Loi d’habilitation Interview avec Ahmadou MZE SOILIHI, Vice-président du parti politique Badili Comores La balle est dans le camp d...
Interview avec Ahmadou MZE SOILIHI, Vice-président du parti politique Badili Comores
La balle est dans le camp des députés pour rejeter une nième violation constitutionnelle, redonner au pays sa dignité et sa souveraineté.
Habari za Comores : Une loi dite d’habilitation crée une controverse au sein de l’hémicycle. Qu’elle est votre point de vue ?
VP Badili Comores : Comme le nom l’indique, il s’agit d’habiliter l’exécutif pendant une durée limitée la possibilité de légiférer par ordonnance sur des mesures qui relèvent de la loi. Le Gouvernement voudrait faire des ordonnances pour « récrire le code électoral », organiser « l’élections de l’union au suffrage universel direct à 2 tours », établir « le mode de désignation et de nomination des démembrements de la CENI » et décider de « la gestion du contentieux électoral par la Cour Suprême ». En France, pays où l’on puise notre inspiration en matière de droit positif, la loi d’habilitation est utilisée rarement.
Elle porte souvent sur des sujets relevant de l’amélioration de la vie courante comme la loi d’habilitation pour le renforcement du dialogue social ou la loi d’habilitation de simplification du droit et des procédures (loi Tobira) ou dernièrement, avec Macron, la loi portant sur le code du travail…Et en aucun moment un gouvernement français ou comorien n’a usé de cette loi pour légiférer en matière électorale ou de jugement du contentieux électoral. Puisque, naturellement ces deux domaines relevant de la souveraineté du peuple ne peuvent être traitée par ordonnance. C’est inacceptable qu’on cherche à être juge et partie.
Habari za Comores : Est-ce qu’il y a eu un précédent dans le fonctionnement de nos institutions ?
VP Badili Comores : Oui il y a eu un précédent mais ce n’était pas tout à fait pareil : Sous le président Ahmed Abdallah Sambi, il y a eu recours à une série d’ordonnances portant « application de certaines dispositions de la loi référendaire » pour déterminer les champs de compétences des gouvernorats et des conseils des îles,en attendant le vote de la loi statutaire des îles.
A l’époque, Mohamed Abdouloihab se déclarait toujours « Président tant que la loi statutaire de Ngazidja ne sera pas élaborée et adoptée par les Wangazidja », disait-il…L’on se rappelle des conflits politiques ayant opposés Mohamed Abdouloihab et le Président Sambi, ce dernier ayant décidé d’harmoniser toutes les élections pour sortir le pays du cycle infernal d’élection tous les ans.
A l’époque, Mohamed Abdouloihab se déclarait toujours « Président tant que la loi statutaire de Ngazidja ne sera pas élaborée et adoptée par les Wangazidja », disait-il…L’on se rappelle des conflits politiques ayant opposés Mohamed Abdouloihab et le Président Sambi, ce dernier ayant décidé d’harmoniser toutes les élections pour sortir le pays du cycle infernal d’élection tous les ans.
Habari za Comores : Ce n’est donc pas illégal que le Président utilise cette loi !
VP Badili Comores : C’est illégal dans le sens où le président ne dispose pas de majorité parlementaire pour légiférer par ordonnance. Si la loi d’habilitation exige l’aval de l’assemblée cela sous-entend que cette loi est réservée à priori aux exécutifs qui disposent d’une majorité parlementaire. Et vouloir l’adopter par la force cela revient à violer nième fois la constitution.
Sous Sambi et autres cas français cités plus haut furent été possibles pour cette raison et encore… Ensuite, les domaines où le Président souhaite légiférer relèvent de la pure souveraineté du peuple puisqu’il s’agit du code électoral, des démembrements de la CENI, du contentieux électoral et l’organisation de toutes les prochaines élections.
Sous Sambi et autres cas français cités plus haut furent été possibles pour cette raison et encore… Ensuite, les domaines où le Président souhaite légiférer relèvent de la pure souveraineté du peuple puisqu’il s’agit du code électoral, des démembrements de la CENI, du contentieux électoral et l’organisation de toutes les prochaines élections.
