Mercredi, aux côtés du roi Mohammed VI (à droite), le président français François Hollande a parcouru une place du centre de Casablanca p...
Mercredi 4 avril, Casablanca
13h29 : Aéroport de Casablanca.
L’Airbus de François Hollande atterrit à l’aéroport Mohammed V de
Casablanca avec une heure de retard. La « bombe Cahuzac » va parasiter
la visite d’Etat de François Hollande au Maroc. Avant de décoller de
Paris, le président français a dû enregistrer une déclaration solennelle
pour tenter d’éteindre l’incendie Cahuzac. A son arrivée, la pluie
tombe sur Casa. Hollande, c’est bien « Rainman », le surnom qui lui
colle à la peau depuis le début de son quinquennat ; son investiture, le
15 mai, s’était déroulée sous des trombes d’eau et son avion avait pris
la foudre. Aujourd’hui, le temps est vraiment à l’orage.
François Hollande a reçu un «accueil populaire» mais la foule était peu nombreuse. Casablanca, le 3 avril 2013.
Photo RFI / Florent Guignard |
14hOO : Entretien au Palais royal. C’est la deuxième fois que François Hollande et Mohammed VI se rencontrent. Le roi du Maroc avait été le premier chef d’Etat à être reçu par François Hollande juste après son élection. Après Chirac « le père » et Sarkozy l’ami bling-bling, François Hollande doit trouver sa place auprès du monarque.
Mali, Syrie et Sahara occidental sont au menu de l’entretien. La relation Maroc-Algérie est aussi évoquée. « Il y a un contexte qui change », explique un ministre : la normalisation des relations franco-algériennes. « Dès lors que vous êtes mieux entendus des deux parties, vous pouvez faire bouger les choses. » Sans aller jusqu’à faire une offre de médiation, François Hollande pourrait aider au dialogue entre Rabat et Alger.
16h30 : Mediouna. Moins glamour que le TGV ou le tramway, la station d’épuration de Mediouna, dans la banlieue du Grand Casablanca. C’est pourtant le choix arrêté par François Hollande pour une « visite de terrain ». La station est une première du genre ; elle illustre le savoir-faire français en matière de développement urbain. Un marché gigantesque au Maroc. Les entreprises françaises y sont plutôt bien placées.
Mediouna est une ville nouvelle qui a à la fois l’air vieux et inachevé, comme il en pullule à la périphérie des grandes villes marocaines sous la pression de l’exode rural. François Hollande et Mohammed VI sont accueillis par des cris et des youyous lancés par une petite foule massée derrière des barrières depuis plusieurs heures sous la pluie et le vent… Les youyous redoubleront pour le roi, quand François Hollande sera reparti. Pendant la visite qui se déroule au milieu de grandes cuves malodorantes remplies d’une eau noire et boueuse, des employés du palais astiquent au chiffon les vitres de la limousine royale.
18h30 : Lycée français de Casablanca, discours à la communauté française. Pas un mot de François Hollande sur « l’affaire » devant les Français de Casablanca rassemblés au lycée français Lyautey. « Quand on est en visite d’Etat, explique l’Elysée, on ne ramène pas les problèmes domestiques. » A la présidentielle, Hollande était arrivé en tête ici. L’accueil est poli, la salle n’est pas pleine. Jack Lang est au premier rang.
Pour la énième fois depuis son élection, le président répète que « la France est un grand pays ». Comme si de rien n'était. Quelques blagues météorologiques : « Gouverner, c’est pleuvoir ». Ah tiens, entre le Mali et la Syrie, François Hollande évoque les « problèmes de la France », et ces « difficultés » qui « ne sont jamais insurmontables ». Un message d’encouragement aux Français. Ou à lui-même.
20h30 : Dîner d’Etat au Palais royal. La cérémonie du thé est annulée. Trop de retard. On dit aussi que les princesses n’auraient pas eu le temps de changer de tenue entre le thé et le dîner. On passe donc directement à table. Echange de toasts « très complémentaires » entre François Hollande et Mohammed VI, dixit l’Elysée, où l’on se félicite de « la touche très personnelle » de l’allocution royale.
Le roi et le président dînent en famille. A la même table, à leurs côtés, la compagne de François Hollande, la femme du roi Lalla Salma, les deux sœurs et le frère de Mohammed VI. Le jeune prince héritier, Sidi Hassan, n’est pas du dîner. Dans l’après-midi, on l’a vu faire du shopping chez Gucci au Morocco Mall, le plus grand centre commercial du Maroc.
Au menu du dîner d’Etat, deux tagines, deux pastillas et un couscous. Jus de gingembre et lait d’amandes. De retour à l’hôtel, un ministre se tape le ventre. Et commande une bière.
Tapis rouge pour le président français. Casablanca, le 3 avril 2013.
Photo RFI / Florent Guignard |
Jeudi 4 avril, Rabat
11h45 : Discours devant le Parlement à Rabat. En attendant le président, l’ancienne ministre Elisabeth Guigou, née au Maroc, prend des photos de l’hémicycle. A Paris, il est question maintenant de comptes aux îles Caïmans de l’ancien trésorier de la campagne de François Hollande. Nouvelle claque au réveil. « On n’avait pas besoin de ça ». « Il faut un vent fort et un paquet de nerfs pour faire un bon marin », lâche le ministre des Transports, Frédéric Cuvillier. Depuis « le capitaine de pédalo » de Jean-Luc Mélenchon, la métaphore marine est très en vogue dans la politique française.
Le capitaine arrive et prononce son discours devant les députés marocains. « Une amitié, ça s’entretient », dit-il. Il n’y pas d’amour, il n’y a que des preuves d’amour… François Hollande plaide devant un hémicycle plein et sage pour de nouveaux projets franco-marocains (la colocalisation en matière économique et des co-investissements en Afrique). Standing ovation pour Hollande lorsqu’il renouvelle le soutien de la France au plan marocain d’autonomie du Sahara occidental. Le président français salue « la volonté réformatrice du roi Mohamed VI ». Mais point trop n’en faut ; François Hollande supprime de son discours une phrase sur « le pluralisme politique et la liberté d’expression (qui) progressent ».
17h00 : Conférence de presse finale. Dispositif particulier pour cette conférence de presse. Trois questions pour la presse marocaine, trois autres pour la presse française. En Algérie, François Hollande avait été beaucoup plus bavard. Mais le contexte n’est pas le même. Les journalistes français s’intéressent moins au Sahara occidental qu’au séisme de l’affaire Cahuzac. A Paris, les spéculations vont bon train sur un remaniement. Il s’agit d’y mettre un terme. « Ce n’est pas le gouvernement qui est en cause », justifie François Hollande. Posture quasi chef de guerre : « Je suis le chef d’un pays qui ne peut pas accepter d’être humilié depuis des années. » La conférence de presse n’a duré qu’un quart d’heure.
Par Florent Guignard RFI
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