Le roi Abdallah s'engage à punir tout Saoudien s'engageant ou finançant le djihad en Syrie, tordant définitivement le cou à une ac...
Le roi Abdallah s'engage à punir tout Saoudien s'engageant ou finançant le djihad en Syrie, tordant définitivement le cou à une accusation sans fondement.
C'est une idée reçue largement répandue en France, que répètent à l'envi les nombreux critiques de la politique étrangère de François Hollande, jugée trop pro-saoudienne. À les croire, le richissime royaume saoud financerait les djihadistes étrangers en pointe de la rébellion contre le régime de Bachar el-Assad. "Comment la France peut-elle soutenir en Syrie ceux qu'elle combat au Mali ?" entend-on régulièrement dans la bouche des plus farouches opposants au président français, Marine Le Pen en tête. Cette idée est pourtant une aberration. Preuve en a encore été faite ce lundi.
Par décret royal, Abdallah d'Arabie saoudite a en effet décidé de punir sévèrement tout citoyen saoudien s'engageant ou soutenant une organisation extrémiste, dans une évidente allusion à la Syrie. Et question terrorisme, le souverain saoudien, qui se sait dans la ligne de mire d'al-Qaida, ne plaisante pas : la mesure prévoit des peines allant de 5 à 30 ans de prison.
Depuis le début de la révolution syrienne en 2011, des milliers de combattants arabes en provenance du Golfe (Arabie saoudite, Qatar, Koweït, Yémen...), du Moyen-Orient (Irak, Jordanie), du Maghreb (Tunisie, Libye) et d'Europe sont venus rejoindre les groupes djihadistes, le Front al-Nosra (branche syrienne d'al-Qaida)et l'État islamique en Irak et au Levant (EIIL, ancienne branche irakienne d'al-Qaida), engagés au sein de la rébellion syrienne. "Tandis que le premier, créé à l'été 2011, est majoritairement composé de combattants syriens souhaitant la chute de Bachar el-Assad, le second, arrivé en Syrie en 2013, se démarque par ses djihadistes étrangers, souhaitant avant tout le rétablissement du califat islamique, de l'Irak jusqu'au Liban", explique Mathieu Guidère (1), professeur d'islamologie à l'université de Toulouse-Le Mirail.
Sur le terrain, ces groupes djihadistes prennent rapidement l'avantage sur les autres factions rebelles plus modérées. Tout d'abord parce qu'ils bénéficient du savoir-faire de soldats expérimentés ayant déjà combattu sur d'autres terres de djihad, d'Afghanistan aux Balkans, mais surtout parce qu'ils profitent d'une confortable manne financière, en provenance du Golfe. Dès lors, de nombreux combattants rebelles, déçus par les promesses non tenues de l'Occident sur la livraison d'armes aux groupes modérés, ont décidé de gonfler leurs rangs.
"Ce n'est pas l'État saoudien qui finance ces groupes", annonce d'emblée Nabil Mouline (2), spécialiste de l'Arabie saoudite au CNRS. "Aucune autorité politique ni aucune autorité religieuse saoudienne n'autorisent le djihad depuis la fin des années 1980." À la chute de l'empire soviétique, les djihadistes qui ont combattu en Afghanistan se retournent contre les États-Unis et leurs alliés, notamment après la première guerre du Golfe. Dès le milieu des années 1990, l'Arabie saoudite est victime d'attentats revendiqués par al-Qaida, et cela jusqu'en 2006. "De fait, le royaume a déjà expérimenté le phénomène des djihadistes rentrant dans leur pays d'origine pour y commettre des attaques, ce qui l'inquiète d'autant plus aujourd'hui", explique Nabil Mouline.
Après une accalmie relative, le royaume saoud a indirectement subi les effets des Printemps arabes. Le fait que nombre de Syriens sunnites soient sévèrement réprimés au quotidien par le pouvoir alaouite (secte issue du chiisme) a choqué beaucoup de Saoudiens, d'autant plus que Damas a été aidé en ce sens par le rival millénaire du royaume wahhabite, la République islamique chiite d'Iran.
