Le Juge de l’Exécution ou la Nécessité d’une Justice Effective Rien n’est plus frustrant pour un justiciable que d’avoir eu gain de cause lo...
Rien n’est plus frustrant pour un justiciable que d’avoir eu gain de cause lors d’une longue et coûteuse procédure judiciaire et de ne pas pouvoir exécuter la décision du juge. Il arrive souvent que le justiciable comorien connaisse des difficultés dans ses prétentions à vouloir faire exécuter une décision judiciaire qui lui est totalement acquise.
Il est contraint de commencer un autre périple judiciaire devant mobiliser le ministère d’un huissier de justice et pouvant, le cas échéant, le conduire à nouveau devant le tribunal. C’est ce qu’on appelle communément le contentieux de l’exécution.
En pareilles circonstances, le juge compétent est le juge de l’exécution. Celui-ci connait des difficultés d’exécution relatives aux titres exécutoires dont des décisions juridictionnelles et des contestations qui s’élèvent à l’occasion de l’exécution forcée. Il autorise aussi les mesures conservatoires et connait des contestations relatives à leur mise en œuvre.
Il statue également sur les procédures de saisie et les contestations qui s’élèvent à l’occasion de celles-ci.
Aux Comores, la législation applicable en la matière est aujourd’hui l’Acte uniforme de l’Organisation pour l’Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires(OHADA). C’est ce qui résulte de l’article 971 du code de procédure civile comorien qui prévoit que les voies d’exécution sont régies par les dispositions des articles 28 à 338 de l’Acte Uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution. Cet acte s’avère indispensable en raison du caractère obsolète de la législation nationale et pourrait rassurer les créanciers et favoriser le crédit auprès des établissements bancaires et financiers.
Logiquement et sauf dérogation, c’est le président du Tribunal de Première Instance qui est le seul juge de l’exécution. Surtout si on s’en tient l’article 972 du code de procédure civile qui revoie le cas à l’article 49 de l’Acte Uniforme régissant les voies d’exécution. Celui-ci prévoit clairement que le juge compétent en matière d’exécution est le président du tribunal en ce qu’elle précise que la juridiction compétente pour statuer sur tout litige ou toute demande relative à une mesure d’exécution forcée ou à une saisie conservatoire est le président de la juridiction statuant en matière d’urgence ou le magistrat délégué par lui.
Les décisions rendues en matière d’exécution sont susceptible d’appel. Cet appel doit être relevé dans un délai de 15 jours, non pas dès la signification de la décision, mais à compter de son prononcé. L’article 49 de l’Acte uniforme de l’OHADA portant voie d’exécution dit clairement que le délai d’appel comme l’exercice de cette voie de recours n’ont pas un caractère suspensif.
Il faut dire que les compétences de l’exécution sont un peu éparpillées. Car dans la pratique, il arrive que d’autres juges s’arrogent cette compétence et statuent sur des différends qui se rapportent à une mesure d’exécution.
Il n’est d’aucun intérêt de gagner une procédure judiciaire si au final celle-ci n’est pas assurée d’être exécutée.
Pour une bonne justice effective et compte tenu de l’étendue et de la complexité du contentieux de l’exécution, le président du tribunal, en sa qualité de juge de l’exécution, devrait penser à déléguer son pouvoir et à renvoyer à une formation collégiale en lieu et place du juge unique.
Abdou elwahab Moussa
Docteur en Droit
Maitre de conférences à l’Université des Comores
Avocat au Barreau de Moroni
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