Si non, qu’elles négocient avec la France avec réalisme, et qu’elles s’améliorent. C’est encore parti pour une nouvelle polémique à la c...
Si non, qu’elles négocient avec la France avec réalisme, et qu’elles s’améliorent.
C’est encore parti pour une nouvelle polémique à la comorienne. Pauvre Richard Nixon (1913-1994, Président des États-Unis de 1969 à 1974), qui disait que la diplomatie n’était pas un souk d’Orient: en diplomatie, on traite d’affaires importantes qu’on n’étale pas dans la rue. Pour autant, la diplomatie secrète est condamnée depuis 1918 parce qu’elle est considérée comme l’une des causes de la Grande Guerre ou Première Guerre mondiale. Le premier des «Quatorze Points» (8 janvier 1918) du Président états-unien Thomas W. Wilson portait sur la «suppression de la diplomatie secrète» et donc sur la condamnation de cette diplomatie clandestine. La question taraudait tellement les consciences et les chancelleries que l’article 18 du Pacte de la Société des Nations (SDN, 28 juin 1919) stipule: «Tout traité ou engagement international conclu à l’avenir par un membre de la Société devra être immédiatement enregistré par le secrétariat et publié par lui aussitôt que possible. Aucun de ces traités ou engagements internationaux ne sera obligatoire avant d’avoir été enregistré».
Pour lutter contre la diplomatie secrète, la Charte de l’ONU (26 juin 1945) est allée plus loin que le Pacte de la SDN, puisque son article 102 est rédigé dans les termes suivants: «1.- Tout traité ou accord international conclu par un Membre des Nations Unies après l’entrée en vigueur de la présente Charte sera, le plus tôt possible, enregistré au Secrétariat et publié par lui. 2.- Aucune partie à un traité ou accord international qui n’aura pas été enregistré conformément aux dispositions du paragraphe 1 du présent Article ne pourra invoquer ledit traité ou accord devant un organe de l’Organisation». Les Comores ne peuvent donc pas conclure des accords secrets avec la France surtout que, avant même le départ des diplomates comoriens vers Paris, le texte de l’accord qu’ils allaient négocier en France circulait sur Internet. Et, avant même que la délégation conduite par Hamada Madi Boléro n’arrive en France, les «vendus» ont commencé à faire l’objet d’accusations. Parmi elles, nous retenons celles formulées par Maître Fahmi Saïd Ibrahim, chef de la diplomatie comorienne de juin 2010 à juin 2011. Ces accusations rejoignent celles d’autres acteurs politiques et médiatiques.
Il est difficile de partager l’analyse de Fahmi Saïd Ibrahim quand il dit: «Je dénonce, tout d’abord, l’opacité qui a entouré le choix des membres composant cette délégation. Je regrette aussi que le Président Ikililou se soit enfermé avec son Directeur de Cabinet pour faire le choix des délégués, alors que c’est une affaire d’enjeu national, il y va de l’intégrité territoriale des Comores, c’est l’affaire de tous. Je pense qu’il aurait fallu informer la nation, s’adresser à elle, informer l’Assemblée nationale par respect des institutions avant de désigner des membres en concertation avec cette même Assemblée. Face à de pareils enjeux, la Nation et ses représentants doivent être informés du projet. Le président a montré son mépris vis-à-vis du peuple comorien, de ses institutions, au premier rang duquel l’Assemblée nationale. […]. Des personnalités telles que Ali Mlahaili, Ali Mroudjaé, Saïd Hassan Saïd Hachim, Mouhtar Charif et Abdourazak Abdoulhamid, ou encore un membre du Comité Maoré auraient été plus appropriés si au moins l’un d’eux avait fait partie de cette délégation. Je regrette tout autant que dans cette délégation, il n’y ait pas eu un seul membre élu par le peuple comorien, donc détenteur de la légitimité populaire, mais des membres désignés dans l’opacité totale».
