Six juillet 1975-Six juillet 2015 : quarante ans d’indépendance. Un bilan s’impose. Et on peut le faire soit en regardant le verre à moitié...
Six juillet 1975-Six juillet 2015 : quarante ans d’indépendance. Un bilan s’impose. Et on peut le faire soit en regardant le verre à moitié vide soit à moitié plein : soit nous constatons ce qui a été accompli ou ce qui ne l’a pas été.
Je préfère personnellement mettre en évidence les éléments positifs : accession à la souveraineté internationale, liberté et fierté nationales retrouvées, plusieurs routes bitumées, plusieurs hôpitaux construits, plusieurs écoles mises en places et plusieurs commis et cadres formés... Car oui, c’est là, et bien là, la grande victoire de l’indépendance nationale : l’Etat comorien a aidé à la formation d’une classe intellectuelle capable de faire fonctionner l’Etat comorien. Un rappel : en 1988, on comptait dans le système éducatif comorien 250 professeurs étrangers et plusieurs techniciens expatriés dans l’administration comorienne. Aujourd’hui, on ne trouve (sauf à la marge) ni cadre ni enseignant étranger venu combler un besoin local ! L’Etat comorien a donc largement combattu l’ignorance. Un tel acquis ne devrait pas être oublié.
Le combat contre la misère n’est en revanche pas encore gagné. Car l’Etat n’a pas pu construire une économie viable à même de proposer un emploi à la population comorienne majoritairement jeune d’ailleurs (âge moyen : 19 ans). Le seul gros employeur comorien, très recherché malgré ses faiblesses notoires, reste encore l’Etat qui croule sous le poids de ses effectifs pléthoriques : plus de 12000 fonctionnaires !
Et voilà qui nous conduit aux élections de 2016 car les candidats ont l’obligation de proposer à ce pauvre pays un projet réaliste, sérieux et ambitieux capable de le sortir de la misère. Avant toute chose, ils doivent dire à la population comorienne comment ils reconstruiront les routes très abîmées et régleront la question énergétique (deux problèmes qui pénalisent toute l’économie comorienne et empoisonnent la vie de tous les Comoriens). Car toute réflexion sur le développement des Comores devrait commencer par là.
Ils doivent ensuite expliquer aux comoriens comment ils garantiront la paix et la stabilité politique du pays nécessaire au développement économique, financeront les infrastructures (routes, ports et aéroports) dont l’économie comorienne a besoin, formeront une main d’œuvre qualifiée et attractive, introduiront dans les mentalités comoriennes l’éthique du travail, bâtiront un environnement juridique pro-entreprise (afin d’attirer les investisseurs étrangers), aideront à faire émerger une classe entrepreneuriale comorienne. Car il faut le dire, haut et fort, une bonne fois pour toutes, à la population comorienne : l’Etat comorien peut (doit !) mettre en place un environnement favorable aux entreprises mais il ne pourra jamais résorber tout le chômage du pays. Autrement dit, l’Etat peut permettre à ceux qui le souhaitent (et pas seulement à ses amis !) de s’enrichir et en contrepartie d’embaucher et de payer des impôts.
Qui donc parmi les prétendants à Beit Salam pourrait endosser un projet si ambitieux ? Les électeurs comoriens auront le choix entre confier le pays à un novice ou à un quelqu’un d’expérimenté. Les deux choix sont très risqués. Les nouveaux, s’ils sont souvent bien intentionnés et parés de vertu, ils ne sont pas toujours les plus efficaces : le temps pour eux de réunir les équipes adéquates, de s’adapter à la fonction et d’esquisser les premières solutions, et le mandat est fini. Elback, Abdoulwahab et Sambi n’ont pas été particulièrement efficaces et tous étaient pourtant nouveaux à leurs fonctions ! La nouveauté, si elle est tentante, n’est absolument pas une garantie d’efficacité ! Et puis, dit-on, on ne fait jamais de la politique avec seulement de bons sentiments. Le deuxième choix serait de confier le pays à une personne expérimentée. Mais celle-ci aura nécessairement à son compte un actif et un passif. On pourra toujours lui rappeler tel ou tel acte commis quand elle était aux responsabilités.
Et puis il y a la réalité de la situation actuelle du pays à quelques mois de cette échéance : les candidats en lice capables de remporter ces élections ne sont pas nécessairement les meilleurs : Azali, Mohamed Ali Soilihi et le candidat de Juwa. Ces hommes-là sont tous connus des Comoriens. Et personne ne pourra leur faire croire qu’ils sont excellents ! Ils seront d’ailleurs des compétiteurs sérieux du fait qu’ils auront des équipes et des moyens réunis pendant qu’ils ont étaient aux affaires…
Mais la politique, c’est l’art de choisir entre deux maux (Raymond Aron) : les Comoriens devraient choisir non pas le meilleur mais le moins mauvais de ces hommes. L’avantage, c’est que ces personnes ayant déjà gouverné présenteront forcément des bilans qui doivent servir de boussoles aux électeurs comoriens. Et celui qui n’en a pas ou qui en a un mais négatif devrait être tout simplement exclu de la compétition par les électeurs.
Nassurdine Ali Mhoumadi, docteur ès Lettres, ancien enseignant à l’Université des Comores, fondateur du groupe scolaire Léopold Sédar Senghor (Nioumadzaha Bambao) est professeur de Lettres modernes dans la région lyonnaise. Il a signé trois essais chez l’Harmattan : Un Métis nommé Senghor (2010), Le Roman de Mohamed Toihiri dans la littérature comorienne (2012) et Réception de Léopold Sédar Senghor (2014). Il est chroniqueur à Albilad (hebdomadaire publié à Moroni).
