Chaque semaine, des drames frappent les populations comorienne et française à chaque chavirement d’une embarcation de fortune dans le bras ...
Chaque semaine, des drames frappent les populations comorienne et française à chaque chavirement d’une embarcation de fortune dans le bras de mer qui sépare les îles d’Anjouan et de Mayotte. Ces accidents à répétition « acceptés » par les Comores et la France, marquent l’échec cuisant de la politique française de lutte contre « l’immigration clandestine » dans cette île de l’archipel, demeurée sous administration française à l’accession des Comores à l’indépendance le 6 juillet 1975.
Après des siècles de libre circulation entre les différentes îles des Comores, le gouvernement d’Edouard Balladur décidait, le 18 janvier 1995, d’instaurer un visa aux conditions draconiennes pour contrôler l’entrée des Comoriens sur le territoire de Mayotte. L'introduction de ce visa Balladur a interdit la libre circulation des personnes entre l'île de Mayotte et le reste de l'archipel des Comores. Ce sinistre visa qui vient de fêter ses 21 ans d’existence divise un archipel, un peuple, des familles et cause surtout la mort de plusieurs milliers de personnes. Cette semaine encore, des dizaines de personnes qui ont voulu se rendre à Mayotte en contournant ce visa, difficile à obtenir, ont péri dans le chavirement de leur bateau de fortune.
L’instauration de ce visa participait à la lutte contre ce que les français appellent « l’immigration clandestine ». Et pourtant, cette lutte engagée depuis près de deux décennies par le gouvernement français à Mayotte contre les mouvements de population entre Anjouan et Mayotte demeure un échec cuisant, un non-sens qui n'a fait que favoriser "l'immigration dite clandestine" et engendrer la mort de plusieurs milliers de personnes. Les chiffres parlent d'eux même : la population de Mayotte est passée de 130.000 habitants en 1997 à près 212 600 en 2012. Cette population a ainsi augmenté de 26 200 habitants depuis 2007, soit 5 240 habitants de plus en moyenne chaque année. Elle a presque triplé depuis 1985. Depuis l'instauration de ce visa, la plupart des autres habitants de l’archipel qui arrivent à Mayotte, ne retournent plus dans leur île d'origine comme auparavant.
Ce visa Balladur est soutenu par toute la classe politique mahoraise et les gouvernements successifs français. Certains élus français ont eu le courage de critiquer ce visa de la mort. Le député Noël Mamère, avait dénoncé dans un long article rédigé sur son blog "derue89.com" le visa Balladur. "La France de Hollande, barricadée à Mayotte, bafoue le droit international en continuant d’appliquer dans toute sa dureté les règles découlant du visa Balladur. Depuis 1994, plus de 8 000 morts ont ainsi été dénombrés dans le bras de mer de 70 km de large qui sépare l’île d’Anjouan de Mayotte", a rappelé Noël Mamère en octobre 2013.
"Les flux migratoires ne sont pas des invasions, mais des mouvements de population normaux dans un monde ouvert", a précisé encore sur son blog le maire de Bègles en Gironde.La délégation de la commission des lois du Senat français qui s’était rendue à Mayotte en mars 2012 avait dans ses conclusions, constaté l’échec de la politique de la reconduite à la frontière pratiquée à Mayotte et avait préconisé la révision pure et simple du "visa Balladur" qui limite la circulation des personnes entre Mayotte et les trois autres iles de l’archipel des Comores.
Mais Alain CHRISTNACHT, Conseiller d’État français chargé par le gouvernent français d’évaluer et de faire des propositions sur les règles applicables à l’entrée et le séjour des étrangers à Mayotte a suggéré le maintien de ce visa en septembre 2012. Il avait affirmé après sa visite dans l’archipel que l’abrogation du visa Balladur n’était pas la solution pour lutter contre l’immigration clandestine dans l’ile de Mayotte. Une suggestion reprise par le Président Hollande lors de sa visite aux Comores au mois d’aout 2014 qui a évoqué « l’impossibilité de faciliter la liberté de circulation entre Mayotte et les autres iles de l’archipel ».
Récemment un ancien député de Mayotte, Mansour Kamardine a évoqué dans le quotidien français « le Figaro » du 19 janvier 2016, la situation de plus qu'alarmante de Mayotte qui serait "au bord de la guerre civile". L'insécurité a atteint un niveau insupportable selon lui. En cause, « l'immigration clandestine » venue des autres iles de l’archipel des Comores. "La population d'origine mahoraise est aujourd'hui minoritaire" à Mayotte selon ce député.
L’ancien Premier Ministre Alain Juppé qui a visité Mayotte au mois de décembre 2015 a parlé d' une « situation totalement explosive ». Selon lui, « les immigrés illégaux arrivent tous les matins d’Anjouan (…), sur des bateaux illégaux qu’on appelle des Kwassas. On les prend, on les traite dans le centre de rétention, on les renvoie chez eux le soir, ils reviennent le lendemain matin. Il faut arrêter ça,a t-il affirmé
La politique française de lutte contre l’immigration à Mayotte est un échec patent qui risque de miner définitivement le développement économique de l’archipel des Comores.
Par ComoresDroit