Ces derniers temps, il ne fait pas bon être Comorien non mahorais à Mayotte. On risque de subir mille et une tracasseries, voire une ag...
Ces derniers temps, il ne fait pas bon être Comorien non mahorais à Mayotte. On risque de subir mille et une tracasseries, voire une agression physique. Quant aux enfants, ils se voient, tout simplement, refuser le droit le plus élémentaire : être scolarisés.
Un bloggeur a récemment titré "La chasse aux Comoriens des autres îles à Mayotte est un travail à plein temps", après les violentes manifestations ayant visé des ressortissants de Ngazidja, de Ndzuwani et de Mwali dans plusieurs villages mahorais. Cette traque n'épargne pas les enfants, que l'on pourchasse jusque dans leurs établissements scolaires au mépris de toutes les conventions internationales, notamment celle relative aux droits de l'enfant.
Mesures draconiennes
En 2008, la Halde (Haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l'égalité) avait déjà adressé à la Défenseure des enfants (en France) un rapport fort accablant dans lequel il était fait état d'obstacles à l'inscription dans les lycées et les collèges de Mayotte d'élèves prétendument étrangers (comprenez, comoriens). Cette requête avait dénoncé "le système discriminatoire mis en place en matière de scolarisation des enfants non mahorais, surtout ceux qui ne sont pas entrés légalement sur le territoire". A l'origine de cette énième poussée de fièvre, toujours la même rengaine: les Comoriens du reste de l'archipel seraient la principale source de l'insécurité grandissante à Mayotte. Une habile inversion des rôles pour noyer le poisson. Car, en réalité, ce sont eux qui sont font chaque jour les frais des mesures draconiennes dites "de sécurité" sur l'île.
Les perles de Guillemot
En mars 2011, le lieutenant-colonel de gendarmerie Patrick Guillemot n'avait-il pas déclaré à la presse: "Je cherche (…) à mettre les étrangers en situation irrégulière dans un climat d'insécurité. Ils doivent savoir qu'on peut les contrôler à tout moment. Ils doivent le craindre. Ce n'est pas aux Mahorais ou aux Mzungu [terme local désignant les Français, ndlr] d'avoir peur de se faire piquer leurs salades. C'est aux personnes en situation irrégulière de se sentir en insécurité. Cette insécurité est nécessaire". Le propos ne pouvait être plus clair. Du statut de victimes de la violente répression policière à Mayotte, voilà que les Comoriens deviennent subitement les "bourreaux".
Vous avez dit ''patrie des droits de l'homme"?
Il faut dire que depuis plusieurs années, à intervalles réguliers, on assiste à un soudain déferlement de haine à l'encontre des ressortissants de la partie libre des Comores, obligés de raser les mûrs et de se replier sur les hauteurs pour échapper aux rafles de la police française et aux brutalités des Mahorais. Un célèbre journaliste français trouve "aberrant" que la France ,qui se gargarise d'être "la patrie des droits de l'homme", laisse se pratiquer, plus de quatre siècles plus tard, le "marronnage" (terme désignant la fuite d'un esclave hors de la propriété de son maître à l'époque coloniale). Les évènements de ces derniers jours à Mayotte nous rappellent le triste épisode de Hamouro en octobre 2003 lorsque le maire de Bandrele, en compagnie de ses agents communaux, avait mis le feu à une trentaine de cases en torchis appartenant à des Comoriens sans papiers français. A cette époque, de nombreuses voix avaient même accusé la préfecture d'avoir organisé l'opération.
Rabattage
"L'incendie des bangas s'inscrit dans une longue liste des manifestations d'hostilité à l'égard des Comoriens qui a commencé il y a plus de deux ans sans trouver beaucoup d'écho en métropole", avait alors écrit le quotidien français Libération. Après le rabattage des Comoriens à Mzuwaziya, en février dernier, le directeur de cabinet du préfet de Mayotte, Jean-Paul Frédéric, avait d'abord eu une réaction mesurée et responsable en jugeant "inacceptable que des enfants aient été pris en otage parce que d'origine étrangère. C'est une ségrégation qui relève de la loi pénale". Mais, il a aussitôt annoncé des actions ciblées "au cours desquelles les habitants vont nous indiquer où se trouvent les gens qui n'ont pas vocation à rester sur le territoire". Pathétique, tout simplement!
"Mayotánamo"
Rafles, persécution des enfants,… la France serait-elle en train de transformer Mayotte en un territoire de non droit et d'installer un Guantánamo bis (un Mayotánamo, devrait-on dire) dans l'Océan Indien. L'exemple de la circulaire Valls est un cas d'école. Cette note du ministre français de l'Intérieur, en date de juillet 2012, interdit, en effet, le placement en Centre de rétention administrative (Cra) des mineurs, sauf… à Mayotte. Allez comprendre! Selon la Cimade, plus de 5.000 enfants ont été enfermés en 2011 à Mayotte et ce, dans des "conditions épouvantables" de l'aveu même du Contrôleur général des lieux de privation de liberté.
Mohamed Inoussa
Lu sur le site du Mouvement Orange
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