Ce sont des domaines très sensibles qui nécessitent un consensus national, surtout dans une période où la confiance entre le Président et son peuple est rompue. Pire, à ce jour, aucun député ne sait quel sera le contenu de ces ordonnances. Et l’on voudrait qu’il donne habilitation au Président d’ordonner ?
Habari za Comores : Ne pensez-vous pas que nous risquons d’entrer dans une nouvelle crise si cette loi d’habilitation n’est pas adoptée ?
VP Badili Comores : Nous sommes déjà dans une crise profonde dont la responsabilité revient au Chef de l’Etat, celui-ci laissant très peu de marge de manœuvre au dialogue national pour réconcilier les divergences. Il faut maintenant penser à en sortir. Le dialogue inter-comorien est mort-né sans véritable consensus ni avec les premiers interlocuteurs de l’union de l’opposition ni avec les seconds interlocuteurs dont le mouvement Badili Comores en faisait partie. Et pourtant, ce mouvement a montré sa volonté, sur la base de propositions de sortie de crise, d’adopter une nouvelle approche pragmatique, consensuelle et réaliste, en opposition aux méthodes utilisées par l’union de l’opposition.
Hélas, l’agenda électoral a pris le dessus sur les mesures d’apaisement, de sécurisation des élections, d’amendement constitutionnel pour garantir l’indépendance de la justice, la garantie des libertés individuelles et collectives, la lutte contre la corruption, les contre-pouvoirs nécessaires, l’autonomie des îles, la tournante et j’en pass...
La loi d’habilitation vient enfoncer leclou d’une crise déjà tendue. Les témoignages des députés sur le spectacle déshonorant qui s’est déroulé lundi dernier à l’assemblée nationale sont l’illustration d’une profonde crise institutionnelle. L’exécutif se permet de bloquer la séance plénière et de recourir à une tentative de corruption des députés à l’intérieur de l’hémicycle au grand dam de l’opinion, sans le moindre gène. Dans quel pays nous vivons ?
Habari za Comores : Le ministre de l’intérieur disait hier sur les ondes ORTC qu’il s’agit d’une adaptation de la loi électorale à la nouvelle constitution adoptée le 30 juillet.
VP Badili Comores : Une adaptation ? Et pourquoi dans l’exposé des motifs présenté à l’assemblée nationale l’on parle de « réécrire le code électoral » ou encore de « gérer le contentieux électoral » ? C’est une ruse mais en réalité le code électoral sera revu en long et en large, notamment pour redéfinir le redécoupage des nouvelles circonscriptions y compris celles de la diaspora et le démembrement de la CENI au niveau consulaire en France. Comment pouvons-nous être rassurés d’un contentieux électoral équitable quand l’on sait que tous les juges de Cour Suprême seront nommés par le chef de l’Etat ? Toutes ces questions méritent un débat à l’assemblée nationale. C’est le sens de la démocratie.
Habari za Comores : Avez-vous un message à adresser aux députés ?
VP Badili Comores : Les députés sont les représentants du peuple et de ce fait, ils sont censés être à l’écoute de la nation en plaçant toujours le curseur là où se trouvent les intérêts supérieurs du pays. Ils doivent tous tirer les leçons des derniers évènements dramatiques, qui ne sont autres que les conséquences d’un grand sentiment d’injustice et de mépris des lois qui existent depuis toujours et qui se sont aggravés ces dernières années…
Dans son rôle, le pouvoir législatif est un pouvoir intermédiaire entre l’exécutif et le législatif dans la mesure où il a le pouvoir de voter des lois, d’enquêter pour rétablir la vérité, d’alerter, de surveiller les deux autres pouvoir...A plusieurs reprises ils ont manqué des rendez-vous historiques. La balle est maintenant dans le camp des députés pour rejeter une tentative de violation constitutionnelle, redonner ou au pays sa dignité et sa souveraineté.
Dans son rôle, le pouvoir législatif est un pouvoir intermédiaire entre l’exécutif et le législatif dans la mesure où il a le pouvoir de voter des lois, d’enquêter pour rétablir la vérité, d’alerter, de surveiller les deux autres pouvoir...A plusieurs reprises ils ont manqué des rendez-vous historiques. La balle est maintenant dans le camp des députés pour rejeter une tentative de violation constitutionnelle, redonner ou au pays sa dignité et sa souveraineté.
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