Salim Saadi Ben Said Hachim se présente à la présidentielle de février prochain aux Comores. A 43 ans, ce spécialiste du développement et de...
Salim Saadi Ben Said Hachim se présente à la présidentielle de février prochain aux Comores. A 43 ans, ce spécialiste du développement et de l’aménagement urbain fait partie de l’importante diaspora comorienne en France. Son amour pour son pays natal et sa volonté de changement le poussent à se lancer en politique. Salim Saadi estime que les potentialités de son pays ne sont pas exploitées de manière efficace, et ce depuis l’indépendance il y a 40 ans. Il accuse les gouvernements successifs de ne pas œuvrer pour l’intérêt général et la France de maintenir les Comores dans le marasme économique. Rencontre avec un « libéral de gauche » dans son QG de campagne à l’Est de Paris.
54 Etats : Quelle est votre relation avec les Comores ?
Salim Saadi : L’archipel des Comores est ma terre natale. Je suis arrivé en France à l’âge de 8 ans. La France m’a beaucoup apporté. J’ai beaucoup appris. Aujourd’hui, ce savoir-faire et cet amour que j’ai de la France, j’aimerais les donner à mon pays d’origine. Je me sens avant tout comorien, pétri de cette culture et cet héritage. On a tous un devoir, on a tous quelque chose à apporter pour que les Comores changent. C’est pour cela que je me présente à l’élection présidentielle.
54 Etats : La diaspora a donc un rôle à jouer dans le développement des Comores ?
Salim Saadi : Bien entendu ! Nous jouons déjà un rôle économique très important, car il existe une masse financière non négligeable qui est apporté tous les ans par la diaspora. Mais cet argent est mal utilisé, mal exploité. Il faut maintenant faire un véritable « Plan Marshall » et apporter des compétences en même temps que cet argent.
54 Etats : Vous parlez d’une masse financière non-négligeable…
Salim Saadi : La diaspora envoie de l’argent pour construire des routes, des dispensaires, pour l’économie, pour le « grand mariage » (coutume onéreuse très suivie aux Comores, ndlr). Cela crée de la consommation. Cette manne financière, c’est environ le quart du PIB de l’Etat, donc ce n’est pas négligeable.
54 Etats : Votre grand ennemi, c’est la pauvreté. Comment comptez-vous la combattre ?
Salim Saadi : Chaque Comorien se dit que la pauvreté est une fatalité : on serait condamnés à être pauvres toute notre vie. Je ne partage pas du tout cet avis. Il n’y a pas de fatalité économique qui tienne ! Mon premier engagement, c’est réduire et stopper cette pauvreté en créant de la richesse et en augmentant les recettes de l’Etat. C’est un beau discours d’accord, mais moi, j’ai un programme. Mon programme c’est loger des gens, construire des maisons, donc créer de l’emploi via des partenariats public-privé avec des entreprises qui vont nous apporter leur savoir-faire. L’Etat sera actionnaire de ces entreprises extérieures. Ces entreprises auront l’obligation de transférer leur savoir-faire, de créer de la richesse et de créer de l’emploi.
54 Etats : Les Comores reçoivent pourtant de l’aide internationale…
Salim Saadi : Aujourd’hui, nous recevons des aides de l’Union Européenne, de la Banque africaine de développement (BAD), du Fonds monétaire international (FMI)… Ces aides, où passent-elles ? Comment sont-elles gérées ? Comment sont-elles exploitées ? Est-ce qu’elles bénéficient aux Comoriens ? Existe-t-il des rétro-commissions ? Est-ce que cela retourne dans la poche initiale ? Je ne sais pas, mais toujours est-il que la situation économique et la situation des Comores depuis l’indépendance n’a pas évolué… Si vous comparez une photo d’un bâtiment public il y a 40 ans avec aujourd’hui, c’est la même ! Cela n’a pas changé en 40 ans !
