Dès sa prise de fonction, le Président de l'Union des Comores a rapidement mis en place au mois de septembre 2011, la Cour suprême pré...
Dès sa prise de fonction, le Président de l'Union des Comores a rapidement mis en place au mois de septembre 2011, la Cour suprême prévue par l'article 29 de la constitution en procédant à la nomination par décret des membres de cette Cour notamment, le Président, le Vice-président, le Procureur Général, les Conseillers et l'Avocat général. La Cour suprême est la plus haute juridiction en matière judiciaire, administrative et des comptes de l'Union et des îles. Les décisions de cette Cour ne sont susceptibles d'aucun recours et s'imposent au pouvoir exécutif, au pouvoir législatif ainsi qu'à toutes les juridictions du territoire de l'Union. L'instauration de la Cour suprême est une réponse à une très vieille question qui se pose depuis l'accession des Comores l'indépendance.
En effet, depuis 1975, les affaires jugées l'ont été jusqu'à la Cour d'Appel. Des nombreux pourvois ont été effectués mais aucun n'a abouti pour la simple raison que la Cour suprême n'a jamais existé. L'une des missions principales de la Cour Suprême est constituer une jurisprudence et de permettre une bonne administration de la justice. Sa création était d'autant plus nécessaire qu'il existe déjà en droit des affaires une haute juridiction (la Cour Commune de Justice et d'Arbitrage, CCJA) à Cotonou au Bénin qui centralise les pourvois en cassation des pays membres de l'Organisation pour l'harmonisation en Afrique du Droit des Affaires (O.H.A.DA) dont les Comores font partie des Etats membres.
La loi organique fixant la composition ainsi que les règles de fonctionnement de la Cour suprême dispose que la Cour Suprême se compose de trois Sections : Une section judiciaire, une section administrative et une section des comptes. Cette loi dispose également que la Cour Suprême est compétente pour juger le Président, les Vice- Présidents et les membres du Gouvernement de l'Union mis en accusation devant elle par l'Assemblée de l'Union pour haute trahison en statuant comme " Haute Cour de Justice". Saisi par le Procureur Général près la Cour Suprême, la mise en accusation est votée par l'Assemblée de l'Union par scrutin public à la majorité des 2/3 des députés. La Cour Suprême, statuant comme Haute Cour de Justice, est liée par la définition du crime de haute trahison et la détermination des peines résultant des lois pénales en vigueur à l'époque des faits, objet des poursuites. Au sens de cette loi « le crime de haute trahison » comporte les éléments matériels suivants :
- la violation manifeste et délibérée de la constitution de l'Union ;- les décisions de nature à compromettre gravement l'unité nationale et la paix civile ;- la collusion avérée avec des groupements terroristes ou de mercenariat ;- les actes de détournement et de corruption caractérisés au détriment de l'intérêt général ;- le parjure et le mensonge caractérisés :- les délits et crimes de droit commun de nature à porter atteinte à l'honneur :- Des actes dépourvus de lien avec l'exercice des fonctions
Ainsi, la mise en accusation pour crime de haute trahison doit être votée par l'Assemblée de l'Union sur saisine du Procureur Général de la Cour Suprême. Et justement ce Procureur Général a été dans un passé récent nommé par décret du Président de l'Union, Conseiller juridique à la Présidence. D'ailleurs, il est tout le temps à la présidence, contrôle les actes administratifs du Chef de l'Etat et participe activement aux manifestations festives d'autosatisfaction du palais présidentiel. Et pourtant la loi portant statut des magistrats dispose que « l'exercice des fonctions de magistrat est incompatible avec l'exercice de toutes activités politiques, de toutes fonctions publiques ou de toute autre fonction professionnelle ou salariée ». Cette nomination était une aberration, une violation flagrante du principe sacré de la séparation des pouvoirs entre le pouvoir exécutif et le pouvoir judiciaire. La séparation du pouvoir judiciaire est l'un des fondements d'un État de droit. Bien que nommés par le pouvoir exécutif, en principe les juges n'ont pas de compte à rendre aux élus ou aux citoyens et il est très difficile de les destituer. Leur indépendance leur permet de juger de manière impartiale les actes commis par l'Etat ou un gouvernant. L'indépendance de leur pouvoir vient aussi du fait que les juges rendent leur décision, sur la base des textes de loi. Le but de la séparation des pouvoirs est d'empêcher qu'une seule personne ou un groupe restreint de personnes concentrent excessivement en leurs mains tous les pouvoirs de l'État : "C'est une expérience éternelle, que tout homme qui a du pouvoir est porté à en abuser ; il va jusqu'à ce qu'il trouve des limites" écrivait Montesquieu.
Ainsi, ce n'est pas avec l'actuel Procureur Général de la Cour Suprême, que cette Cour, statuera un jour comme « Haute Cour de Justice ». Le Président, les Vice- Présidents et les membres du Gouvernement de l'Union peuvent continuer à violer la constitution, à commettre les actes de détournement et de corruption caractérisés au détriment de l'intérêt général, sans être inquiété pour l'instant.
Par ComoresDroit
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