Candidat à la présidence de son pays le 26 février prochain, le chanteur Youssou N'Dour a accordé un entretien à Courrier internationa...
Candidat à la présidence de son pays le 26 février prochain, le chanteur Youssou N'Dour a accordé un entretien à Courrier international pour expliquer les raisons de son engagement et sa ferme opposition au président sortant Abdoulaye Wade.
A gauche : Youssou N'Dour. Dans la bulle : le président sénégalais Abdoulaye Wade. A droite : Michel Martelly, président d'Haïti et ancien musicien. Dessin de Glez, Burkina Faso. |
COURRIER INTERNATIONAL Qu’est-ce qui vous a décidé à franchir le pas pour vous lancer à la conquête de la présidence de votre pays ?
YOUSSOU N'DOUR En tant qu'observateur attentif de la vie politique, je me suis rendu compte que la démocratie de mon pays était en danger. Et je ne peux pas l’accepter. Depuis plusieurs années, j’ai donné l'alerte avec mes textes et ma musique. On ne m’a pas entendu. Ma musique se situe entre le peuple et ceux qui gouvernent. Mon message a toujours été écouté par le peuple sénégalais, mais n’est jamais allé jusqu'en haut, jusqu'aux oreilles des gouvernants. C’est mon constat. Et depuis la création de mon mouvement citoyen Fékké Maci Bolé [Je suis présent donc concerné], plusieurs Sénégalais m’ont poussé, m'ont demandé de me présenter à l’élection présidentielle du 26 février. Je dois mon succès, ma carrière aux Sénégalais. Donc si mon pays a besoin de moi, je réponds présent. Nous sommes dans une situation difficile. Notre Constitution a été tripotée à l’extrême ces dernières années. Et aujourd’hui, nous avons un président de la République sortant qui veut violer cette Constitution pour se présenter. Je ne peux pas l’accepter. Nous ne pouvons pas l’accepter.
En quoi Abdoulaye Wade viole-t-il la loi fondamentale de son pays ?
La Constitution dit clairement et sans équivoque qu’une personne élue et réélue une deuxième fois ne peut pas se représenter une troisième fois. C’est le cas du président actuel, Abdoulaye Wade. Or non seulement il n’accepte pas cette lecture claire de la Constitution, mais il nous oblige en plus à aller vers un contentieux. Il faut convaincre Wade de ne pas se présenter.
Le Conseil constitutionnel du Sénégal, plus haute juridiction du pays, ne s’est pas encore prononcé. Ne faudrait-il pas attendre que cette instance tranche ?
Non ! Le Conseil constitutionnel est nommé par le président Abdoulaye Wade lui-même. Nous craignons donc qu’il fasse fi de la loi pour trancher en sa faveur. Nous ne devrions même pas en arriver là, car la lecture de ce texte est claire. Je refuse d’attendre que le Conseil constitutionnel se prononce. Je ne suis pas juriste, mais les rédacteurs de ce texte fondamental ont clairement dit qu’il n’avait pas le droit. Lui-même a une fois reconnu publiquement que c’était son dernier mandat. Maintenant, pourquoi la communauté internationale laisse-t-elle un homme bafouer la constitution de son pays ?
Devrait-elle selon vous intervenir ?
Oui, clairement. La communauté internationale doit dire au président Wade qu’il n’a pas le droit de se présenter. Malheureusement, ses prises de positions sont floues. Et mieux vaut prévenir que guérir, sinon nous allons tout droit vers une crise compliquée.
Craignez-vous un scénario à l'ivoirienne, avec une intervention militaire étrangère ?
D’abord, je considère l'élection comme une affaire nationale. Mais la communauté internationale peut intervenir dans le cas où un chef d’Etat viole sa Constitution. Elle a suffisamment d’éléments pour comprendre le jeu de Wade. C’est un malin, un rusé. Il clignote à gauche et tourne à droite. Il veut semer tout le monde.
Qu’est-ce que le candidat Youssou N'Dour a de plus par rapport aux autres opposants ?
Le pouvoir, c’est une délégation du peuple. La majorité des partis traditionnels l’ont oublié, d’où le dégout et le rejet de la part d’une bonne partie des Sénégalais. Ils cherchent une alternative. Je suis une alternative dans la mesure où je me suis fait toujours fait l’écho de leur souffrance. Ma légitimé est là.
Pourtant au début du règne de Wade, en 2000, vous sembliez proches. Quand la rupture est-elle intervenue ?
Il faut distinguer le chef de l’Etat et le chef de parti. Je garde un profond respect pour la fonction présidentielle. Donc à chaque fois que Wade me sollicitait, je répondais présent dans l’intérêt du pays. Mais je n’ai jamais participé, ni de près ni de loin, à la gestion et au fonctionnement de l’Etat. J’ai vu avec le temps que son pouvoir était dangereux pour mon pays. J’ai pris mes distances car je suis du côté du peuple.
Que ferez-vous si vous êtes élu à la présidence ?
Casser ce pays coupé en deux : le Sénégal d’en haut, 2% de la population qui possèdent toutes les richesses, et le Sénégal d’en bas, oublié dans la misère. Je réduirai le train de vie de l'Etat pour investir dans la santé et l’éducation par exemple. Je ne fais pas de promesses. Je propose un agenda avec une évaluation tous les cent jours. Je rendrai compte. Ma priorité, c'est atteindre l’autosuffisance l’alimentaire, améliorer les infrastructures, protéger les petits producteurs et éviter l’exode. Nous devons nous développer à partir de nos propres ressources.