Je préfère personnellement mettre en évidence les éléments positifs : accession à la souveraineté internationale, liberté et fierté nationales retrouvées, plusieurs routes bitumées, plusieurs hôpitaux construits, plusieurs écoles mises en places et plusieurs commis et cadres formés... Car oui, c’est là, et bien là, la grande victoire de l’indépendance nationale : l’Etat comorien a aidé à la formation d’une classe intellectuelle capable de faire fonctionner l’Etat comorien. Un rappel : en 1988, on comptait dans le système éducatif comorien 250 professeurs étrangers et plusieurs techniciens expatriés dans l’administration comorienne. Aujourd’hui, on ne trouve (sauf à la marge) ni cadre ni enseignant étranger venu combler un besoin local ! L’Etat comorien a donc largement combattu l’ignorance. Un tel acquis ne devrait pas être oublié.
Le combat contre la misère n’est en revanche pas encore gagné. Car l’Etat n’a pas pu construire une économie viable à même de proposer un emploi à la population comorienne majoritairement jeune d’ailleurs (âge moyen : 19 ans). Le seul gros employeur comorien, très recherché malgré ses faiblesses notoires, reste encore l’Etat qui croule sous le poids de ses effectifs pléthoriques : plus de 12000 fonctionnaires !
Et voilà qui nous conduit aux élections de 2016 car les candidats ont l’obligation de proposer à ce pauvre pays un projet réaliste, sérieux et ambitieux capable de le sortir de la misère. Avant toute chose, ils doivent dire à la population comorienne comment ils reconstruiront les routes très abîmées et régleront la question énergétique (deux problèmes qui pénalisent toute l’économie comorienne et empoisonnent la vie de tous les Comoriens). Car toute réflexion sur le développement des Comores devrait commencer par là.
Ils doivent ensuite expliquer aux comoriens comment ils garantiront la paix et la stabilité politique du pays nécessaire au développement économique, financeront les infrastructures (routes, ports et aéroports) dont l’économie comorienne a besoin, formeront une main d’œuvre qualifiée et attractive, introduiront dans les mentalités comoriennes l’éthique du travail, bâtiront un environnement juridique pro-entreprise (afin d’attirer les investisseurs étrangers), aideront à faire émerger une classe entrepreneuriale comorienne. Car il faut le dire, haut et fort, une bonne fois pour toutes, à la population comorienne : l’Etat comorien peut (doit !) mettre en place un environnement favorable aux entreprises mais il ne pourra jamais résorber tout le chômage du pays. Autrement dit, l’Etat peut permettre à ceux qui le souhaitent (et pas seulement à ses amis !) de s’enrichir et en contrepartie d’embaucher et de payer des impôts.
Qui donc parmi les prétendants à Beit Salam pourrait endosser un projet si ambitieux ? Les électeurs comoriens auront le choix entre confier le pays à un novice ou à un quelqu’un d’expérimenté. Les deux choix sont très risqués. Les nouveaux, s’ils sont souvent bien intentionnés et parés de vertu, ils ne sont pas toujours les plus efficaces : le temps pour eux de réunir les équipes adéquates, de s’adapter à la fonction et d’esquisser les premières solutions, et le mandat est fini. Elback, Abdoulwahab et Sambi n’ont pas été particulièrement efficaces et tous étaient pourtant nouveaux à leurs fonctions ! La nouveauté, si elle est tentante, n’est absolument pas une garantie d’efficacité ! Et puis, dit-on, on ne fait jamais de la politique avec seulement de bons sentiments. Le deuxième choix serait de confier le pays à une personne expérimentée. Mais celle-ci aura nécessairement à son compte un actif et un passif. On pourra toujours lui rappeler tel ou tel acte commis quand elle était aux responsabilités.
Et puis il y a la réalité de la situation actuelle du pays à quelques mois de cette échéance : les candidats en lice capables de remporter ces élections ne sont pas nécessairement les meilleurs : Azali, Mohamed Ali Soilihi et le candidat de Juwa. Ces hommes-là sont tous connus des Comoriens. Et personne ne pourra leur faire croire qu’ils sont excellents ! Ils seront d’ailleurs des compétiteurs sérieux du fait qu’ils auront des équipes et des moyens réunis pendant qu’ils ont étaient aux affaires…
Mais la politique, c’est l’art de choisir entre deux maux (Raymond Aron) : les Comoriens devraient choisir non pas le meilleur mais le moins mauvais de ces hommes. L’avantage, c’est que ces personnes ayant déjà gouverné présenteront forcément des bilans qui doivent servir de boussoles aux électeurs comoriens. Et celui qui n’en a pas ou qui en a un mais négatif devrait être tout simplement exclu de la compétition par les électeurs.
Nassurdine Ali Mhoumadi, docteur ès Lettres, ancien enseignant à l’Université des Comores, fondateur du groupe scolaire Léopold Sédar Senghor (Nioumadzaha Bambao) est professeur de Lettres modernes dans la région lyonnaise. Il a signé trois essais chez l’Harmattan : Un Métis nommé Senghor (2010), Le Roman de Mohamed Toihiri dans la littérature comorienne (2012) et Réception de Léopold Sédar Senghor (2014). Il est chroniqueur à Albilad (hebdomadaire publié à Moroni).