Il est très bien vu aux Comores de relever les carences nombreuses de la classe politique nationale des quarante dernières années. Une tell...
Il est très bien vu aux Comores de relever les carences nombreuses de la classe politique nationale des quarante dernières années. Une telle attitude reste, à bien des égards, fort légitime. Mais la rigueur intellectuelle impose également que l’on mette en valeur ses réussites et parmi lesquelles l’Université des Comores.
Cette institution, mise en place en 2003, fonctionnait jusqu’à récemment avec ordonnances et décrets présidentiels. Mais depuis juin 2014, l’assemblée nationale a voté une loi pour l’encadrer et depuis janvier 2015, de nouveaux statuts, conformes à loi nouvellement votée, ont été signés par le président de la République pour la renforcer. Mais ces textes n’ont pas miraculeusement réglé tous les problèmes de cette institution : gestion aléatoire des carrières des enseignants, administration bicéphale (la gestion de l’établissement est conjointement assurée par le président de l’institution et des personnes nommées le gouvernement), manque cruel de moyens
Photo ©HZK |
Et c’est là justement qu’on serait heureux d’entendre les différents candidats aux hautes fonctions de l’Etat comorien (président et gouverneur). Au lieu de vendre inutilement à la jeunesse comorienne des promesses auxquelles personne ne croit à commencer par eux-mêmes, ils feraient mieux de lui présenter des propositions capables de renforcer cet établissement : élection du président de l’institution (avec ou sans son cabinet) par tout son personnel, suppression de la gestion bicéphale (seul le Comptable pourrait être nommé par le politique), simplification du recrutement des enseignants et valorisation de leurs salaires (un enseignant-chercheur titulaire d’un doctorat gagne péniblement 250000 Fc !) et renforcement des moyens de l’établissement en vue de faciliter les conditions de travail de ses 10000 étudiants.
Oui. Nous serions enchantés que ces candidats nous disent comment gérer les flux toujours importants des étudiants, comment financer les études doctorales des futurs enseignants-chercheurs, comment diversifier l’offre de formation, comment proposer des formations professionnelles, comment rendre les formations adéquates au marché de l’emploi déjà saturé, comment trouver des emplois aux diplômés, comment rendre les sites accessibles aux étudiants, comment les alimenter en énergie, comment leur offrir des bibliothèques dignes de ce nom, comment leur accorder un environnement numérique, des restaurants universitaires, des amphithéâtres sonorisés ou tout simplement des toilettes.
En un mot comme en mille, on serait ravi que ces candidats disent à la jeunesse comorienne comment faire de cette institution un haut lieu démocratique de création et de transmission de savoir adapté au monde moderne, un lieu où formation rime avec emploi.
Nassurdine Ali Mhoumadi, docteur ès Lettres, essayiste, ancien enseignant à l’Université des Comores, est professeur de Lettres modernes dans la région lyonnaise.