Le Président de la République a le droit d’inclure qui il veut dans une délégation partant pour l’étranger, et aucune disposition constitutionnelle ne l’oblige à consulter qui que ce soit pour composer la délégation. En plus, à la différence de ce qui se passe aux États-Unis, le chef de l’État comorien n’est pas obligé de désigner des parlementaires parmi les négociateurs chargés d’un dossier, mais les Députés peuvent refuser de ratifier un traité soumis à leur approbation. Les personnalités que l’ancien ministre cite sont toutes respectables, mais ne disposant d’aucun mandat officiel, le chef de l’État n’a pas d’obligations particulières à leur égard quand il s’agit de former une délégation. Il en est de même pour le Comité Maoré, qui n’est pas un mouvement de libération nationale (MLN), mais une simple association politique. Donc, en la matière, il n’y a pas d’«opacité». Et si le Président de la République doit faire un discours à la nation chaque fois que les Comores doivent conclure un accord international, son Cabinet ne ferait que rédiger des discours. Il est vrai que le chef de l’État a fait du «mépris» une manière de vivre et de «gouverner» mais, je ne crois pas qu’en ce qui concerne la conclusion de cet accord de Paris, on peut aller jusqu’au mot «mépris».
La réalité, il faut la chercher ailleurs, et elle n’est pas forcément honorable: le refus de toute négociation avec la France. Au départ, tout a été fait pour accréditer la thèse du complot basé sur une diplomatie secrète de «vente». Mais, aujourd’hui, la diplomatie comorienne est devenue un souk d’Orient. Le contenu de l’accord n’a pas été agréé par les augures de la politique et des médias aux Comores. Pourquoi? Parce qu’il s’agissait de conclure un accord avec la France. Ce n’est pas de cette façon qu’on fait de la diplomatie parce que la réalité nous oblige à constater que Mayotte est actuellement sous administration française. Mayotte est donc une île occupée de force par la France? Que nenni! Ce sont les habitants de cette île qui ont choisi de rester Français et qui ont décidé, à 95,24%, lors du référendum du 29 mars 2009 que leur île soit transformée en département français. À y regarder de près, on ne voit pas de mouvement de libération nationale à Mayotte, ni Armée d’occupation, ni oppression coloniale sur la population.
Aujourd’hui, ceux qui refusent la négociation avec la France doivent arrêter de parler car on a trop parlé, et ils doivent fournir l’Armée et les armes destinées à chasser la France de Mayotte, tout en se posant la question de savoir s’ils seront accueillis en «libérateurs» par la population locale le jour de la «libération». Qu’on se le dise une bonne fois pour toutes: à Mayotte, vivent des gens qu’on appelle les Mahorais, et rien ne se fera à Mayotte sans les Mahorais. Enfumer les Comoriens avec de la complaisance démagogique est une chose, résoudre leurs problèmes en est une autre. Qu’on traite sur Internet le Président comorien de «vendu» ne va nous faire mourir de colère. Néanmoins, dans les négociations entre les Comores et la France, le chef de l’État comorien est obligé de traiter avec la réalité car Mayotte est actuellement entre les mains de la France et non entre celles des Comores, et, les Mahorais ne veulent pas qu’on leur parle des Comores. C’est facile à comprendre, non?
Une telle affaire, se passant de toute propagande mensongère, les «faux Comoriens» que nous sommes attendons les propositions des «vrais Comoriens», dont ceux du Comité Maoré. Il est attendu des «bons patriotes» non seulement le rejet de la négociation, mais en plus, des propositions concrètes sur la manière de «libérer» Mayotte par la force armée. Le Roi Hassan II du Maroc avait été le pionnier du dialogue arabo-israélien, suscitant l’incompréhension et la colère des autres dirigeants arabes, à qui il avait dit: «Quelle est cette école de politique internationale qui interdirait tout dialogue? Si vous arrivez à me citer un seul précédent, dans l’histoire universelle et arabe, d’un chef ou d’un penseur qui a refusé la discussion, même en état de guerre, alors je vous suivrai» (Hassan II: La Mémoire d’un Roi. Entretiens avec Éric Laurent, Plon, Paris, 1993, p. 263). Qu’est-ce que les chefs d’État arabes les plus sincères ne donneraient pas aujourd’hui, après la fin des utopies, pour voir les Palestiniens avoir un vrai processus de paix avec Israël et disposer, enfin, d’un État!
En diplomatie, on ne négocie pas qu’avec ses amis. On ne perd jamais à négocier jusqu’au jour où l’on obtient gain de cause. Donc, si les «bons et vrais Comoriens» n’ont pas d’Armée et d’armes pour libérer Mayotte, qu’ils laissent l’État négocier. Les Comores ne peuvent pas vendre ce qu’elles n’ont pas entre les mains. Elles doivent mettre en place une gouvernance acceptable et arrêter les transporteurs de clandestins à Mayotte au lieu de s’insurger contre eux qui négocient notamment sur l’entrée des Comoriens à Mayotte. Effectivité et réalisme.
Par ARM
© www.lemohelien.com – samedi 7 décembre 2013.