54 Etats : Vous dites que l’agriculture est la mère du développement…
Salim Saadi : Nous avons une terre qui est généreuse. On plante quelque chose : ça pousse ! On doit développer notre agriculture pour nous développer… On doit exporter. Aux Comores, on ne fait qu’importer… Or, nous avons des produits phares comme l’ylang-ylang (fleur utilisée dans la parfumerie, ndlr) : nous sommes pratiquement un des seuls pays à produire cette fleur, et on ne l’exploite pas comme il le faut… On a le clou de girofle, la vanille et on a toutes nos zones de pêches. Mais comment, avec toutes ces richesses, on ne peut pas construire un pays meilleur ? On ne peut pas réduire cette pauvreté ? Je ne veux pas entrer dans le débat du pétrole, ce n’est pas mon problème. Le vrai débat, il est sur nos acquis, sur nos terres.
54 Etats : Pourquoi ce potentiel est-il mal exploité ?
Salim Saadi : Parce que les gens ne s’intéressent qu’à leur petite personne ! Ils ne sont pas là pour servir l’intérêt général, ils sont là pour servir leur propre intérêt. Le pays ne peut faire que des petits gains parce qu’on ne pense qu’à sa propre personne.
54 Etats : Un rapport de la Banque mondiale suggère que l’agriculture organise une pénurie alimentaire pour maintenir les prix à la hausse…
Salim Saadi : J’ai pris connaissance de ce rapport. Je considère qu’aujourd’hui aux Comores, nous avons suffisamment de terres non exploitées, en jachère…
54 Etats : Volontairement ?
Salim Saadi : Je ne peux pas le penser ! Le malthusianisme est une faute. Comme disait le grand juriste de la Renaissance Jean Bodin : « Il n’est de richesses que d’hommes. » Chaque Comorien doit se mettre au travail et utiliser au mieux notre territoire national, terrestre et maritime. Dans les eaux comoriennes, on pêche pour 4 millions d’euros par jour. Notre budget est de 140 millions par an. La comparaison est vite faite…
54 Etats : Votre programme est assez ambitieux, voire onéreux. Comment vous le financez ?
Salim Saadi : Aujourd’hui, il faut commencer par valoriser nos zones maritimes. Nous avons bradé ou ignoré les ressources halieutiques et minières de ces zones.
54 Etats : C’est-à-dire ?
Aujourd’hui, nous touchons 15 millions d’euros par an sur nos zones de pêches, alors que cela devrait nous rapporter aux alentours de 150 millions d’euros par an. 15 millions par an là où les gens pêchent pour 4 millions par jour ! Ce n’est pas possible !
Suite et fin de cet entretien dans les prochaines heures sur habarizacomores.com
Entretien réalisé Par JOHN HARRISON - 54etats
54 Etats : Quelle est votre relation avec les Comores ?
Salim Saadi : L’archipel des Comores est ma terre natale. Je suis arrivé en France à l’âge de 8 ans. La France m’a beaucoup apporté. J’ai beaucoup appris. Aujourd’hui, ce savoir-faire et cet amour que j’ai de la France, j’aimerais les donner à mon pays d’origine. Je me sens avant tout comorien, pétri de cette culture et cet héritage. On a tous un devoir, on a tous quelque chose à apporter pour que les Comores changent. C’est pour cela que je me présente à l’élection présidentielle.
54 Etats : La diaspora a donc un rôle à jouer dans le développement des Comores ?
Salim Saadi : Bien entendu ! Nous jouons déjà un rôle économique très important, car il existe une masse financière non négligeable qui est apporté tous les ans par la diaspora. Mais cet argent est mal utilisé, mal exploité. Il faut maintenant faire un véritable « Plan Marshall » et apporter des compétences en même temps que cet argent.
54 Etats : Vous parlez d’une masse financière non-négligeable…
Salim Saadi : La diaspora envoie de l’argent pour construire des routes, des dispensaires, pour l’économie, pour le « grand mariage » (coutume onéreuse très suivie aux Comores, ndlr). Cela crée de la consommation. Cette manne financière, c’est environ le quart du PIB de l’Etat, donc ce n’est pas négligeable.