Avant vous, d'autres stars du show-biz se sont souvent cassés les dents en politique...
Je n’ai rien à perdre, ni à gagner. Ce n'est pas une ambition personnelle. Je réponds à l’appel de mon pays pour ne pas avoir un regret.
Source: courrierinternational.com
YOUSSOU N'DOUR En tant qu'observateur attentif de la vie politique, je me suis rendu compte que la démocratie de mon pays était en danger. Et je ne peux pas l’accepter. Depuis plusieurs années, j’ai donné l'alerte avec mes textes et ma musique. On ne m’a pas entendu. Ma musique se situe entre le peuple et ceux qui gouvernent. Mon message a toujours été écouté par le peuple sénégalais, mais n’est jamais allé jusqu'en haut, jusqu'aux oreilles des gouvernants. C’est mon constat. Et depuis la création de mon mouvement citoyen Fékké Maci Bolé [Je suis présent donc concerné], plusieurs Sénégalais m’ont poussé, m'ont demandé de me présenter à l’élection présidentielle du 26 février. Je dois mon succès, ma carrière aux Sénégalais. Donc si mon pays a besoin de moi, je réponds présent. Nous sommes dans une situation difficile. Notre Constitution a été tripotée à l’extrême ces dernières années. Et aujourd’hui, nous avons un président de la République sortant qui veut violer cette Constitution pour se présenter. Je ne peux pas l’accepter. Nous ne pouvons pas l’accepter.
En quoi Abdoulaye Wade viole-t-il la loi fondamentale de son pays ?
La Constitution dit clairement et sans équivoque qu’une personne élue et réélue une deuxième fois ne peut pas se représenter une troisième fois. C’est le cas du président actuel, Abdoulaye Wade. Or non seulement il n’accepte pas cette lecture claire de la Constitution, mais il nous oblige en plus à aller vers un contentieux. Il faut convaincre Wade de ne pas se présenter.
Le Conseil constitutionnel du Sénégal, plus haute juridiction du pays, ne s’est pas encore prononcé. Ne faudrait-il pas attendre que cette instance tranche ?
Non ! Le Conseil constitutionnel est nommé par le président Abdoulaye Wade lui-même. Nous craignons donc qu’il fasse fi de la loi pour trancher en sa faveur. Nous ne devrions même pas en arriver là, car la lecture de ce texte est claire. Je refuse d’attendre que le Conseil constitutionnel se prononce. Je ne suis pas juriste, mais les rédacteurs de ce texte fondamental ont clairement dit qu’il n’avait pas le droit. Lui-même a une fois reconnu publiquement que c’était son dernier mandat. Maintenant, pourquoi la communauté internationale laisse-t-elle un homme bafouer la constitution de son pays ?
Devrait-elle selon vous intervenir ?
Oui, clairement. La communauté internationale doit dire au président Wade qu’il n’a pas le droit de se présenter. Malheureusement, ses prises de positions sont floues. Et mieux vaut prévenir que guérir, sinon nous allons tout droit vers une crise compliquée.
Craignez-vous un scénario à l'ivoirienne, avec une intervention militaire étrangère ?
D’abord, je considère l'élection comme une affaire nationale. Mais la communauté internationale peut intervenir dans le cas où un chef d’Etat viole sa Constitution. Elle a suffisamment d’éléments pour comprendre le jeu de Wade. C’est un malin, un rusé. Il clignote à gauche et tourne à droite. Il veut semer tout le monde.
Qu’est-ce que le candidat Youssou N'Dour a de plus par rapport aux autres opposants ?
Le pouvoir, c’est une délégation du peuple. La majorité des partis traditionnels l’ont oublié, d’où le dégout et le rejet de la part d’une bonne partie des Sénégalais. Ils cherchent une alternative. Je suis une alternative dans la mesure où je me suis fait toujours fait l’écho de leur souffrance. Ma légitimé est là.
Pourtant au début du règne de Wade, en 2000, vous sembliez proches. Quand la rupture est-elle intervenue ?
Il faut distinguer le chef de l’Etat et le chef de parti. Je garde un profond respect pour la fonction présidentielle. Donc à chaque fois que Wade me sollicitait, je répondais présent dans l’intérêt du pays. Mais je n’ai jamais participé, ni de près ni de loin, à la gestion et au fonctionnement de l’Etat. J’ai vu avec le temps que son pouvoir était dangereux pour mon pays. J’ai pris mes distances car je suis du côté du peuple.
Que ferez-vous si vous êtes élu à la présidence ?
Casser ce pays coupé en deux : le Sénégal d’en haut, 2% de la population qui possèdent toutes les richesses, et le Sénégal d’en bas, oublié dans la misère. Je réduirai le train de vie de l'Etat pour investir dans la santé et l’éducation par exemple. Je ne fais pas de promesses. Je propose un agenda avec une évaluation tous les cent jours. Je rendrai compte. Ma priorité, c'est atteindre l’autosuffisance l’alimentaire, améliorer les infrastructures, protéger les petits producteurs et éviter l’exode. Nous devons nous développer à partir de nos propres ressources.
Avant vous, d'autres stars du show-biz se sont souvent cassés les dents en politique...
Je n’ai rien à perdre, ni à gagner. Ce n'est pas une ambition personnelle. Je réponds à l’appel de mon pays pour ne pas avoir un regret.
Source: courrierinternational.com
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