Entre peaux de banane, dénigrement, indifférence et absence de solidarité. La politique est une faune assez spéciale. Bien que n’étant pas...
Entre peaux de banane, dénigrement, indifférence et absence de solidarité.
La politique est une faune assez spéciale. Bien que n’étant pas de nationalité française, j’ai assisté, ce matin du 1er mars 2014, en compagnie d’autres Comoriens, à une réunion avec un grand parti politique français. Objet de la réunion: la désignation d’une personnalité originaire des Comores qui doit être sur la liste du parti politique en question, en position éligible, pour les élections municipales françaises de mars 2014. Ah! Les Comoriens de France et la politique! Tout un programme. En même temps, s’il est un domaine dans lequel les Comoriens de France manifestent leurs faiblesses, misères et malédictions, c’est bien dans celui-là. Qu’on se le dise: on retrouve des Comoriens en France depuis au moins les années 1940. Or, à ce jour, on ne les voit ni dans le commerce, ni en politique. Même des communautés qui commencent à peine à s’installer en France ont une plus grande visibilité commerciale et politique que les Comoriens, les anciens «Corses de l’océan Indien». On tire cette conclusion pessimiste, mais sans jamais se poser des questions, sans doute pour ne pas déranger le confort intellectuel dans lequel on se complaît. Naturellement, les intellectuels qui s’intéressent à la communauté comorienne ont tort de ne pas plonger dans cette malédiction politique franco-comorienne.
Quand on s’y intéresse, on découvre que la damnation politique des Franco-Comoriens a pour origine le manque total de solidarité chez ceux-ci. Notre Communauté est au Paradis quand il s’agit d’activités communautaires, mais ne fait rien en politique. La raison? Parce que ceux qui disent savoir sont chez eux, dans leur confort familial. Pendant des décennies, la scène politique franco-comorienne a été occupée par des gens qui n’ont pas de biographie (CV), qui se présentent auprès de leurs amis français en tant que «grands notables», qui n’ont aucune culture, y compris politique, qui parlent à peine français, mais qui savent mobiliser les Comoriens par un discours démagogique. Ils font tout pour que leurs amis français dans les appareils de partis politiques ne découvrent jamais les vrais talents politiques comoriens de la Communauté, parce qu’ils veulent préserver leurs baronnies et leurs petites situations de rente.
Pour les élections municipales de mars 2014, les Franco-Comoriens de France sont en train de sortir de leur sieste et torpeur de 70 ans. Ils sont candidats dans plusieurs villes de France. Cette fois, ce sont des jeunes qui investissent le champ politique, sans le soutien des «anciens». Ils ont compris que tout est fait pour maintenir la Communauté comorienne dans les divisions et dans la médiocrité, et veulent faire mieux que les parents, dont le bilan politique est absolument nul. Ces jeunes bardés de diplômés, dans le cas de certains, ne comptent sur personne, mais sur eux-mêmes car s’ils attendaient l’onction des «anciens», ils dormiraient encore pendant un autre demi-siècle. Donc, ils font tout par eux-mêmes. Mais, la France n’est pas les Comores. Aux Comores, n’importe qui peut être candidat à n’importe quelle élection, dans le pur style des «“Républiquettes” aux micro-ondes». Mais, que peut faire en politique en France le plus talentueux des Comoriens s’il n’a pas l’appui d’un parti politique qui a déjà une machine électorale? Si on ne répond pas à cette question, il ne faut pas s’intéresser à la Communauté comorienne de France au regard des élections qui ont lieu en France.
On doit rappeler cette conclusion quand on tombe sur l’article d’Al Watwanen date du 28 février 2014 et intitulé «Municipalités françaises en mars. Une flopée de candidats d’origine comorienne». Je suis sonné quand je suis tombé sur le mot: «Sans convictions», qui doit servir à épingler les Franco-Comoriens qui s’engagent en politique en France. Ce mot est repris dans une explication de l’historien franco-comorien Mahmoud Ibrahime, qu’on ne présente plus: «Beaucoup sont passés de la Gauche à la Droite comme Élisabeth ou Maliza, ou encore Saïd Ahamada du Modem, qui chantait pour Pape Diouf et qui finit au Parti socialiste. Je suis contre les jeunes qui, au fil de l’année, critiquent les politiciens comoriens puis font pire en se baladant de partis en partis sans convictions». Connaissant Mahmoud Ibrahime, je sais qu’il n’est pas quelqu’un qui parle pour ne rien dire. Seulement, je crois qu’il pourrait nuancer son discours car Élisabeth Saïd n’a quitté le Parti socialiste qu’après avoir entendu de la bouche d’un baron marseillais de son ancien parti des propos malheureux, qu’elle n’aura jamais cru entendre un jour de la bouche d’un homme qui fait l’apologie des valeurs de la République. Ce sont donc des «blessures républicaines», qui l’ont poussée à changer de camp. Cela ne relève pas d’un «manque de convictions», mais de la volonté de faire de la politique avec des gens qui ne lui tiendront pas des propos malheureux. Moi, j’aurais fait pareil, car il ne sert à rien de s’incruster dans un milieu politique dans lequel on n’est pas vraiment à l’aise.