"Outre l'intérêt géopolitique certain, l'affect a beaucoup joué dans la mobilisation des Saoudiens", explique Nabil Mouline. De nombreuses collectes de fonds à but humanitaire sont alors organisées dans les mosquées du pays, au nom de la charité islamique. À la manoeuvre, des réseaux de prédicateurs religieux, mais aussi des hommes d'affaires réputés pieux, parfois liés à la vaste famille royale saoudienne. "Ces richissimes notables, mais aussi des princes saoudiens, sont, eux, favorables à l'application de la charia et à l'établissement d'un État islamique en Syrie", pointe l'islamologue Mathieu Guidère. Ainsi, l'argent collecté, destiné officiellement à venir en aide aux populations civiles syriennes, sert souvent à financer et à armer les groupes djihadistes.
Si le décret royal vise clairement à dissuader ces pratiques, nul doute que la chasse aux fonds djihadistes s'annonce, elle, des plus difficiles. "Vu l'étendue des instances de charité en Arabie saoudite, le gouvernement saoudien n'a aucun moyen de contrôler les milliards de flux d'argent", estime Nabil Mouline. En revanche, Riyad ne se prive pas de financer d'autres membres de l'opposition syrienne, pour éviter que la contagion révolutionnaire ne gagne le royaume saoud, mais surtout pour concurrencer l'Iran, qui a envoyé des centaines de combattants du Hezbollah libanais en Syrie.
Outre la Coalition nationale syrienne (principal conglomérat de l'opposition, basé à l'étranger), dont elle a choisi le président Ahmad al-Jarba, l'Arabie saoudite est, avec le Qatar, le principal pourvoyeur de fonds des rebelles non djihadistes.
Parmi eux, les plus influents demeurent sans doute les membres du Front islamique, coalition de plusieurs groupes rebelles salafistes, à l'idéologie proche des djihadistes. "Ils possèdent les mêmes convictions d'idéal de liberté et de justice - basé sur la charia - que les djihadistes, mais à la différence de ces derniers, les salafistes ne considèrent pas tous les autres individus comme des mécréants qu'il faut à tout prix convertir par les armes", explique Mathieu Guidère.
Sous l'impulsion de l'Arabie saoudite, le Front islamique ainsi que d'autres coalitions rebelles plus modérées ont lancé début janvier une "seconde révolution" visant à mettre fin aux nombreuses exactions commises par les djihadistes de l'EIIL en Syrie. Une lutte fratricide féroce au sein de l'opposition syrienne, qui a fait plus de 1 400 morts en un mois.
Le Point.fr - Publié le
Par décret royal, Abdallah d'Arabie saoudite a en effet décidé de punir sévèrement tout citoyen saoudien s'engageant ou soutenant une organisation extrémiste, dans une évidente allusion à la Syrie. Et question terrorisme, le souverain saoudien, qui se sait dans la ligne de mire d'al-Qaida, ne plaisante pas : la mesure prévoit des peines allant de 5 à 30 ans de prison.
Expérience et argent
Depuis le début de la révolution syrienne en 2011, des milliers de combattants arabes en provenance du Golfe (Arabie saoudite, Qatar, Koweït, Yémen...), du Moyen-Orient (Irak, Jordanie), du Maghreb (Tunisie, Libye) et d'Europe sont venus rejoindre les groupes djihadistes, le Front al-Nosra (branche syrienne d'al-Qaida)et l'État islamique en Irak et au Levant (EIIL, ancienne branche irakienne d'al-Qaida), engagés au sein de la rébellion syrienne. "Tandis que le premier, créé à l'été 2011, est majoritairement composé de combattants syriens souhaitant la chute de Bachar el-Assad, le second, arrivé en Syrie en 2013, se démarque par ses djihadistes étrangers, souhaitant avant tout le rétablissement du califat islamique, de l'Irak jusqu'au Liban", explique Mathieu Guidère (1), professeur d'islamologie à l'université de Toulouse-Le Mirail.
Sur le terrain, ces groupes djihadistes prennent rapidement l'avantage sur les autres factions rebelles plus modérées. Tout d'abord parce qu'ils bénéficient du savoir-faire de soldats expérimentés ayant déjà combattu sur d'autres terres de djihad, d'Afghanistan aux Balkans, mais surtout parce qu'ils profitent d'une confortable manne financière, en provenance du Golfe. Dès lors, de nombreux combattants rebelles, déçus par les promesses non tenues de l'Occident sur la livraison d'armes aux groupes modérés, ont décidé de gonfler leurs rangs.
