Faute d'avoir rétabli la sécurité face à l'insurrection talibane, les Occidentaux n'ont pu achever ni la reconstruction, ni la d...
Faute d'avoir rétabli la sécurité face à l'insurrection talibane, les Occidentaux n'ont pu achever ni la reconstruction, ni la démocratisation. » Les 200 premiers soldats français quittent l'Afghanistan.
Alors que s'amorce, parallèlement à celui des Américains, le retrait des soldats français d'Afghanistan, quel bilan peut-on dores et déjà tirer de dix ans d'intervention militaire au «Royaume de l'Insolence» ? Quel pays laisserons-nous derrière nous ? Mission accomplie ou non ?
Lancée par l'administration Bush le 7 octobre 2001 en réaction aux attentats du 11 Septembre, la guerre d'Afghanistan n'a, en son début, pas sollicité les Français. En effet, ce sont les Américains seuls qui détruisirent les camps d'entraînement d'al-Qaida basés en Afghanistan et qui aidèrent les Tadjiks et Ouzbeks de l'Alliance du Nord à libérer Kaboul des talibans, le 13 novembre. La chute de la capitale signifia la déroute du régime obscurantiste du mollah Omar, dont l'élite partit se réfugier dans le sanctuaire pakistanais.
Ivres de ce succès rapide, les Occidentaux convoquèrent une grande conférence internationale sur l'Afghanistan, qui se réunit à Bonn le 5 décembre. Là, devant le monde entier, ils firent trois grandes promesses. Premièrement, celle de reconstruire le pays. Deuxièmement, celle de le «démocratiser». Troisièmement, celle de le développer économiquement. Le tandem de cohabitation Chirac-Védrine ne trouva rien à redire à ce projet un tantinet démesuré, rappelant la «mission civilisatrice de la colonisation» chère à Jules Ferry.
À Bonn, la décision fut prise que l'Otan deviendrait le principal acteur de cette opération de nation building. C'est dans ce cadre que la France commença à envoyer des soldats à Kaboul à partir de 2002, époque alors extrêmement calme en Afghanistan.
400 milliards de dollars
Dix ans plus tard, où en est-on de la reconstruction, de la démocratisation et du développement économique ? Dépensant quelque 400 milliards de dollars (en additionnant dépenses militaires et civiles), la communauté internationale n'a pas lésiné sur les moyens. Elle a commencé par doter le pays d'une belle grande route circulaire et d'efficaces réseaux de téléphones portables. Le fait qu'en province les talibans interrompent désormais à leur guise la circulation sur l'une comme sur les autres symbolise tout le problème afghan. Sans sécurité, il n'est pas de reconstruction, de scolarisation, de démocratisation, de développement économique qui tiennent.
Or les Occidentaux n'ont pas réussi à ramener la sécurité dans le pays, après qu'une insurrection eut gangrené le pays à partir de 2005. Ce réveil des talibans s'appuie sur deux grands atouts : un discours simple - «chassons ces soldats étrangers de chez nous» - alimenté par les inévitables bavures militaires occidentales, et le territoire pakistanais comme sanctuaire stratégique.
Face à ce défi, la classique stratégie anti-insurrectionnelle a échoué. Faute de proximité culturelle, l'Otan n'a réussi ni à conquérir les cœurs et les esprits de la population rurale, ni à convaincre l'entourage du président Karzaï de renoncer à la corruption, ni même à former une armée afghane capable de se battre toute seule. Aujourd'hui, même la vieille stratégie de sortie du «Declare victory and run» n'est plus possible pour l'Otan en Afghanistan. Le figaro
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