Sur son île de Mohéli, le Colonel Mohamed Anrifi Moustoifa traque Fouad Mohadji. Comme le film de 1957, la scène, digne d'un film...
Sur son île de Mohéli, le Colonel Mohamed Anrifi Moustoifa traque Fouad Mohadji.
Comme le film de 1957, la scène, digne d'un film hollywoodien, aurait pu s'appeler «Règlement de comptes à OK Corral». Pourtant, elle se passait à Mohéli.
Les Mohéliens tremblent encore, tant leur traumatisme est grand. Un drame personnel et politique d'une magnitude inégalée sur l'échelle de la bêtise et de la haine a été évité de justesse sur l'île de Mohéli. En effet, jeudi 5 décembre 2013, le Vice-président Fouad Mohadji et son épouse arrivèrent au poulailler pompeusement baptisé «Aéroport de Mohéli». Le ministre Abdou-Nassur Madi avait pris le même avion en provenance de Hahaya, qui avait atterri à Mohéli à 10 heures 35, mais le couple ne s'en rendit compte qu'une fois dans l'avion. Monsieur et Madame n'avaient pas sacrifié aux chichis protocolaires du salon VIP («Voyageurs internationaux parqués», selon un diplomate), tandis qu'Abdou-Nassur s'y était installé en attendant l'annonce du vol. Les voilà tous au poulailler aéroportuaire de Mohéli, où Abdou-Nassur Madi eut...
...droit à un accueil tout à fait officiel, pendant qu'il était demandé au Docteur Fouad Mohadji d'aller se faire cuire un œuf. Le Vice-président se contenta de lever les mains au ciel et de proclamer, fataliste et écœuré: «Louanges à Dieu, le Seigneur des mondes. C'est vraiment à moi qu'on fait tout ça?». Pourtant, il n'était pas au bout de ses peines, car le plus beau était à venir…
L'épouse du Vice-président monta dans la voiture personnelle de Mohamed Chami, un ami de l'homme d'État, et celle-ci démarra en direction de Fomboni, sa ville natale. Quelques minutes plus tard, le véhicule fut arrêté par des soldats en treillis de combat brandissant des armes lourdes, comme dans un pays en guerre. Les bidasses menaçaient de fusiller les occupants de la voiture si ces derniers bougeaient ne serait-ce que le petit doigt. Ils ne demandèrent même pas les papiers de la voiture, mais fouillèrent celle-ci avec une méticulosité haineuse, sadique et provocatrice, toujours en pointant leurs armes sur l'épouse du Vice-président et sur les autres passagers. La torture morale dura de longues minutes, avant que le chauffeur ne reçut l'autorisation de continuer sa route.
Pour sa part, le Docteur Fouad Mohadji, Vice-président en charge du ministère de la Santé, prit part sur une voiture de l'Organisation mondiale de la Santé (OMS). Peu après le démarrage du véhicule, les troufions, portant toujours leurs tenues et armes de combat, essayèrent d'«arraisonner» celui-ci, dans le pur style des pirates somaliens attaquant un navire dans l'océan Indien et dans le Golfe d'Aden. Le chauffeur, craignant pour sa vie, car les troufions étaient vraiment menaçants, voulut obéir, quand le garde du corps accompagnant le Vice-président depuis Moroni pointa l'arme sur lui et lui dit: «Si tu arrêtes cette voiture, je te tue d'une balle sur la tête! Accélère! J'en assume la responsabilité!». Sur ces mots «encourageants et stimulants», le chauffeur fit littéralement voler la pauvre voiture comme une fusée: «On aurait dit qu'elle roulait à 180 kilomètres à l'heure, sur une île où la notion de route relève plus d'un mot que d'une réalité», signale, encore médusé et retourné, notre correspondant à Fomboni. La soldatesque avait couru, fissa, pour aller se cacher. C'est quand même la garnison du Colonel Mohamed Anrifi Moustoifa Bacar Madi, dit «José», dit «Obama», ce dernier surnom étant hérité de la période où il voulait être le Président des Comores, en 2010. Eh oui!
À la suite de cette énième tentative d'humiliation qui a été tentée sur Fouad Mohadji, l'île de Mohéli, comme à son habitude, gronde, maudit et siffle comme une cocotte-minute au bord de l'implosion. Car, tout le monde sait que c'est Mohamed Anrifi Moustoifa Bacar Madi qui est à l'origine de tout ça, et qu'il n'aurait jamais osé aller si loin contre le Vice-président Fouad Mohadji si Ikililou Dhoinine ne l'avait pas permis et ordonné. Comme le sujet est constamment évoqué, Hamada Madi Boléro connaît les débordements du Colonel, mais a laissé faire, lui qui n'a jamais eu peur de crier sur le Colonel comme on le fait sur un enfant. Mais, les choses ont changé, dans la mesure où Anrifi Moustoifa Bacar Madi est le beau-frère du chef de l'État.
En même temps, le ministre Abdou-Nassur Madi ne sort pas grandi de cette affaire: les Mohéliens l'accusent de manquer de respect, solidarité, manières et courage car, dès qu'il a constaté que le Vice-président de la République, élu sur le même bulletin de vote que le Président Ikililou Dhoinine le 26 décembre 2010, avait été humilié, il aurait refusé les salades protocolaires du poulailler aéroportuaire de Mohéli. Mais, il faut connaître le climat de haine qui plane sur ce régime politique pour savoir que le ministre aurait été viré sec dès qu'il aurait manifesté la moindre solidarité envers son aîné et collègue du gouvernement, un élu de la République, en plus.
Une fois de plus, les Mohéliens donnent des arguments à ceux qui, à la Grande-Comore et à Anjouan, ont toujours manifesté leur scepticisme sur la capacité d'un Mohélien à être chef d'État aux Comores. Cependant, comme dit le proverbe marocain, «quand on est stupide, on se fait un mal que même un ennemi ne peut pas provoquer».
Par ARM
© lemohelien – Samedi 7 décembre 2013