Dans le cas de Maliza Saïd (photos), les choses sont beaucoup plus simples car, même si elle a des idées progressistes bien arrêtées, elle n’a pas changé de camp car elle n’a jamais milité au sein d’un parti politique de Gauche. Elle a décidé de faire partie de la liste conduite par Jean-Claude Gaudin, le Maire sortant de Marseille, pour des raisons de politique locale. Elle n’a pas pris la carte de l’UMP, dont elle n’est pas membre. Elle répète et assène qu’elle est dans une «dynamique marseillaise» et que, si une évolution majeure doit intervenir dans son engagement politique, cela n’est pas à l’ordre du jour. Pour l’instant, ce qui l’intéresse, c’est son action politique dans la ville de Marseille, aux côtés de Jean-Claude Gaudin, à qui elle n’a strictement rien à reprocher. Bien au contraire, elle se reconnaît en Jean-Claude Gaudin pour son sens de l’État et de la République et pour son attachement et amour pour Marseille.
Ce qu’elle dit sur le sujet vaut la peine d’être connu: «Sur le paysage politique français, Marseille est une ville à part, avec des spécificités, qui lui sont propres. Cette ville cosmopolite a besoin, à sa tête, d’un rassembleur, d’un homme qui en comprend les ressorts intimes et les caractéristiques propres. Pour moi, il ne fait guère de doute que la personne la mieux à même pour rassembler les Marseillais dans leur incroyable mosaïque, et comme on dit, “pour faire cohabiter loups et agneaux”, est incontestablement Jean-Claude Gaudin. C’est un homme qui sait parler à tout le monde et qui sait s’affranchir des appareils de partis politiques, y compris du sien propre quand il le faut. C’est un homme de terrain qui refuse d’être un apparatchik coupé des réalités. Sa force réside dans son rejet de toute forme de dogmatisme stérile. C’est un homme très pragmatique, doté d’un sens pratique que personne ne songerait à lui renier. C’est aussi un homme qui sait aller au-delà de son appartenance partisane et politique, pour être tout simplement un Marseillais qui aime Marseille et qui travaille pour son bien-être et son épanouissement. Là où d’autres pensent parti politique, il pense Marseille, et là où d’autres pensent à diviser, il fait tout pour rassembler. Du fait de mes origines intellectuelles, et depuis que je comprends le but de l’action civique et politique réelle, j’ai suivi avec attention son action sur le terrain. Objectivement, je n’ai pas eu à m’en plaindre, car Jean-Claude Gaudin, en homme d’expérience et qui sait se situer au-dessus de la mêlée, sait s’adresser au cœur des Marseillais. Si je n’en voulais qu’une seule preuve, je la verrais à travers la démarche des personnes qui accordaient leurs suffrages aux candidats d’autres partis politiques et qui, dès qu’ils l’ont vu à l’œuvre, parcourir Marseille dans tous les sens à la recherche de solutions pour la ville et ses habitants, ont fini par reconnaître ses mérites et par être avec lui aujourd’hui, pour le bien de Marseille. Étant moi-même partisane d’une logique de rassemblement, je n’ai pas hésité à m’engager en politique à ses côtés, et qu’on ne compte pas sur moi pour désavouer un homme d’une telle expérience et d’un tel charisme. Marseille et les Marseillais lui doivent beaucoup».
Le parcours d’Élisabeth Saïd milite en faveur de cette militante qui, parce qu’elle s’est sentie déçue et blessée par des propos malheureux, a préféré choisir un camp où elle est en harmonie avec elle-même. Quant à Maliza Saïd, son cas est beaucoup plus simple car cette doctorante n’a la carte d’aucun parti politique. Elle est au début de sa carrière politique et suscite déjà le respect dans certains états-majors politiques. Promotrice de la «dynamique marseillaise», elle voit venir. Elle laisse les choses se faire, sans opportunisme. Elle attend.
Par ARM
© www.lemohelien.com – Samedi 1er mars 2014