La ministre de l'Economie était la grande favorite à la succession de Dominique Strauss-Kahn. Ses chantiers sont énormes. A Paris, son d...
La ministre de l'Economie était la grande favorite à la succession de Dominique Strauss-Kahn. Ses chantiers sont énormes. A Paris, son départ implique un remaniement éclair du gouvernement.
Christine Lagarde, 55 ans, a été nommée mardi 28 juin directrice du Fonds monétaire international.
Le magazine Forbes, qui en a fait l'année dernière la dix-septième femme la plus puissante du monde, devra sans doute réviser son classement : après avoir été la première présidente du gros cabinet d'avocats américain Baker & McKenzie, après avoir tenu plus de quatre ans à Bercy (quand sept ministres s'y étaient succédé en sept ans), la ministre est donc la première femme à assurer la direction de l'un des organismes internationaux les plus prestigieux, et cela à l'un des moments les plus forts de son histoire, au sortir de l'une des plus graves récessions mondiales, et à la suite de la défection brutale de son compatriote Dominique Strauss-Kahn.
La dernière inconnue majeure était la position des Etats-Unis, demeurés jusqu'à mardi neutre sur la question. Mais le secrétaire aux Trésor Timothy Geithner a exprimé mardi le choix des Etats-Unis, en annonçant que Washington soutenait Christine Lagarde, saluant son « talent exceptionnel » et sa « grande expérience ». Dès lors, les jeux étaient faits. Répartis au prorata des contributions au FMI, les droits de vote au conseil d'administration donnaient largement l'avantage à la Française : l'Europe en détient 40%, les Etats-Unis 17% et la Chine, la Russie et le Brésil, trois fortes composantes des BRIC, avaient déjà annoncé plus ou moins explicitement leur ralliement.
Moins de libido, plus de négociation
Née le 1er janvier 1956 à Paris de parents enseignants, Christine Lagarde est diplômée en sciences politiques, titulaire d'une maîtrise d'anglais et d'un diplôme de droit social et de la concurrence. Ses proches vantent sa «culture de la négociation multilatérale» et ses «réseaux». Elle explique que les femmes «projettent moins de libido, moins de testostérone» en politique. «Cela aide» de ne «pas nécessairement investir nos egos dans une négociation», disait-elle en octobre 2010 à la chaîne américaine ABC. Pour cette ancienne championne de natation synchronisée, mère de deux enfants, les débuts dans l'arène politique française n'ont toutefois pas été sans couac. Fraîchement débarquée de Chicago en juin 2005 pour rejoindre le gouvernement d'alors au Commerce extérieur, elle avait été rappelée à l'ordre pour avoir critiqué le droit social français -protecteur du salarié-, des propos trahissant une sensibilité libérale très américaine. Elu président, Nicolas Sarkozy la fait monter en grade en juin 2007: après un passage éclair à l'Agriculture, elle devient la première femme ministre de l'Economie et des Finances.
Les chantiers qui attendent la Française sont énormes. La crise de 2008 est loin d'être résorbée dans toutes ses composantes, et l'Europe en est le terrain d'application le plus éloquent : crise de la dette, croissance, atone, chômage fort, le vieux continent cumule les problèmes. Il est surtout, à très courte échéance, le lieu de l'urgence, avec la crise grecque. Les Européens, qui attendent le vote d'un nouveau plan de rigueur à Athènes, auront besoin du concours du FMI, en termes financier et de compétence. Quelle sera la position de Christine Lagarde sur ce premier dossier chaud ? Pendant sa campagne, la ministre a semblé se faire l'avocate d'un «libéralisme tempéré». «Le libéralisme est une affaire de règles bien appliquées», aime-t-elle théoriser.
Si elle se situe à mi-chemin entre les défenseurs d'une dérégulation totale et ceux d'une économie ultra-réglementée, elle devra aussi appliquer ce tempérament aux autres gros dossiers du FMI : gouvernance mondiale, régulation monétaire et financière, harmonisation des politiques commerciales internationales. Enfin, les pays émergents, qui ont dû à nouveau passé leur tour, devraient se charger de mettre la pression sur la nouvelle directrice pour une réforme de l'institution FMI elle-même.source: les échos
COMMENTAIRES