compte, ni l’accroissement de la population, ni
l’extension de la ville. Nous devons impérativement changer de
mentalités et comprendre qu’il faut payer l’eau pour qu’elle soit
permanente dans nos foyers ».
Sur le chômage, surtout celui des jeunes, il a rappelé
avoir été clair dans son programme de campagne. « L’Etat ne peut pas à
lui tout seul, offrir du travail à toute notre jeunesse. Il faut donc
donner au secteur privé les moyens de pouvoir le faire. C’est pourquoi
j’ai donné une grande importance au projet « Pêche » qui pourra offrir à
long terme plus de 8 000 emplois, ce qui serait un grand pas effectué
dans cette direction. A côté de cela, l’Etat a débloqué un important
fonds d’aide à la création d’emplois de jeunes et des femmes ».
Sur le climat politique, la présidence tournante, il a
avoué avoir eu beaucoup plus de chance chanceux que ses prédécesseurs
car il a pu travailler en parfaite collaboration avec ses frères
Gouverneurs des îles. « Malgré cela, les créateurs de troubles ne
manquent pas. Il faut une unicité de notre Administration publique avec
un contrôle mutuel. Cela peut prendre beaucoup de temps mais nous devons
tous comprendre qu’il revient au Gouvernement central de planifier et
aux îles d’en assurer l’exécution ».
Concernant l’unité des Garde-côtes comoriennes, il
reconnu que cette jeune unité connait comme toutes les autres, ses
difficultés, mais il reste optimiste quant à son avenir. « Au vu du rôle
important qu’elle est appelée à jouer surtout dans le contexte
sécuritaire actuel, nous avons signé plusieurs accords avec nos
partenaires notamment les USA, la France, Madagascar, la Tanzanie. Les
USA, la Chine et la Turquie nous ont fait don des vedettes rapides et
cela permet à nos militaires de pouvoir assurer la surveillance de
frontières maritimes. J’encourage l’AND à continuer sur cette lancée ».
Sur l’organisation des élections de novembre 2014, il a
déclaré qu’organiser des élections demande toujours énormément de moyens
et que le budget prévu est de 3 milliards. « Des partenaires comme
l’Union Européenne, le Qatar, Maurice ou la Ligue des Etats Arabe, se
sont prononcés, mais il me semble qu’il serait bon de revoir le budget à
la baisse. Quant au Gouvernement, il contribue avec un peu plus d’un
demi-milliard de francs comoriens ».
Sollicité pour commenter le sommet des Chefs d’Etat et
de Gouvernement de la COI du 23 août dernier il a déclaré : « Nous avons
souhaité l’implication de tous pour la réussite du Sommet. En
l’accueillant, nous avons prouvé que nous n’avons rien à envier à nos
voisins et nous sommes fiers. Il faut croire en la force du pays et en
sa capacité. Nous avons certes bénéficié de l’aide des autres, mais
c’est comme cela que les choses se passent partout.
Il ajouté : "Vous vous demandez pourquoi les Chefs
d’Etat n’ont pas été solidaires avec moi quand j’ai évoqué le problème
de l’île comorienne de Mayotte, pourquoi ils ne se sont pas manifestés.
Nous avons été solidaires avec le Président F. Hollande pour reporter le
Sommet suite à l’accident d’avion d’Air Algérie lors duquel plus d’une
cinquantaine de français ont péri, je croyais que nous allions garder
cette solidarité, mais cela n’a pas été le cas, malheureusement ».
Interrogé enfin sur sa participation à Samoa à la
Conférence des Nations Unies sur les Petits Etats Insulaires en
Développement, il a déclaré qu’à l’instar de tous les Etats Insulaires,
l’Union des Comores a, en tant que PIED, les mêmes préoccupations : la
montée des eaux qui risque sous peu de rayer certaines îles de la carte.
Nous allons aussi discuter de développement durable. « A Anjouan, la
route n’existe pas à certains endroits, effacée par la mer ; la même
chose est constatée à Mohéli comme à Ngazidja avec plusieurs villages
côtiers menacés. Il nous faut penser aux générations futures et
souhaiter que les grands pays les plus riches nous soutiennent pour
empêcher une disparition accélérée de nos îles ».