La scène a duré quelques secondes, entre la première et la dernière image. En reportage, le 18 avril, pour l’hebdomadaire sud-africain Su...
La scène a duré
quelques secondes, entre la première et la dernière image. En reportage,
le 18 avril, pour l’hebdomadaire sud-africain Sunday Times, le
photographe James Oatway, qui accompagnait le journaliste Beauregard
Tromp, couvrait les violences dont sont victimes les travailleurs
immigrés en Afrique du Sud. Ils s’étaient rendus dans le township
d’Alexandra, à Johannesburg, un qurtier où vivent près de 400 000
personnes dans des baraquements en dur ou en tôle, et qui avait été le
théâtre de violences xénophobes.
« Ils s’apprêtaient à le tuer », témoigne James Oatway sur Lightbox, le blog de Time Magazine dédié au photojournalisme. « Cela se voyait à leurs visages »,
ajoute t-il. En quelques secondes, un groupe d’assaillants armés fond
sur Emmanuel Sithole. Le Mozambicain est violemment battu, avant que ses
agresseurs ne prennent la fuite après s’être rendu compte qu’ils
étaient photographiés. La victime « a ensuite essayé de se relever avant de retomber. Puis il parvint à se déplacer, affaibli, le long de la rue », racontent les deux journalistes dans leur récit, paru dans le Sunday Times.
Au début de la scène : Emmanuel Sithole (au centre) est attaqué au couteau.
Crédits : James Oatway/REX/SIPA
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Les images, publiées le lendemain en une du Sunday Times, accompagnées du récit de Beauregard Tromp, n’ont pas manqué de faire réagir.
« Les gens doivent voir »
« Ces images ont eu un impact très important, tant auprès du grand public qu’auprès des autorités sud-africaines », souligne Sébastien Hervieu, journaliste du Monde basé en Afrique du Sud. « Leur
publication a certainement mis une pression supplémentaire sur le
gouvernement, accusé d’avoir réagi tardivement face aux violences », précise t-il.
Dès le lendemain de leur publication, le président Jacob Zuma faisait part de son émotion. « Ces images sont terribles. Les personnes qui vivent dans des townships n’ont jamais rien vu de semblable », a t-il déclaré. « Je suis inquiet de ce que ces images disent de nous à travers le monde », a ajouté le président sud-africain, lors d’une conférence de presse.
Du côté de l’opinion publique, « c’est la première fois que l’on a pu mettre un visage sur une victime de ces violences, ainsi que sur ses bourreaux », constate Sébastien Hervieu. Selon lui ces images peuvent avoir le même rôle que les très violentes photos de la mort d’Ernesto Alfabeto Nhamuave, un migrant mozambicain brûlé vif sous l’objectif d’un photographe en 2008. Cette année-là, les violences faites contre les étrangers avaient fait près de soixante victimes. L’histoire d’Ernesto Alfabeto Nhamuave, surnommé « burning man » (« l’homme en feu »), relayée par de nombreux médias à travers le monde, est alors devenue le symbole des violences xénophobes qui secouaient le pays. L’image est depuis régulièrement détournée pour illustrer des violences, comme celles qui ont secoué la Centrafrique, en 2014.
Cette fois encore, « leur publication a suscité un débat : elles ont été largement applaudies, mais certaines voix se sont aussi élevées, se demandant si le photographe n’aurait pas dû intervenir plus vite au lieu de prendre ces photos », constate Sébastien Hervieu. Sur les réseaux sociaux, plusieurs internautes reprochent aux journalistes de n’avoir pas apporté leur aide plus tôt à Emmanuel Sithole.
Dès le lendemain de leur publication, le président Jacob Zuma faisait part de son émotion. « Ces images sont terribles. Les personnes qui vivent dans des townships n’ont jamais rien vu de semblable », a t-il déclaré. « Je suis inquiet de ce que ces images disent de nous à travers le monde », a ajouté le président sud-africain, lors d’une conférence de presse.
Du côté de l’opinion publique, « c’est la première fois que l’on a pu mettre un visage sur une victime de ces violences, ainsi que sur ses bourreaux », constate Sébastien Hervieu. Selon lui ces images peuvent avoir le même rôle que les très violentes photos de la mort d’Ernesto Alfabeto Nhamuave, un migrant mozambicain brûlé vif sous l’objectif d’un photographe en 2008. Cette année-là, les violences faites contre les étrangers avaient fait près de soixante victimes. L’histoire d’Ernesto Alfabeto Nhamuave, surnommé « burning man » (« l’homme en feu »), relayée par de nombreux médias à travers le monde, est alors devenue le symbole des violences xénophobes qui secouaient le pays. L’image est depuis régulièrement détournée pour illustrer des violences, comme celles qui ont secoué la Centrafrique, en 2014.
Cette fois encore, « leur publication a suscité un débat : elles ont été largement applaudies, mais certaines voix se sont aussi élevées, se demandant si le photographe n’aurait pas dû intervenir plus vite au lieu de prendre ces photos », constate Sébastien Hervieu. Sur les réseaux sociaux, plusieurs internautes reprochent aux journalistes de n’avoir pas apporté leur aide plus tôt à Emmanuel Sithole.
« Le journaliste qui a réalisé ces images devrait être condamné pour non-assistance à personne en danger. »
D’autres internautes prennent cependant la défense du photographe, et de sa série de photos.
D’autres internautes prennent cependant la défense du photographe, et de sa série de photos.
« Les gens doivent voir… Ils doivent savoir… Car tout ceci doit prendre fin ! »
« Continuez
de faire du bon travail, James. Vous devriez être récompensé pour avoir
couvert cette horrible attaque contre Emmanuel Sithole. »
Avant cette agression, six autres personnes – trois étrangers et trois Sud-Africains – avaient déjà succombé lors des violences qui ont frappé le pays ces deux dernières semaines.
Le 21 avril, la police sud-africaine a annoncé l’arrestation de quatre suspects, qui ont ensuite été présentés devant un juge. De son côté, James Oatway n’exprime qu’un seul regret, celui de n’avoir pas pu trouver un médecin à temps. « Dix minutes en moins auraient pu tout changer. »
Avant cette agression, six autres personnes – trois étrangers et trois Sud-Africains – avaient déjà succombé lors des violences qui ont frappé le pays ces deux dernières semaines.
Le 21 avril, la police sud-africaine a annoncé l’arrestation de quatre suspects, qui ont ensuite été présentés devant un juge. De son côté, James Oatway n’exprime qu’un seul regret, celui de n’avoir pas pu trouver un médecin à temps. « Dix minutes en moins auraient pu tout changer. »