Une année de prison ferme et une amende de 75.000 francs contre les «tracteurs». Ce samedi 10 mai 2014, le Tribunal de Fomboni a rend...
Une année de prison ferme et une amende de 75.000 francs contre les «tracteurs».
Ce samedi 10 mai 2014, le Tribunal de Fomboni a rendu son verdict contre les 4 jeunes hommes de Djoiezi accusés d’avoir rédigé et distribué un tract contre le Président de la République et ses proches, le jeudi 1er mai 2014, au moment même où le chef de l’État arrivait à Mohéli, où ses partisans l’avaient accueilli en grande pompe. La peine est lourde: une année de prison ferme et une amende de 75.000 francs comoriens chacun. Dès que les Djoieziens ont appris la lourdeur du verdict, des centaines d’entre eux se réunirent et se mirent à invoquer Dieu dans des «Takbir» d’une violence à glacer le sang. Ils continuèrent ces «Takbir» jusqu’aux demeures de Soilihi Mohamed et Abdou Madi Mari, deux Conseillers officieux mais très influents du Président de la République, qu’ils rendent responsables de beaucoup de maux et maladresses dans la gouvernance du Président de la République, notamment dans les relations particulièrement marquées par le mépris que celui-ci entretient avec les Mohéliens les plus méritants, ostracisés à cause de ceux qui sont accusés de manier la haine et la détestation, là où le Président de la République aurait été mieux inspiré de favoriser la méritocratie.
Mais, le plus grave, c’est que les Indignés de Djoiezi ont lancé le mot d’ordre suivant: «Au train où vont les choses, il faudra que le régime politique d’Ikililou Dhoinine provoque la mort d’un Djoiezien pour que la rupture entre lui et nous soit marquée par le sang. Nous lui demandons de tuer l’un d’entre nous. De toute manière, nous l’attendons pour lui parler quand il ne sera plus Président». Une fois de plus, on constate que le chef de l’État est embarqué dans une drôle de galère.
Même sous le régime politique d’Ahmed Abdallah, quand, en mars 1988, une lettre ouverte d’une grande sévérité avait été adressée au chef de l’État, les choses n’étaient pas allées aussi loin, et au bout d’une garde à vue d’intimidation, la situation était retournée à la normale. À l’époque, on pouvait lire dans le Rapport annuel 1988 d’Amnesty International: «Deux anciens ministres [...] ainsi que deux professeurs d’histoire[...] ont été arrêtés en mars [1988]. Tous habitaient l’île de Mohéli. Ils auraient été incarcérés à la suite (de la mise en circulation) d’un tract accusant les autorités de pratiquer une politique discriminatoire à l’égard de Mohéli, qui souffrirait de marginalisation [...]» (Amnesty International:Rapport annuel 1988, Paris, 1988, p. 38.). Les deux anciens ministres étaient Mouhibaca Baco et Salim Djabir, et les deux professeurs, Saïd Dhoifir Bounou et Mohamed-Nassur Riziki Mohamed.
Qu’est-ce qui va se passer aujourd’hui? Seuls Dieu et le Président de la République le savent. En tout état de cause, l’affaire est très particulière parce que parmi les jeunes qui ont rédigé et mis en circulation le tract, on retrouve un neveu du Président de la République. Quand, le 1er mai 2014, l’affaire a été évoquée à Djoiezi en présence du Président de la République et du père de l’un des jeunes accusés d’être à l’origine du tract, brisé par la douleur, ce papa avait déclaré: «Mes enfants sont morts». Le Président de la République en a tiré une immense souffrance car il a saisi le sens caché du message, mais il n’a pas été en mesure de contrôler les débordements judiciaires de ceux qui l’ont poussé à une radicalité dont la conséquence a été la division de Djoiezi en deux blocs qui se détestent et se haïssent.
En définitive, le nom du politicien mohélien (nous taisons son nom) soupçonné d’avoir manipulé les jeunes Djoieziens n’a pas été cité au cours de ce procès mené à la hussarde. Ce qui a empêché les ultras de Beït-Salam de marcher sur la tête de ce politicien en disgrâce. Mais, ce n’est que partie remise. Ils trouveront le moyen de l’impliquer dans autre chose. Vous verrez.
Par ARM