Il y a bientôt 20 ans, Azali Assoumani, en pleine crise séparatiste, a orchestré un coup d’Etat pour prendre le pouvoir en Union des Comore...
Il y a bientôt 20 ans, Azali Assoumani, en pleine crise séparatiste, a orchestré un coup d’Etat pour prendre le pouvoir en Union des Comores et l’occuper jusqu’en mai 2006.
Durant toute cette période de tyrannie d’usurpation, car sans aucune légitimité, Monsieur Azali s’est montré incapable de vaincre le séparatisme et imposer la République. Cependant il a réussi à amoindrir sa force en proposant aux Comoriens un modèle de pouvoir tournant. Atypique et inefficace certes, mais ce modèle a apporté une stabilité relative si l’on peut se permettre de rappeler au passage que le débarquement de mars 2008 a été décisif dans l’effectivité des accords de Fomboni.
Le bilan de cette période a été plus que mitigé. Les hués essuyés par l’ancien chef d’état-major, lors de l’investiture de son successeur, Ahmed Abdallah Mohamed Sambi, e mai 2006, a été le signe de 7 ans de lassitude et d’immobilisme.
Sauf qu’à l’élection présidentielle de 2016, pour la seconde tournante de Ngazidja, à défaut d’une offre politique nouvelle et à cause du rejet total du régime amorphe d’Ikililou Dhoinine qui avait démontré son incapacité à gouverner et à habiter les fonctions du chef de l’Etat, Azali Assoumani s’est trouvé propulsé au-devant de la scène.
Arrivé en troisième position derrière Mohamed Ali Soilihi, le ténor du régime d’Ikililou, et Mouigni Baraka Said Soilihi, le voisin ennemi du candidat Juwa, Fahmi Said Ibrahim, le colonel Azali en a profité pour arriver à nouveau au pouvoir par les urnes à l’issue d’un troisième tour inédit.
Surprise générale, au lieu de tirer les leçons du passé et ouvrer résolument pour le développement des Comores et la consolidation de la stabilité retrouvée, le chef de la CRC se révèle non seulement à l’usage bien ingrat du mandat du peuple, mais aussi se transforme en tyran d’exercice.
Autoritaire, démophobe, démagogue cherchant à imposer sa volonté et ses propres intérêts contre les lois, les institutions et le bien commun. Voilà ce qu’est devenu M. Azali deux ans après son élection. Même la religion, un domaine sacré pour le Comorien, il en a cure. Par la complicité d’un clan d’imams politisés et dans l’indifférence totale d’un mutorat renonciateur, il l’instrumentalise, la privatise pour s’approprier le mérite et accaparer les honneurs.
La question aujourd’hui est de savoir si les Comoriens, toutes catégories confondues, et la communauté internationale vont rester indifférents à observer ce dérapage conduire le pays vers la pente glissante.
En ce qui concerne le peuple comorien, il a déjà pris ses distances avec le président Azali. Ce dernier a image péjorative de son peuple, croyant subir son ingratitude. Les manifestations éparpillées partout dans le pays, les défiances auxquelles le gouvernement fait face, l’unité des oppositions, la désapprobation du vice-président… tout cela démontre bien le réveil amorcé.
Les Comoriens ne réclament du président qu’ils ont élu il y a deux ans ni plus ni moins que le respect de la loi fondamentale du pays, la séparation du pouvoir judiciaire du pouvoir exécutif et la garantie des libertés les plus élémentaires.
Oui les Comoriens sont ravis, entre autres, du rétablissement de l’électricité après plusieurs années de délestages, reconnaissent les efforts du gouvernement pour la régularité des salaires, espèrent la reconstruction de l’hôpital El-Marrouf et le développement des secteurs porteurs et créateurs d’emplois. Mais ces mêmes comoriens ne tolèrent plus le retour en arrière et les crises politico-institutionnelles à répétition. Or le logiciel d’Azali qui produit son algorithme semble daté du moyen âge. Il avait cru qu’avec son miroir aux alouettes d’émergence, il allait embarquer tout le monde dans son marigot central, s’ériger en dirigeant hors-norme et s’offrir une virginité politique.
Les Comoriens réalisent depuis peu de temps que la politique comorienne n’est pas la recherche de l’intérêt général. Les réalités vécues ont réussi à balayer toutes les prétentions. Voilà ce qui fera sans doute échec à l’esprit tyrannique d’Azali et à la réflexion médiévale que son esprit développe depuis quelques mois.
Je conseillerai au président d’avoir comme seule boussole l’intérêt des Comores et des Comoriens, d’arrêter d’écouter les courtisans. Sinon, il apprendra à ses dépens que la courtisanerie a conduit au travers bien des politiques.
Paru dans le quotidien Massiwa ce mardi
Par Ali Mmadi