À la veille de la cérémonie de clôture, la décision doit être prise alors que les Comores et Madagascar se sont retirés de l’édition en cou...
À la veille de la cérémonie de clôture, la décision doit être prise alors que les Comores et Madagascar se sont retirés de l’édition en cours.
Le drapeau des Jeux des îles de l’océan Indien sera-t-il remis demain au gouvernement des Comores ? La tradition veut en effet que le pays hôte transmette le flambeau au prochain organisateur. Mais la politisation des Jeux des îles voulue par le gouvernement français a amené le départ de la délégation des Comores et l’émergence d’une candidature alternative pour les Jeux de 2019. Le gouvernement français a gâché les Jeux organisés à La Réunion en les instrumentalisant à des fins politiques. Cet état d’esprit va-t-il réussir à vaincre la solidarité entre les peuples de notre région ?
C’est aujourd’hui, veille de la cérémonie de clôture, que doit être désignée la prochaine île qui accueillera les Jeux des îles de l’océan Indien de 2019. La décision devait être prise jeudi, elle a été reportée. Entre temps, la présidence de la République de Madagascar a annoncé le retrait de la Grande île des 9e Jeux des îles. Ce choix s’est fait « au vu des événements et traitements subis par la délégation malgache », indique les services de la présidence.
Après les Comores qui ont quitté les Jeux lundi, et Madagascar qui a choisi de faire de même hier, la réunion d’aujourd’hui se passera donc dans un contexte très particulier.
Avant ces Jeux, les Comores avaient fait part de leur intention d’organiser les prochains Jeux des îles. Les chances de voir accepter cette candidature sont d’autant plus grandes que les Comores sont, avec les Maldives, le seul pays qui n’a jamais organisé les Jeux des îles. La Réunion les a déjà accueillis trois fois, Maurice, Madagascar et les Seychelles deux fois.
Si tel était le choix du Comité international des Jeux, alors le drapeau des Jeux serait remis par La Réunion aux Comores lors de la cérémonie de clôture demain. En conférence de presse mardi, le Comité olympique des Comores a dit que le pays est toujours intéressé, et que s’il était choisi les prochains Jeux se déroulerait avec l’application conforme de la Charte décidée par le mouvement sportif.
Paris a choisi de politiser les Jeux
Mais depuis le mois de juin, la France a montré sa volonté de politiser les Jeux des îles. De passage à Mayotte, Manuel Valls, Premier ministre, avait dit qu’il trouvait normal que les Mahorais défilent derrière le drapeau français. Le pouvoir politique français a donc publiquement remis en cause la Charte des Jeux des îles, le texte sur lequel tous les sportifs s’étaient mis d’accord, et qui constitue la base du fonctionnement du plus grand rendez-vous sportif de notre région.
Alors que les Jeux n’avaient pas encore débuté, plusieurs délégations ont fait part de leurs difficultés à obtenir un visa pour tous les athlètes invités. Les autorités françaises imposent en effet à tous nos voisins, à l’exception de Maurice, l’obligation d’avoir au préalable un visa délivré par la France pour entrer à La Réunion. Le 28 juillet, le PCR a affiché sa solidarité avec les victimes des tracasseries administratives et a appelé à la raison. Mais à la veille de la cérémonie d’ouverture, des joueurs des équipes des Comores et de Madagascar n’étaient pas tous en possession du document. Les deux équipes ont donc choisi de ne pas participer aux matchs. Le lendemain, la France s’est engagée à régler dans la journée ce problème. Cela a permis de pouvoir organiser la cérémonie d’ouverture le samedi 1er août. C’est là qu’est survenu l’événement décisif.
Les Comores contraintes de se retirer
À la surprise générale, Mayotte ne défile pas derrière le drapeau des Jeux comme le prévoit la Charte, mais derrière celui de la France. Les sportifs comoriens décident de quitter immédiatement le stade. La fête était gâchée. Quelques instants plus tard, Patrick Kanner, ministre des Sports, répète ce qu’avait dit deux moins plus tôt le Premier ministre : les Mahorais ont droit au drapeau et à l’hymne français. Quant à la Charte, elle doit « évoluer » pour prendre en compte un nouveau statut de Mayotte qui n’est pourtant pas reconnu dans le droit international, et par les autres États participants.
