DÉCRYPTAGE Le mois de jeûne commence ce week-end mais la date précise fait encore débat parmi les musulmans français. Le 28 ou l...
DÉCRYPTAGE
Le mois de jeûne commence ce week-end mais la date précise fait encore débat parmi les musulmans français.
Le 28 ou le 29 juin, samedi ou dimanche ? Quand les musulmans de France vont-ils commencer leur mois de jeûne ? L'affaire donne lieu, comme l'année dernière, à une jolie bataille. D'un côté les «modernistes», même s'ils récusent être en contradiction avec l'enseignement coranique (la «sunna»). Ils prônent le calcul astronomique mâtiné d'un peu d'observation du ciel. Pour eux, le ramadan commence le 28 juin, notamment parce que le premier croissant de lune sera observable, la veille, au Chili. En face, les «traditionnalistes» qui souhaitent maintenir les us et coutumes. Pour eux, la date du ramadan ne peut être fixée qu'une fois le premier croissant de lune visible, à l'œil nu, dans le ciel. Pour se conformer à la tradition, plusieurs grandes mosquées, notamment celles de Lyon, Strasbourg et Paris organisent, vendredi, une «nuit du doute» afin d'observer le ciel.
«CELA SIMPLIFIE LA VIE DES MUSULMANS»
Ces querelles de minaret ont commencé l'année dernière. Deux mois avant le début du jeûne, un accord entre toutes les grandes fédérations musulmanes avaient été trouvé sous l'égide du Conseil français du culte musulman (CFCM), l'islam de France se ralliant à la méthode du calcul astronomique. Dans la diaspora, plusieurs communautés ont déjà fait ce choix : l'Allemagne, les Etats-Unis ou encore le Canada. «Cela simplifie la vie des musulmans», rappelle le théologien Ahmed Jaballah, l'un des principaux dirigeants de l'Union des organisations islamiques de France (UOIF), proche des Frères musulmans. En connaissant à l'avance la date du début du ramadan, il est plus facile de poser des jours de congés ou de louer des salles pour la grande fête musulmane de l'Aïd el-Fitr, à la fin du jeûne.
UN TIERS DES MOSQUÉES RALLIÉ AUX «MODERNISTES»
Ces dernières semaines, l'UOIF n'a pas ménagé sa peine. Elle a mobilisé son réseau à travers toute la France, organisé des réunions dans les mosquées, constitué un conseil théologique, tenu une conférence de presse pour rallier l'islam de France à la méthode astronomique. Plus de mille mosquées (soit environ un tiers de celles de l'Hexagone) auraient d'ores et déjà opté pour cette solution, notamment le réseau turc qui représente, à lui seul, 400 lieux de culte. En face, il y a le CFCM (Conseil français du culte musulman) qui, sous la pression de la Grande Mosquée de Paris, avait opéré, en 2013, un revirement de dernière minute, revenant à la méthode traditionnelle. La fronde était menée, à l'époque, par les adversaire du CFCM, notamment salafistes, encore très mobilisés cette année et l'UAM-93 qui fèdère plsuieurs dizaines de mosquées en Seine-Saint-Denis. Faute de travail pédagogique en amont, des centaines de mosquées avaient suivi les opposants au CFCM.
Paradoxalement, cette année, c'est surtout pour ne pas enlever un peu plus sa crédibilité au CFCM qu'une majorité de grandes mosquées et quelques fédérations musulmanes suivent la méthode traditionnelle. «Je suis convaincu qu'à l'avenir une majorité se ralliera au calcul astronomique. Les jeunes commencent à s'intéresser de près à cette question», estime Mohammed Moussaoui, l'ancien président du CFCM, qui fut très actif pour imposer le calcul astronomique.
Bernadette SAUVAGET
Bernadette SAUVAGET