54 Etats : Votre grand ennemi, c’est la pauvreté. Comment comptez-vous la combattre ?
Salim Saadi : Chaque Comorien se dit que la pauvreté est une fatalité : on serait condamnés à être pauvres toute notre vie. Je ne partage pas du tout cet avis. Il n’y a pas de fatalité économique qui tienne ! Mon premier engagement, c’est réduire et stopper cette pauvreté en créant de la richesse et en augmentant les recettes de l’Etat. C’est un beau discours d’accord, mais moi, j’ai un programme. Mon programme c’est loger des gens, construire des maisons, donc créer de l’emploi via des partenariats public-privé avec des entreprises qui vont nous apporter leur savoir-faire. L’Etat sera actionnaire de ces entreprises extérieures. Ces entreprises auront l’obligation de transférer leur savoir-faire, de créer de la richesse et de créer de l’emploi.
54 Etats : Les Comores reçoivent pourtant de l’aide internationale…
Salim Saadi : Aujourd’hui, nous recevons des aides de l’Union Européenne, de la Banque africaine de développement (BAD), du Fonds monétaire international (FMI)… Ces aides, où passent-elles ? Comment sont-elles gérées ? Comment sont-elles exploitées ? Est-ce qu’elles bénéficient aux Comoriens ? Existe-t-il des rétro-commissions ? Est-ce que cela retourne dans la poche initiale ? Je ne sais pas, mais toujours est-il que la situation économique et la situation des Comores depuis l’indépendance n’a pas évolué… Si vous comparez une photo d’un bâtiment public il y a 40 ans avec aujourd’hui, c’est la même ! Cela n’a pas changé en 40 ans !
54 Etats : Vous dites que l’agriculture est la mère du développement…
Salim Saadi : Nous avons une terre qui est généreuse. On plante quelque chose : ça pousse ! On doit développer notre agriculture pour nous développer… On doit exporter. Aux Comores, on ne fait qu’importer… Or, nous avons des produits phares comme l’ylang-ylang (fleur utilisée dans la parfumerie, ndlr) : nous sommes pratiquement un des seuls pays à produire cette fleur, et on ne l’exploite pas comme il le faut… On a le clou de girofle, la vanille et on a toutes nos zones de pêches. Mais comment, avec toutes ces richesses, on ne peut pas construire un pays meilleur ? On ne peut pas réduire cette pauvreté ? Je ne veux pas entrer dans le débat du pétrole, ce n’est pas mon problème. Le vrai débat, il est sur nos acquis, sur nos terres.
54 Etats : Pourquoi ce potentiel est-il mal exploité ?
Salim Saadi : Parce que les gens ne s’intéressent qu’à leur petite personne ! Ils ne sont pas là pour servir l’intérêt général, ils sont là pour servir leur propre intérêt. Le pays ne peut faire que des petits gains parce qu’on ne pense qu’à sa propre personne.
54 Etats : Un rapport de la Banque mondiale suggère que l’agriculture organise une pénurie alimentaire pour maintenir les prix à la hausse…
Salim Saadi : J’ai pris connaissance de ce rapport. Je considère qu’aujourd’hui aux Comores, nous avons suffisamment de terres non exploitées, en jachère…
54 Etats : Volontairement ?
Salim Saadi : Je ne peux pas le penser ! Le malthusianisme est une faute. Comme disait le grand juriste de la Renaissance Jean Bodin : « Il n’est de richesses que d’hommes. » Chaque Comorien doit se mettre au travail et utiliser au mieux notre territoire national, terrestre et maritime. Dans les eaux comoriennes, on pêche pour 4 millions d’euros par jour. Notre budget est de 140 millions par an. La comparaison est vite faite…
54 Etats : Votre programme est assez ambitieux, voire onéreux. Comment vous le financez ?
Salim Saadi : Aujourd’hui, il faut commencer par valoriser nos zones maritimes. Nous avons bradé ou ignoré les ressources halieutiques et minières de ces zones.
54 Etats : C’est-à-dire ?
Aujourd’hui, nous touchons 15 millions d’euros par an sur nos zones de pêches, alors que cela devrait nous rapporter aux alentours de 150 millions d’euros par an. 15 millions par an là où les gens pêchent pour 4 millions par jour ! Ce n’est pas possible !
Suite et fin de cet entretien dans les prochaines heures sur habarizacomores.com
Entretien réalisé Par JOHN HARRISON - 54etats