Le 6 juin, un communiqué de Club Réunion, la délégation de La Réunion aux Jeux des îles, avance une responsabilité : « la préfecture de La Réunion a donné l’ordre de faire défiler, Mayotte, avec le drapeau français lors de la cérémonie d’ouverture ». C’est donc la France en tant que pouvoir politique qui est accusée d’être intervenue pour pousser les organisateurs à ne pas respecter la Charte des Jeux.
La démarche des sportifs comoriens a amené le samedi 1er aout la tenue d’un Conseil des ministres extraordinaire aux Comores qui a décidé ceci : retrait des 9e Jeux des îles, rappel de l’ambassadeur des Comores en France, convocation de l’ambassadeur de France aux Comores.
Pour tenter de sauver cette édition, les voisins de La Réunion font mardi une proposition : ne plus lever de drapeaux et jouer d’hymne nationaux lors des remises de médailles. Seuls le drapeau et l’hymne des Jeux seront utilisés.
Madagascar quitte les Jeux
C’est peu après qu’intervient un nouvel incident. Le drapeau malgache est pris à une athlète qui montait sur le podium puis froissé. Les images provoquent un scandale à Madagascar qui demande des excuses officielles. L’affaire remonte jusqu’au gouvernement, et le ministre des Affaires étrangères publie un communiqué à ce sujet.
L’émoi est d’autant plus grand que les athlètes mahorais et réunionnais montrant le drapeau français sur les podiums ne sont pas traités de manière aussi ferme, c’est le moins que l’on puisse dire. Finalement, les excuses du CIJ sont acceptées.
Mais jeudi, deux faits très grave ciblant la délégation malgache se sont déroulés. Des jeunes femmes de l’équipe de judo sont agressées près du village des Jeux. Le ministre malgache des Sports et le Consul de Madagascar à La Réunion se voit interdire l’accès à une tribune où ils souhaitaient rencontrer les athlètes. Cette accumulation a amené hier soir le président de la République à retirer Madagascar de ces Jeux des îles.
Non aux JFOI ! Oui aux Jeux des îles de l’océan Indien
Deux délégations sur sept se sont retirées. Deux autres avaient failli partir au lendemain de la cérémonie d’ouverture. Voilà le résultat de la politisation des Jeux des îles voulue par le gouvernement français. C’est dans ces conditions qu’une réunion est prévue aujourd’hui pour décider de l’attribution des prochains Jeux des îles. À l’annonce du retrait des Comores pour cette édition, une candidature alternative aux Îles de la Lune pour les Jeux 2019 est arrivée. Elle ferait sans doute bien les affaires de la France, car il est certain qu’aux Comores, la Charte sera appliquée et donc les Mahorais ne défileront pas derrière le drapeau de la France.
Dans son éditorial d’hier, Témoignages avait dit qu’il ne fallait pas que les Jeux des îles (JIOI) se transforment en Jeux de la France de l’océan Indien (JFOI), soit des Jeux où la France, pays situé à 10.000 kilomètres, fixe les règles. Ce point de vue est partagé, notamment par la presse mauricienne, qui dit que ce n’est pas à un ministre français de décider de l’avenir des Jeux.
Aux réserves avancées par ceux qui disent que les Comores n’ont pas les moyens d’organiser les Jeux, Témoignages a répondu que la solidarité permettra de régler toutes ces questions. Il ne fait guère de doute que le peuple comorien sera à l’heure du plus grand rassemblement de la jeunesse de l’océan Indien. Comme toujours, c’est le rassemblement des bonnes volontés qui peut faire avancer ensemble les pays de notre région. Le gouvernement français a gâché les Jeux organisés à La Réunion en les instrumentalisant à des fins politiques. Cet état d’esprit va-t-il réussir à vaincre la solidarité entre les peuples de notre région ?