Oui pour l’émergence des Comores à l’horizon 2030. Ce n’est ni un problème pour la population ni un danger pour le peuple comorien. Mais ...
Oui pour l’émergence des Comores à l’horizon 2030. Ce n’est ni un problème pour la population ni un danger pour le peuple comorien. Mais plusieurs interrogations intellectuelles et de connaissances auxquelles nous devons des réponses, me reviennent continuellement à l’esprit quant à l’idéologie sur « l’émergence des Comores à l’horizon 2030 ». En effet, comme toutes orientations, capes, et autres, pour y parvenir beaucoup de structures, éléments, ressources et moyens sont nécessaires et indispensables.
Des institutions solides sont les premiers piliers pour espérer des projets à cour, moyen et/ou long terme. Des ressources humaines gestionnaires, intellectuelles, patriotes, qui ont des connaissances variées, et dotées de moyens juridiques non empruntés mais adaptés à la société et à la réalité des comoriens, pourront, avec le strict respect de la réglementation, conduire le pays vers la cape fixé. Des ressources financières propres ou obtenues à travers des dons ou des partenariats, gérées et affectées de manière transparente aux destinations prévues, permettront la mise en œuvre concrète et efficace des projets.
Or des indices négatifs prouvent que « l’émergence » prônée par Azali Assoumani, est un rêve sans lendemain. Commençons par les institutions et l’administration. Presque 20 mois, plus précisément le 12 avril 2018, après son élection à la magistrature suprême de l’Etat en 2016, Azali Assoumani a, par décret, supprimé une institution constitutionnelle (La Cour constitutionnelle) instituée par la loi fondamentale (constitution). Il a ensuite, sans la moindre pensée au peuple comorien, supprimé la commission anticorruption, une commission instituée par une loi. Jusque-là la hiérarchie des normes n’est pas respectée.
Et puis, il a fait de notre patrimoine commun un bien familial et partisan : toutes hautes fonctions de l’Etat sont soit confiées à des membres de sa famille, soit à des amis ou des natifs de son village natal, et le personnel de l’administration centrale et insulaire y compris les sociétés d’Etat est contraint à adhérer à la « convention pour le renouveau des Comores » (CRC) sous peine, d’une part, de sanctions administratives pour certains et, d’autres part, judiciaires pour d’autres. On ne peut pas mettre de côté les licenciements abusifs dont sont victimes plus de 1500 jeunes comoriens. En fin, entre-temps beaucoup d’actes horribles et situations délicates se sont produits sans que, d’une part, aucune information judiciaire ne soit ouverte et, d’autre part, aucune solution n’y soit apportée.
Commençons par les décès, je pense aux personnes retrouvées mortes à Moroni Bacha, Moroni près de l’ancien conseil de l’île de Ngazidja, Voidjou, Ntsoudjini, Mbadjini, et celles tuées à Iconi et Kandani et j’en passe. Ensuite, il y a les affaires, je pense aux incendies à la trésorerie publique, à la CENI, à la banque de développement ; on ne peut pas mettre de côté les affaires des « clous », « de la tentative de coup d’Etat » et la « Médina de Mutsamudu ». Aucun de ces actes n’aurait été élucidé. Certes, des procès ont eu lieu, des décisions ont été rendues, et des grâces ont été accordées par le chef de l’Etat. Mais on peut s’interroger sur le processus des enquêtes, sur le déroulement même des procès et sur les grâces. Il est scientifiquement et juridiquement incompréhensible que des militaires se permettent de travailler sur une scène de crime.
Cela remet absolument en cause l’enquête. Je pense aux affaires « des clous » et de la « Médina » où des militaires se sont autorisés à ramasser les clous et à toucher « les armes utilisées ». C’est le travail des polices scientifique et judiciaire. Les personnes graciées sont les personnes issues de ses affaires ; quelle coïncidence ! Quant à l’affaire du gendarme dont la main est coupée, c’est encore pire, deux autorités dont un ministre de l’actuel gouvernement d’Azali, ont publiquement témoigné avoir vu les auteurs. Aucune des deux n’a été entendue pour l’enquête. Lors des procès certains des présumés auteurs auraient été empêchés de parler par le président de la Cour. La locataire de Mrodjou a, en 2016, dit avoir des preuves sur 14 milliards que Azali Assumani a déposé dans des comptes bancaires à l’étranger. Le cadeau donné par l’accusé c’est de la désigner gouverneure de Ngazidja.
