La Tanzanie ressemble beaucoup à une démocratie. Cette nation d’Afrique tient des élections multipartites depuis 1995 et les observateurs...
La Tanzanie ressemble beaucoup à une
démocratie. Cette nation d’Afrique tient des élections multipartites
depuis 1995 et les observateurs internationaux les ont jugées libres et
concurrentielles. En Tanzanie, le décompte des votes est correct, les
partis d’opposition se font activement concurrence, et le parti au
pouvoir, le Chama Cha Mapinduzi (CCM), qui contrôle le gouvernement
depuis l’indépendance, semble jouer selon les règles.
Mais selon Bruce Bueno de Mesquita,
professeur de science politique à l’Université de new York et membre du
Development Research Institute, la Tanzanie est, en réalité, sur une
pente glissante vers l’autocratie, même si elle conserve les attributs
d’une démocratie « en transition ». Un document de travail co-écrit avec
Alastair Smith décrit comment le code électoral de Tanzanie, tout à
fait légal et institutionnalisé, place le pouvoir entre les mains d’une
petite élite de plus en plus enracinée.
Durant la transition vers la démocratie en Tanzanie, le parti au pouvoir a écrit une constitution qui lui a donné un avantage significatif. La Tanzanie a adopté le scrutin uninominal majoritaire à un tour, ce qui tend à résulter en deux principaux partis politiques, comme aux États-Unis et au Royaume-Uni. Mais en Tanzanie, le gouvernement encourage la survie de nombreux partis, en offrant des subventions aux candidats à la présidentielle et aux législatives. Voilà un premier indice laissant supposer que quelque chose ne va pas.
Cette prolifération artificielle de partis politiques, avec un système compliqué de suffrage direct et indirect, se traduit par un Parlement où le CCM a besoin de seulement un tiers des sièges pour former une majorité. Les sièges gagnés au suffrage indirect doivent être occupés par des femmes, ce qui fait apparaître la Tanzanie comme un pays « progressiste ». Mais parce que la plupart des femmes doivent leur emploi au CCM, elles agissent en réalité comme des fidèles du parti. Autre indice donc.
Puisque la structure électorale permet au CCM de gagner une bonne partie de son soutien par le biais de suffrages indirects et de sièges « nommés », Bueno de Mesquita et Smith trouvent que le nombre de suffrages directs nécessaires pour gagner un canton est un puissant facteur prédictif négatif pour savoir si le parti au pouvoir accordera des biens tels que des routes et des subventions à ce canton. Même les programmes spécifiquement destinés à lutter contre la pauvreté sont soumis à cette logique : doubler le nombre de votes directs nécessaires pour gagner un canton se traduirait par une diminution de 69 % de la probabilité de recevoir des bons pour le maïs subventionné. Ce qui est pire encore, c’est que les cantons pauvres les plus peuplés ont tendance à nécessiter moins de votes directs que les cantons plus riches, moins peuplés : ainsi les zones pauvres obtiennent moins de subventions, et les zones riches obtiennent davantage de routes.
La Tanzanie reçoit près de 3 milliards de dollars d’aide chaque année. Combien de ces dollars d’aide ont permis de construire des routes là où elles ne sont pas nécessaires et permis d’acheter bon marché du maïs pour les riches ? Les bailleurs de fonds devraient se méfier : ils financent peut-être le renforcement de la position du parti au pouvoir.
Durant la transition vers la démocratie en Tanzanie, le parti au pouvoir a écrit une constitution qui lui a donné un avantage significatif. La Tanzanie a adopté le scrutin uninominal majoritaire à un tour, ce qui tend à résulter en deux principaux partis politiques, comme aux États-Unis et au Royaume-Uni. Mais en Tanzanie, le gouvernement encourage la survie de nombreux partis, en offrant des subventions aux candidats à la présidentielle et aux législatives. Voilà un premier indice laissant supposer que quelque chose ne va pas.
Cette prolifération artificielle de partis politiques, avec un système compliqué de suffrage direct et indirect, se traduit par un Parlement où le CCM a besoin de seulement un tiers des sièges pour former une majorité. Les sièges gagnés au suffrage indirect doivent être occupés par des femmes, ce qui fait apparaître la Tanzanie comme un pays « progressiste ». Mais parce que la plupart des femmes doivent leur emploi au CCM, elles agissent en réalité comme des fidèles du parti. Autre indice donc.
Puisque la structure électorale permet au CCM de gagner une bonne partie de son soutien par le biais de suffrages indirects et de sièges « nommés », Bueno de Mesquita et Smith trouvent que le nombre de suffrages directs nécessaires pour gagner un canton est un puissant facteur prédictif négatif pour savoir si le parti au pouvoir accordera des biens tels que des routes et des subventions à ce canton. Même les programmes spécifiquement destinés à lutter contre la pauvreté sont soumis à cette logique : doubler le nombre de votes directs nécessaires pour gagner un canton se traduirait par une diminution de 69 % de la probabilité de recevoir des bons pour le maïs subventionné. Ce qui est pire encore, c’est que les cantons pauvres les plus peuplés ont tendance à nécessiter moins de votes directs que les cantons plus riches, moins peuplés : ainsi les zones pauvres obtiennent moins de subventions, et les zones riches obtiennent davantage de routes.
La Tanzanie reçoit près de 3 milliards de dollars d’aide chaque année. Combien de ces dollars d’aide ont permis de construire des routes là où elles ne sont pas nécessaires et permis d’acheter bon marché du maïs pour les riches ? Les bailleurs de fonds devraient se méfier : ils financent peut-être le renforcement de la position du parti au pouvoir.
Lauren Bishop, Assistante de Projets Online au
Development Research Institute de l’Université de New York, adjointe
aux programmes d’économie à l’Africa House de l’Université de New York
et étudiante en relations internationales, le 21 février 2013.
Cet article a été publié originellement en anglais sur le site du Development Research Institute
Publié en collaboration avec LibreAfrique.org et afrik.com
Cet article a été publié originellement en anglais sur le site du Development Research Institute
Publié en collaboration avec LibreAfrique.org et afrik.com
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