Quand la méchanceté de nos ennemis sert de tremplin à notre réussite : le cas du prophète Youssouf, que la paix d’Allah soit sur lui. Le destin pol...
Quand la méchanceté de nos ennemis sert de tremplin à notre réussite: le cas du prophète Youssouf, que la paix d’Allah soit sur lui
La pose d’une demi-journée de RTT hier m’a permis d’accomplir la prière de vendredi à la Grande Mosquée de Lyon. L’Imam a rappelé lors de son prêche que le jeûne de Achoura est une pratique surérogatoire instituée par le Prophète Mouhammad, paix et bénédiction sur lui, pour exprimer la reconnaissance des croyants envers le Seigneur pour avoir sauvé le prophète Moussa et son peuple ce jour-là, dixième jour du mois de Mouharram, des griffes de Pharaon.
Avant l’arrivée du Khatub, les hauts parleurs diffusaient la sourate Youssouf. Était-ce un pur hasard ? Peut-être ! En tout cas, ces 2 évènements, tels qu’ils se sont l’enchainés, résument parfaitement le séjour en Egypte des Hébreux, ce peuple que le Coran désigne par Banou Israïl . Le prophète Youssouf est à l’origine de l’installation des Hébreux en Egypte lorsque, devenu ministre des finances et de l’économie de cette superpuissance de l’époque, il fit venir de Canaan, plus précisément de Galilée qui constitue aujourd’hui le nord de l’Etat d’Israël, son père le prophète Yacoub, sa mère et ses frères. Les Banu Israïl, autrement dit les fils d’Israïl, autre prénom de Yacoub, sont issus de Youssouf et de ses 11 frères.
Youssouf, cet immigré arrivé en Egypte comme enfant vendu par le caravanier qui l’avait recueilli dans un puits dans le désert syrien, prit en charge les deniers de la plus grande puissance économique et politique de l’époque puis accéda à la fonction suprême de Roi d’Egypte.
Le destin politique exceptionnel Youssouf, prophète d’origine cananéenne devenu roi dans un pays étranger habité par des païens, préfigure en quelque sorte la fulgurante ascension politique …du Premier ministre du Royaume-Uni Rishi Sunak, un homme de confession hindoue et descendant d’immigrés indiens qui est devenu chef du gouvernement dans un pays européen dont la majorité de la population est de religion anglicane.
Par quel miracle un cananéen de religion monothéiste est devenu l’argentier puis le roi d’un pays qui ne l’a pas vu naître et qui est de surcroit versé dans le polythéisme ? Curieusement c’est la jalousie et la méchanceté de ses 10 demi-frères qui l’ont propulsé à ces hautes responsabilités politiques. En effet, ces derniers avaient décidé de séparer à jamais leur père de son fils préféré afin de capter l’amour paternel. Ils avaient projeté dans un premier temps de l’égorger mais au moment de passer à l’acte un des comploteurs dissuada ses frères de l’égorger et leur suggérer de le jeter dans un puits. A mon avis, ce n’est pas par une quelconque bienveillance qu’ils ont opté pour ce choix. Je pense qu’ils voulaient que le petit Youssouf passe l’arme à gauche mais n’avaient pas le courage d’assister à son agonie.
Et surtout ils craignaient que le sang de la victime sur leurs corps et sur leurs habits les trahisse. Ils pensaient qu’ils pouvaient parvenir au même résultat macabre en le jetant dans un puits « aux profondeurs invisibles » (verset 15 Sourate Youssouf). Il y avait une très forte probabilité que dans sa chute Youssouf se blesse à la tête et succombe à ses blessures ou tout simplement qu’il se noie. Dans tous les cas, c’était un assassinat qui n’aurait pas laissé de traces. Le plus malin des 10 demi-frères envisagea aussi la possibilité que le petit Youssouf survive et soit recueilli par un caravanier (verset 10 Sourate Youssouf). Le sort de celui qu’ils haïssaient à mort, lorsque par miracle il s’en sortait, ne fit l’objet d’aucun doute : Youssouf serait conduit dans un pays étranger, loin, très loin des yeux de ce père dont ils voulaient monopoliser l’amour.
Youssouf fut recueilli par un caravanier qui le vendit comme esclave à Putiphar, Grand Intendant d’Egypte.
Le jeune Youssouf fut jeté injustement en prison à l’instigation de Zoulikha, épouse du Grand Intendant qui le voulait se venger de son refus de succomber à son charme.
Youssouf continue sa mission prophétique en prison comme le relate si bien la sourate Youssouf « Et j'ai suivi la religion de mes ancêtres, Abraham, Isaac et Jacob. Il ne nous convient pas d'associer à Allah quoi que ce soit. Ceci est une grâce d'Allah sur nous et sur tout le monde; mais la plupart des gens ne sont pas reconnaissants. »(verset 38). « Ô mes deux compagnons de prison! Qui est le meilleur : des Seigneurs éparpillés ou Allah, l'Unique, le Dominateur suprême? » (verset 39). « Vous n'adorez, en dehors de Lui, que des noms que vous avez inventés, vous et vos ancêtres, et à l'appui desquels Allah n'a fait descendre aucune preuve. Le pouvoir n'appartient qu'Allah. Il vous a commandé de n'adorer que Lui. Telle est la religion droite; mais la plupart des gens ne savent pas. »(verset 40).
Il se signala également auprès de ses codétenus par sa science de l’interprétation des rêves. C’est d’ailleurs cette expertise qui le fit sortir de prison. Il sut révéler à l’émissaire du roi, qu’il a connu en prison, la signification du songe où sept vaches très maigres mangent sept vaches grasses et où sept épis verts côtoient sept épis secs. Le roi d’Egypte demanda à rencontrer celui qui a pu interpréter sa vision que les notables égyptiens, pourtant réputés experts en interprétation des rêves, qualifièrent d’amas de rêves (mavoira). Après avoir été innocenté par les aveux de Zoulikha, le prophète Youssouf fut libéré de prison et présenté au roi qui décida de le nommer à un poste de haut rang « "Tu es dès aujourd'hui près de nous, en une position d'autorité et de confiance" » (verset 54 sourate Youssouf).
Youssouf demanda et obtint du roi un poste de hautes responsabilités, le ministère de l’économie et des finances « Et [Joseph] dit : "Assigne-moi les dépôts du territoire : je suis bon gardien et connaisseur".(verset 55 sourate Youssouf). Durant les sept années de prospérité prédites dans le rêve, Youssouf anticipa la gestion des sept années de sécheresse et de famine qui allaient suivre, donnant un sens concret à la maxime« Gouverner, c’est prévoir ». Il géra si bien les affaires qu’il y eut suffisamment de céréales pour nourrir l’Egypte et les pays voisins pendant les sept années de famine. Ses dix frères furent parmi les nombreux habitants de la région qui affluèrent en Egypte pour s’approvisionner en grain. Après qu’il s’est révélé auprès d’eux, il les pardonna, fit venir et installer toute sa famille en Egypte. Il y finira sa vie comme Roi d’Egypte.
Peut-être que Youssouf aurait mené une vie de berger à Canaan comme son père et n’aurait jamais atteint les cimes du pouvoir politique si ces demi-frères n’avaient pas ourdi un complot contre lui. Comme quoi la méchanceté de nos ennemis peut servir de tremplin à notre réussite.
Abdourahamane Cheikh Ali
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