Les situations administrative, juridique et judiciaire et institutionnelle doivent inquiéter ceux et celles qui ont confiance en eux et qui croient en la concurrence intellectuelle et des connaissances. Nous devons, par exemple, disputer un emploi par nos connaissances pour avoir un travail et un poste, et non par des relations fraternelles, amicales et/ ou politiques. Cela enfreint les règles qui sont communes. Le respect rigoureux par nos administrateurs, nos autorités administratives et judiciaires de la règlementation en vigueur en Union des Comores est la seule et unique arme qui fera de notre pays un pays émergent.
Or l’avenir de notre pays est dessiné par les actes et décisions illégitimes et illégaux pris par les autorités en place. Comment peut-on croire en l’émergence alors que toutes ces décisions sont prises au détriment du peuple comorien ? Vous qui chantez « l’émergence à l’horizon 2030 », quel sens donnez-vous à la suppression par Azali Assoumani de la commission anticorruption ? Quel sens donnez-vous aux ordonnances prises pour des questions électorales et non pour des questions sociales ou économiques ? Quel sens donnez-vous aux licenciements abusifs de plus 1500 jeunes au profit de l’augmentation du salaire du chef de l’Etat et de ses ministres ?
D’ailleurs, il est à vous rappeler que l’Etat fonctionne depuis bientôt un an sans loi de finances. Ce qui est synonymes à utiliser notre argent à leur guise. C’est-à-dire personne ne sait combien entre ni sort ni d’où vient ou va l’argent public. En outre, dans la loi prêtée les ordonnances est un texte législatif émanant de l’exécutif. C’est-à-dire le chef de l’Etat est habilité par le parlement à prendre des mesures dans des domaines juridiques relevant de l’assemblée nationale. Cette habilitation fixe une date butoir pour qu’un projet de loi de ratification soit déposé à l’assemblée nationale. Tant que ce projet de loi de ratification n’a pas été adopté par celle -ci, les ordonnances deviennent alors caduques. C’est-à-dire l’état du droit antérieur est rétabli.
Or le projet de loi de ratification des ordonnances prises suite au projet de loi voté récemment de manière controversée par l’assemblée nationale pour autoriser le chef de l’Etat à prendre des mesures relatives aux prochaines législatives, n’est pas ratifié. Cela, en plus de « l’article 66 de la constitution de juillet 2018 » bafoué, mettent en cause la crédibilité des prochaines législatives. Il est dit dans cet article que la prochaine législature sera composée des représentants élus en Union des Comores et ceux élus par les comoriens de l’étranger. Qui va d’ailleurs financer les campagnes électorales des prochaines législatives des candidats issus des partis politiques qui n’ont pas d’adhérents, donc pas de cotisation, particulièrement « la mouvance présidentielle » ?
En conséquence, il n’y a jamais eu dans le monde un pays émergent sans stabilité politique, économique et institutionnelle. Pour devenir émergent, un pays doit investir. Les investissements peuvent provenir des investisseurs nationaux et /ou internationaux. Et aucun investisseur d’une bonne renommée et digne de son nom ne peut se permettre d’investir dans un pays où la sécurité juridique est en permanence bafouée. Je crois qu’en l’occurrence seules des autorités semblables aux nôtres pourraient se hasarder dans une telle aventure dans un but, bien sûr, autre que celui d’intérêt général. Nombreux parmi vous qui chantez « l’émergence à l’horizon 2030 » sont économistes, financiers, administrateurs, « vaillants juristes » et autres. Pourriez-vous, selon la situation qui prévaut dans notre pays aujourd’hui, prouver de manière la plus neutre possible avec une argumentation économique, financière et juridique la possibilité de faire de notre pays un pays émergent à l’horizon 2030 ?
Mohamed ISMAILA
COMMENTAIRES