Monsieur le Président, En tant que comorien, en tant qu'ancien serviteur de mon pays comme enseignant et comme responsable de l...
Monsieur le Président,
En tant que comorien, en tant qu'ancien serviteur de mon pays comme enseignant et comme responsable de l'Education Nationale du temps de la révolution soilihienne, initiateur et animateur du parti Ridja dans sa première phase, président du Collectif pour l'Unité et l'Intégrité territoriale des Comores, membre actif il y a quelques mois, à Moroni, du Collectif du 11 août réclamant des Assises Nationales pour ouvrir un débat sur les voies et moyens de notre devenir, je me permets de vous féliciter, de vous parler objectivement de notre pays et d'implorer Le Tout Puissant pour faire de votre gouvernance celle qui nous débarrassera des freins au développement. Car il est illusoire de croire qu' en cinq ans, il soit possible de mener une politique de réussite du développement aux Comores sans l'essentiel préalable d'une lutte sans merci contre nos freins structurels.
D'abord, monsieur le Président, vous héritez d'un pays exsangue. Un pays "souffre-douleur" dont les premiers pas de souveraineté s'imprimèrent dans un contexte d'extrême déstabilisation avec la prise en tribut de l'île comorienne de Mayotte par le colonisateur et l'irruption d'une force révolutionnaire, certes détentrice d'une vision de développement pour préparer l'avenir, mais une vision irrémédiablement en opposition avec le vécu culturel ancestral d'une société recroquevillée sur elle-même, dont le village, même jusqu'à présent, reste le référent omnipotent de tout ce que la vie de l'individu a d'essentiel. Un contexte écrasé par les bottes du mercenariat international, dans l'humiliation, le sang, jusqu'à la descente aux enfers illustrée par l'élimination physique de deux présidents. Et tout cela sans aucun sursaut salutaire.
Le peuple comorien, comme tous les peuples au travers de toute l'histoire de l'humanité, a besoin, monsieur le président, de repères, de facteurs d'incitation pour évoluer, de l'exemplarité de ceux qui incarnent le pouvoir pour modifier ses comportements et être en conformité avec les valeurs qu'imposent les réalités du monde d'aujourd'hui. Même si les pesanteurs inhérentes à tout contexte social soumis à une longue et féroce déstabilisation restent toujours tenaces, nos gouvernances ont cependant lourdement péché par leur cécité dans la négligence systématique de ce qui pourtant constitue le primat de notre développement, en l'occurrence la mise a priori en valeur de notre potentiel naturel (foncier, pêche, élevage, tourisme). Des gouvernances qui se sont fourvoyées dans des politiques de colonisation interne, secrétant des cassures sociales nouvelles, et ne survivant que par des aides extérieures souvent détournées qui, à la longue, deviennent purement et simplement de la mendicité.
Votre retour au Pouvoir Suprême, voulu crânement par le peuple comorien dans la globalité des trois îles qui ont voté, fait de vous une sorte de messie. L'échec vous est interdit. Mais cinq ans c'est court pour faire sortir du gouffre un pays dont les difficultés paraissent insurmontables tant on les a laissées s'accumuler et devenir structurelles. Une lutte acharnée contre la corruption et les détournements des fonds publics, un sens et une vision dans une politique d'exemplarité qui structure et suscite la prise de conscience de ce que nous sommes créeraient sans doute des bases suffisamment pérennes pour conditionner le progressif avènement d'une ère nouvelle porteuse d'espoir et de progrès. INCHALLAH.
Fundi Ali Mlamali