Retour de bâton
"Ce n'est pas l'État saoudien qui finance ces groupes", annonce d'emblée Nabil Mouline (2), spécialiste de l'Arabie saoudite au CNRS. "Aucune autorité politique ni aucune autorité religieuse saoudienne n'autorisent le djihad depuis la fin des années 1980." À la chute de l'empire soviétique, les djihadistes qui ont combattu en Afghanistan se retournent contre les États-Unis et leurs alliés, notamment après la première guerre du Golfe. Dès le milieu des années 1990, l'Arabie saoudite est victime d'attentats revendiqués par al-Qaida, et cela jusqu'en 2006. "De fait, le royaume a déjà expérimenté le phénomène des djihadistes rentrant dans leur pays d'origine pour y commettre des attaques, ce qui l'inquiète d'autant plus aujourd'hui", explique Nabil Mouline.
Après une accalmie relative, le royaume saoud a indirectement subi les effets des Printemps arabes. Le fait que nombre de Syriens sunnites soient sévèrement réprimés au quotidien par le pouvoir alaouite (secte issue du chiisme) a choqué beaucoup de Saoudiens, d'autant plus que Damas a été aidé en ce sens par le rival millénaire du royaume wahhabite, la République islamique chiite d'Iran.
Charité islamique
"Outre l'intérêt géopolitique certain, l'affect a beaucoup joué dans la mobilisation des Saoudiens", explique Nabil Mouline. De nombreuses collectes de fonds à but humanitaire sont alors organisées dans les mosquées du pays, au nom de la charité islamique. À la manoeuvre, des réseaux de prédicateurs religieux, mais aussi des hommes d'affaires réputés pieux, parfois liés à la vaste famille royale saoudienne. "Ces richissimes notables, mais aussi des princes saoudiens, sont, eux, favorables à l'application de la charia et à l'établissement d'un État islamique en Syrie", pointe l'islamologue Mathieu Guidère. Ainsi, l'argent collecté, destiné officiellement à venir en aide aux populations civiles syriennes, sert souvent à financer et à armer les groupes djihadistes.
Si le décret royal vise clairement à dissuader ces pratiques, nul doute que la chasse aux fonds djihadistes s'annonce, elle, des plus difficiles. "Vu l'étendue des instances de charité en Arabie saoudite, le gouvernement saoudien n'a aucun moyen de contrôler les milliards de flux d'argent", estime Nabil Mouline. En revanche, Riyad ne se prive pas de financer d'autres membres de l'opposition syrienne, pour éviter que la contagion révolutionnaire ne gagne le royaume saoud, mais surtout pour concurrencer l'Iran, qui a envoyé des centaines de combattants du Hezbollah libanais en Syrie.
Outre la Coalition nationale syrienne (principal conglomérat de l'opposition, basé à l'étranger), dont elle a choisi le président Ahmad al-Jarba, l'Arabie saoudite est, avec le Qatar, le principal pourvoyeur de fonds des rebelles non djihadistes.
Aide aux salafistes
Parmi eux, les plus influents demeurent sans doute les membres du Front islamique, coalition de plusieurs groupes rebelles salafistes, à l'idéologie proche des djihadistes. "Ils possèdent les mêmes convictions d'idéal de liberté et de justice - basé sur la charia - que les djihadistes, mais à la différence de ces derniers, les salafistes ne considèrent pas tous les autres individus comme des mécréants qu'il faut à tout prix convertir par les armes", explique Mathieu Guidère.
Sous l'impulsion de l'Arabie saoudite, le Front islamique ainsi que d'autres coalitions rebelles plus modérées ont lancé début janvier une "seconde révolution" visant à mettre fin aux nombreuses exactions commises par les djihadistes de l'EIIL en Syrie. Une lutte fratricide féroce au sein de l'opposition syrienne, qui a fait plus de 1 400 morts en un mois.
Le Point.fr - Publié le
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