L'incident est totalement passé inaperçu mais en décembre dernier, un ATR72 d'Air Austral a bel et bien failli se poser sur le ventr...
L'incident est totalement passé inaperçu mais en décembre dernier, un ATR72 d'Air Austral a bel et bien failli se poser sur le ventre à Pierrefonds. L'équipage a omis de sortir le train d'atterrissage. Le commandant de bord qui était aux commandes s'en est aperçu quand l'alarme de proximité de sol, activée lorsque l'avion à l'atterrissage a ses trains rentrés, s'est déclenchée. Il a rattrapé in extremis la situation.
SAINT-PIERRE
En ce mois de décembre 2012, un ATR72 décolle de Gillot à destination de Pierrefonds. Le commandant de bord est aux commandes.
Bien que la visibilité soit supérieure à 10 km dans un ciel sans nuages, l'appareil évolue dans des conditions de vol aux instruments. Après avoir décollé de Gillot, l'ATR72 rejoint le point Erdip, de simples coordonnées géographiques, très au large de la Pointe-des-Galets. Il met ensuite le cap sur Oktib au large de Saint-Gilles.
À partir de là, après un virage à gauche, l'appareil est presque dans l'axe de la piste 15 de Pierrefonds. Alors que l'ATR72 s'approche de l'atterrissage, on bavarde beaucoup sur la fréquence. Ce jour-là, les fréquences de Pierrefonds sont couplées. Aux contacts entre la tour de contrôle et les avions se mêlent les échanges entre des véhicules qui travaillent sur la piste pour différentes inspections.
L'équipage de l'ATR72 a du mal à se faire entendre. À chaque fois que la tour lui demande d'indiquer sa position, il a déjà dépassé le point géographique vers lequel il est en fait censé se diriger.
Pour compliquer encore la situation, la tour signale la présence d'un avion léger évoluant à la même altitude que l'ATR72 mais arrivant en sens inverse. L'équipage de l'ATR72 le repère et poursuit sa manœuvre d'approche en descente vers la piste 15 face à Saint-Pierre. Mais, le vent commence à tourner et l'équipage doit se résoudre à un atterrissage dans l'autre sens en piste 33.
De la procédure d'approche aux instruments, il passe à une manœuvre à vue libre. Conformément à la procédure, l'équipage devrait à ce moment-là sortir le train et les volets pour mettre l'appareil en configuration d'atterrissage. Mais le commandant décide de laisser l'appareil en configuration tout rentré ce que les spécialistes appellent une configuration lisse. Dans son rapport il s'en explique. « Compte tenu de la très bonne météo ce jour-là, le changement de piste ne m'a pas du tout posé de problème. J'ai voulu profiter de l'occasion pour un entraînement à une procédure que nous réalisons qu'au simulateur et qui n'arrive quasiment jamais dans l'exploitation : une approche aux instruments suivie d'une manœuvre à vue libre. J'en ai informé l'officier pilote de ligne qui a été d'accord. J'ai omis de lui dire que je souhaitais rester en lisse jusqu'en vent arrière car les événements se sont succédé très rapidement et que mon projet d'action avait été remis en cause d'un coup. J'ai délesté les communications. »
L'atterrissage de l'ATR72 est maintenant proche et le train d'atterrissage n'est toujours pas sorti. L'appareil évolue à une altitude comprise entre 15 et 213 m. L'équipage va être sauvé par le gong.
L'appareil est équipé d'un GPWS (avertisseur de proximité de sol). Parmi ses sept modes, l'un est activé lorsque l'avion, à l'atterrissage, a ses trains rentrés. Lorsque l'appareil atteint sa vitesse d'atterrissage, l'alarme Too low gear retentit. L'alarme s'arrête lorsque la vitesse redevient supérieure. Si l'altitude est encore en dessous d'une valeur nominale, l'alarme Too low terrain retentit à son tour.
Dans le cas de l'ATR72 l'alarme sonore et visuelle too-low gear retentit dans le poste. « À l'ouverture aux minima, j'ai été surpris par l'alarme, » poursuit le commandant. « Cela m'a rappelé qu'effectivement le train n'était pas sorti et que nous continuions à descendre. J'ai repris le pilotage manuel instinctivement pour revenir à une situation connue jusqu'à l'atterrissage. »
Il s'en est donc fallu de peu que l'appareil ne se pose sur le ventre. Plus de peur que de mal
Alain Dupuis
Journal de la Réunion
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